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<strong>Contes</strong> <strong>chinois</strong><br />
heureuse de ce qu'elle venait d'entendre. Mais, n'ayant que ce fils<br />
unique, le seul qui pût devenir le soutien et l'héritier du culte de la<br />
famille, elle ne voudrait pas qu'il contractât alliance avec un revenant.<br />
— Je vous assure, répondit le joli fantôme, que je désire pour<br />
votre fils tous les bonheurs possibles. S'il courait un danger<br />
quelconque, je serais la première à le lui éviter. Mais, puisque<br />
vous avez des inquiétudes, je n'insisterai pas. Je vous<br />
demanderai seulement la permission d'être sa sœur et, par<br />
conséquent, votre fille adoptive, afin de pouvoir vous servir et<br />
de rester près de lui.<br />
Sa mère, ne pouvant plus douter de la sincérité du revenant,<br />
consentit.<br />
Siao-Tcheng, dès ce moment, s'occupait de la cuisine et prenait soin<br />
du ménage, comme si elle connaissait depuis longtemps les habitudes<br />
de la maison. Le soir, elle se retirait sans qu'on sût où elle allait. Mais<br />
chaque fois, en passant devant le cabinet de travail, elle avait une sorte<br />
d'hésitation ; elle aurait bien voulu entrer, disait-elle, mais l'étui du<br />
poignard lui faisait peur.<br />
Ning, afin de ne pas la contrarier, déplaça son étui. Depuis, Siao-<br />
Tcheng vint tous les soirs causer et faire des lectures avec son frère. Au<br />
moment de se retirer, elle avait toujours une expression de regret et de<br />
tristesse contenue.<br />
— Il faut bien que vous vous en alliez, dit Ning : ma mère<br />
aurait du chagrin, si je vous gardais la nuit, même dans une<br />
autre pièce de la maison.<br />
L'épouse de Ning mourut quinze mois après le retour de son mari,<br />
d'une paralysie contractée depuis longtemps. Siao-Tcheng sut si bien la<br />
remplacer dans les soins du ménage, que personne, dans la maison, ne<br />
s'aperçut de la mort de la pauvre femme. La mère finit par vaincre<br />
toutes ses terreurs et la garda même à coucher, dans sa chambre.<br />
Enfin Siao-Tcheng, qui n'avait jamais touché à aucun aliment,<br />
commença même à prendre quelque nourriture. Si l'on n'avait pas<br />
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