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03 carlos castaneda le voyage a Ixtlan

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de m'allonger la tête vers l'est. Il plaça mon blouson sous ma nuque, et construisit une cage autour<br />

de moi en plantant des branches fourchues d'environ quatre-<br />

vingts centimètres de haut dans la surface tendre du<br />

sol et en disposant dessus de longs bâtons. L’ensemb<strong>le</strong><br />

évoquait un cercueil sans couverc<strong>le</strong>. Il ferma cette cage en disposant des brindil<strong>le</strong>s et du feuillage<br />

sur <strong>le</strong>s longs bâtons pour me recouvrir des épau<strong>le</strong>s aux pieds. Seu<strong>le</strong> ma tête dépassait.<br />

Puis il saisit un gros morceau de bois sec et, s'en servant pour creuser, dégagea la terre tout<br />

autour et en couvrit la cage. El<strong>le</strong> était si solide et si bien faite que la terre ne tombait pas à<br />

'l'intérieur. Je pouvais remuer mes jambes et j'aurais pu rentrer et sortir en me glissant.<br />

Don Juan me dit qu’un guerrier construisait sa cage,<br />

puis s'y glissait pour la scel<strong>le</strong>r de l’intérieur.<br />

« Mais <strong>le</strong>s animaux ? demandai-je. Ne peuvent-ils<br />

pas gratter la couche de terre, entrer dans la cage et<br />

mordre l’homme ?<br />

– Non, ça ne préoccupe absolument pas un guer-<br />

rier. Pour toi, c’est un souci parce que tu n’as pas de<br />

pouvoir. Au contraire, un guerrier est guidé par son<br />

intention inf<strong>le</strong>xib<strong>le</strong> et peut détourner n'importe quoi.<br />

Pas un rat, pas un serpent, pas un puma ne peuvent <strong>le</strong><br />

déranger.<br />

– Pourquoi s’enterre-t-il ?<br />

– Pour avoir des révélations ou emmagasiner du<br />

pouvoir. »<br />

J’éprouvai une sensation extrêmement plaisante de paix et de satisfaction. En ce moment même<br />

<strong>le</strong> monde semblait au repos. Ce calme était agréab<strong>le</strong> et en même temps énervant. Je voulus par<strong>le</strong>r<br />

mais il me fit taire. Après un certain temps la tranquillité de l'endroit agit sur mon humeur. Je me<br />

mis à penser à ma vie, à ma propre histoire ; une sensation familière de tristesse et de remords<br />

m’envahit. Je lui dis que je ne méritais pas<br />

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d'être là. Son monde était fort et juste, j’étais faib<strong>le</strong>.<br />

Mon esprit avait été gauchi par <strong>le</strong>s circonstances de<br />

ma vie.<br />

Il éclata de rire et menaça de me recouvrir entière-<br />

ment si je ne me taisais pas. Il dit que j’étais un<br />

homme, et que comme tout homme j’avais droit à tout<br />

ce qui constituait <strong>le</strong> lot des hommes : la joie, la peine,<br />

la tristesse et <strong>le</strong> combat. La nature des actes person-

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