Le trait "De unitate formae" de Gilles de Lessines ... - Boston College
Le trait "De unitate formae" de Gilles de Lessines ... - Boston College
Le trait "De unitate formae" de Gilles de Lessines ... - Boston College
You also want an ePaper? Increase the reach of your titles
YUMPU automatically turns print PDFs into web optimized ePapers that Google loves.
4() Chapitre Troisième<br />
et pouri]ui)i ne pas admettre que c'est une pénétration f(éniale <strong>de</strong> l'esprit<br />
péripatéticien <strong>de</strong> la scolastique qui a guidé saint Thomas dans ses con-<br />
victions ?<br />
Or, il s'est rencontré sur le terrain <strong>de</strong> l'étu<strong>de</strong> d'Aristote avec un jjroupe<br />
remuant <strong>de</strong> philosophes, qui non seulement s'étaient imbus <strong>de</strong> la philoso-<br />
phie du Stagirite, mais en étaient enthousiastes jusqu'à la folie. Ceux-ci se fai-<br />
saient gloire <strong>de</strong> leur asservissement complet à Averroës, le « commentateur »<br />
d'Aristote: « Soyons les singes d'Averroës, comme Averroës fut le singe<br />
d'Aristote » disait un chef du groupe au XIV^ siècle. Cette parole <strong>de</strong> Jean<br />
<strong>de</strong> Jandun' résume le programme <strong>de</strong> l'averroïsme, et pourrait, avec non<br />
moins <strong>de</strong> justesse, s'appeler la <strong>de</strong>vise <strong>de</strong> Siger <strong>de</strong> Brabant, ce remueur<br />
d'hommes et d'idées qui se déclare ouvertement l'ennemi <strong>de</strong> saint Thomas.<br />
<strong>Le</strong> péripatétisme ressemble à une terre, riche en trésors, que plusieurs explo-<br />
rateurs parcourent en <strong>de</strong>s sens divers. Partis dans <strong>de</strong>s directions différentes,<br />
Thomas d'Aquin et Siger <strong>de</strong> Brabant se rencontrent à maintes reprises en<br />
quelque carrefour <strong>de</strong> chemins. <strong>Le</strong>ur entente sur <strong>de</strong>s questions diverses<br />
n'est pas <strong>de</strong> nature à étonner, mais il est inadmissible que le grand penseur<br />
scolastique ait emprunté ses solutions, et notamment la thèse <strong>de</strong> l'unité<br />
<strong>de</strong>s formes, àl'averroïste brabançon. Tel est cependant le sens <strong>de</strong> la curieuse<br />
insinuation contenue dans une lettre du 10 novembre 1284, <strong>de</strong> John Peck-<br />
ham, et dont plus haut déjà nous avons utilisé <strong>de</strong>s ex<strong>trait</strong>s : « Nec eam cre-<br />
dimus a religio.sis personis, sed secularibus quibu.sdam duxisse originem,<br />
cuius duo praecipui <strong>de</strong>fensores vel forsitan inventores miserabiliter dicuntur<br />
conclusisse dies suos in partibus transalpinis » * . — On verra plus loin<br />
qu'il s'agit ici d'une ruse <strong>de</strong> guerre, inventée par les antagonistes <strong>de</strong> saint<br />
Thomas.<br />
Dans la question <strong>de</strong>s formes, « Thomas tient son péripatétisme d'Aris-<br />
tote et non <strong>de</strong> ses contemporains»'. D'ailleurs, si l'activité littéraire <strong>de</strong><br />
Siger ne semble pas avoir commencé avant 1266, date <strong>de</strong> sa première appa-<br />
rition certaine dans l'histoire* , saint Thomas peut revendiquer sur Siger la<br />
priorité chronologique <strong>de</strong> la théorie <strong>de</strong> l'unité <strong>de</strong>s formes. Au <strong>de</strong>meurant, il<br />
ne faudrait pas exagérer la commune entente <strong>de</strong> l'averroïsme et du tho-<br />
' Commentaires sur la Métaphysique, (Venise, 1525), fol. 84.<br />
Ehrle, o/). cit., p. 175.<br />
" M a n d o n n e t , op. cit., p. CXXV.<br />
^ ibid., p. CXXXII.