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GERMINAL Emile ZOLA - livrefrance.com

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- Ah! j'aime mieux ça, par exemple! cria Chaval soulagé.<br />

Il la rhabilla, glissa aisément la chemise, jura de la peine qu'il eut à passer la culotte,<br />

car elle ne pouvait s'aider beaucoup. Elle restait étourdie, ne <strong>com</strong>prenait pas où elle se<br />

trouvait, ni pourquoi elle était nue. Quand elle se souvint, elle fut honteuse. Comment<br />

avait-elle osé enlever tout! Et elle le questionnait: est-ce qu'on l'avait aperçue ainsi,<br />

sans un mouchoir à la taille seulement, pour se cacher Lui, qui rigolait, inventait des<br />

histoires, racontait qu'il venait de l'apporter là, au milieu de tous les camarades faisant<br />

la haie. Quelle idée aussi d'avoir écouté son conseil et de s'être mis le derrière à l'air!<br />

Ensuite, il donna sa parole que les camarades ne devaient pas même savoir si elle<br />

l'avait rond ou carré, tellement il galopait raide.<br />

- Bigre! mais je crève de froid, dit-il en se rhabillant à son tour.<br />

Jamais elle ne l'avait vu si gentil. D'ordinaire, pour une bonne parole qu'il lui disait,<br />

elle empoignait tout de suite deux sottises. Cela aurait été si bon de vivre d'accord!<br />

Une tendresse la pénétrait, dans l'alanguissement de sa fatigue. Elle lui sourit, elle<br />

murmura:<br />

- Embrasse-moi.<br />

Il l'embrassa, il se coucha près d'elle, en attendant qu'elle pût marcher.<br />

- Vois-tu, reprit-elle, tu avais tort de crier là-bas, car je n'en pouvais plus, vrai! Dans<br />

la taille encore, vous avez moins chaud; mais si tu savais <strong>com</strong>me on cuit, au fond de<br />

la voie!<br />

- Bien sûr, répondit-il, on serait mieux sous les arbres... Tu as du mal dans ce<br />

chantier, ça, je m'en doute, ma pauvre fille.<br />

Elle fut si touchée de l'entendre en convenir, qu'elle fit la vaillante.<br />

- Oh! c'est une mauvaise disposition. Puis, aujourd'hui, l'air est empoisonné... Mais tu<br />

verras, tout à l'heure, si je suis une couleuvre. Quand il faut travailler, on travaille,<br />

n'est-ce pas Moi, j'y crèverais plutôt que de lâcher.<br />

Il y eut un silence. Lui, la tenait d'un bras à la taille, en la serrant contre sa poitrine,<br />

pour l'empêcher d'attraper du mal. Elle, bien qu'elle se sentît déjà la force de<br />

retourner au chantier, s'oubliait avec délices.<br />

- Seulement, continua-t-elle très bas, je voudrais bien que tu fusses plus gentil....<br />

Oui, on est si content, quand on s'aime un peu.<br />

Et elle se mit à pleurer doucement.<br />

- Mais je t'aime, cria-t-il, puisque je t'ai prise avec moi.<br />

Elle ne répondit que d'un hochement de tête. Souvent, il y avait des hommes qui<br />

prenaient des femmes, pour les avoir, en se fichant de leur bonheur à elles. Ses<br />

larmes coulaient plus chaudes, cela la désespérait maintenant, de songer à la bonne<br />

vie qu'elle mènerait, si elle était tombée sur un autre garçon, dont elle aurait senti<br />

toujours le bras passé ainsi à sa taille. Un autre et l'image vague de cet autre se<br />

dressait dans sa grosse émotion. Mais c'était fini, elle n'avait plus que le désir de vivre<br />

jusqu'au bout avec celui-là, s'il voulait seulement ne pas la bousculer si fort.<br />

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