Le trait "De unitate formae" de Gilles de Lessines ... - Boston College

Gilles de Lessiiics et les agitations universitaires 75
l'autre côté de la Manche, tant de coalitions étaient dirigées contre lui'?
Robert reçut-t-il du pape Jean XXI une invitation à faire une enquête
doctrinale, semblable à celle qui suscita chez Etienne Tempier un zèle si
intempestif^ ;
ou bien la simultanéité frappante des condamnations de Paris
et d'Oxford, que douze jours séparent à peine, est-elle la preuve d'une
entente entre l'évêque de Paris et l'archevêque de Cantorbéry^ ?
Cette dernière hypothèse semble bien probable, et les événements qui
suivirent presque aussitôt contribuent tous à la corroborer. En effet, l'évêque
de Paris n'attendait que l'intervention officielle de Robert Kilwardby
pour sévir à nouveau contre le thomisme. Au rapport de Peckham,
il manœuvra auprès de la curie romaine, pendant la vacance du Saint-
Siège (20 mai - 23 novembre 1277) à l'effet d'obtenir une nouvelle con-
damnation, et il fallut un ordre de sursis, émané de plusieurs cardinaux,
pour mettre un terme à cette passion combative*.
Robert Kilwardby agit par conviction et non par jalousie personnelle
vis-à-vis d'un de ses confrères en religion; l'histoire n'a pas chargé sa mémoire
de la défaveur qui s'attache à celle d'Etienne Tempier. Lui-même d'ailleurs
insiste après coup sur la différence qu'il y eut entre sa conduite et celle
de son collègue de Paris. « Je n'ai pas condamné ces doctrines, dit-il,
comme des hérésies avérées, je me suis borné à défendre qu'on les posât
en thèse dans les déterminations (determinando), dans les leçons (legendo)
ou dans d'autres exercices scolaires »^.
' Kilwardby trouva de l'appui dans son ordre même, comme le démontrent et des
déclarations expresses de J. Peckham (cum etiam nullatenus dubitemus condemnationem
praedictam de consilio plurium sapientorum ipsius ordinis processisse. Ehrl e , J. Peckhajn
etc., (Zeitschrift etc., p. 175) et les remontrances que fit le chapitre général de Milan
(Juin 1278) aux dominicains d'Oxford qui avaient dénigré la doctrine thomiste. Chartul.
Univ. Paris. 1. 1, p. 166. Le chapitre général dépêcha deux visitatores en Angleterre, char-
gés de mettre un terme à l'opposition dirigée par certains frères du couvent d'Oxford
contre le thomisme. Cf. Douais, op. cit., p. 92.
- E r h 1 e , Der Augiistinismus zi. d. Aristotelismits, etc. (.\rchiv etc., t. V, p. 612).
' M a n d o n n e t , op. cit., p. CCXLVIII, n. 7.
* Erhle, op. cit., (Archiv etc., t.V, p. 610), et lettres de Peckham. Erhle, op. cit.,
Zeitschrift, etc., p. 179).
^ « Hoc igitur paternitati vestre notilîco, quod dampnatio ibi facta non fuit talis, quo-
modo solebat esse expressarum heresum, sed fuit prohibitio in scolis determinando vel
legendo vel alias dogmatizando. > E h r 1 e , op. cit., (.^rchiv etc. t. V, p. 614).