Le trait "De unitate formae" de Gilles de Lessines ... - Boston College

60 Chapitre Ouafricine
à la trtc de ce mouvement réactionnaire suivant des degrés variables, la
plupart lies tliéolofjiens séculiers, disciples de l'ancienne scolastique ; der-
rière eux marchaient, avec plus de réserve et de dignité, les franciscains
aux(|uels se joignait tout le groupe de dominicains élevés dans les premières
traditions du XIII"" siècle.
A la question de doctrine venait s'ajouter une question de mctiiode
scientifique. Deux théologiens séculiers, Guillaume de Saint-Amour et
Nicolas de Lisieux se font les interprètes de doléances surgies de t(jutes
parts, Cjuand ils s'inscrivent en faux contre la méthode philosojjhique ou
aristotélicienne, introduite on théologie par Albert le Grand et saint Tho-
mas '. Ce ne fut donc pas sans souffrir violence que la scolastique se plia à
une réforme didactique, qui avec saint Thomas et Duns Scot devait la con-
duire à la gloire.
Enfin, outre ces discussions scientifiques, d'autres inimitiés divisaient
les groupes scolastiques d'alors. Elles dataient du jour même où, malgré
l'opposition des maîtres séculiers, les ordres mendiants avaient forcé l'entrée
des chaires de thé()k)gie. Elles s'étaient manifestées récemment encore dans
une série de pamphlets, où Guillaume de Saint-Amour et ses partisans
s'étaient laissés aller aux pires excès de langage, dans une pensée de
dénigrement systématique à l'égard de l'état religieux. Mais ici, comme de
juste, la composition des partis différait. Dominicains et Fransciscains,
oubliant toutes leurs divergences doctrinales, marchaient côte à côte; ce
\/ qui fit dire à Godefroid de Fontaine, en 128G, à propos de cette entente
des deux ordres rivaux : « Et credo cjuod ibi impleta est scriptura quae
dicit : Facti sunt amici Herodus et Pilatus ipsa die » -. Saint Thomas entra en
lice à côté de saint Bonaventure, et dirigea contre les leaders de ce catholi-
ci.sme étroit et réactionnaire deux opuscules mentionnés plus haut^
Pour se faire une idée exacte de ces divisions, et comprendre les
événements qui se rapportent à notre histoire, il convient, après le coup
d'œil rapide que nous avons jeté sur les écoles scolastiques, de considérer
un instant l'état des écoles (intiscolastiqucs*. Les environs de 1270 marquent
' V. à ce sujet M a n d o n n e t , op cit., p. XLVIII et CX.
= Dcnifle-Chatelain, Charf. Univ. Paris., t. II, p. 9. -
3 V. p. 49.
' Sur la classification des écoles médiévales en scolastiques et antiscolastiques,
A'. Hixt Pliilos. mcdiii'ale, p. 148.