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psychologie de l'identité _ soi et le groupe

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114 LE SOI À L’ÉPREUVE DU GROUPE<br />

ment à c<strong>et</strong>te illusion d’un <strong>groupe</strong> personnalisé éprouvant <strong>de</strong>s sensations, <strong>de</strong>s<br />

émotions, <strong>de</strong>s sentiments à l’instar d’un individu ? Ne peut-on comprendre<br />

plutôt l’affectivité groupa<strong>le</strong> comme la réaction similaire d’individus placés<br />

dans la même situation ? Irait dans ce sens <strong>le</strong> fait aisément constatab<strong>le</strong> que<br />

tous <strong>le</strong>s participants n’éprouvent pas toujours <strong>le</strong>s mêmes sentiments <strong>et</strong> que<br />

chacun réagit aussi en fonction <strong>de</strong> son implication présente <strong>et</strong> <strong>de</strong> sa<br />

personnalité ; il est d’ail<strong>le</strong>urs fréquent que lorsqu’un participant s’exclame<br />

« <strong>le</strong> <strong>groupe</strong> est angoissé » ou « <strong>le</strong> <strong>groupe</strong> est bloqué »…, il y en ait souvent<br />

un autre pour <strong>le</strong> contredire : « Mais moi je ne suis pas angoissé du tout » ou<br />

« je ne me sens absolument pas bloqué »… ce qui montre bien à la fois<br />

qu’une émotion est ressentie comme dominante, <strong>et</strong> que certains n’y participent<br />

pas.<br />

On r<strong>et</strong>rouve ces <strong>de</strong>ux aspects dans ce témoignage d’Éva : « Presque à tout<br />

moment, je vivais <strong>le</strong>s émotions <strong>et</strong> affects en accord avec <strong>le</strong> restant du<br />

<strong>groupe</strong>. Je ne me suis sentie à l’écart du vécu général que <strong>de</strong>ux ou trois<br />

fois […] Je ressentais <strong>le</strong> <strong>groupe</strong> comme très unifié dans <strong>le</strong> sens où chaque<br />

thème élaboré correspondait à ce que je vivais à ce moment-là. C’est pour<br />

cela que toutes <strong>le</strong>s gratifications <strong>et</strong> frustrations vécues par <strong>le</strong> <strong>groupe</strong>, je <strong>le</strong>s<br />

vivais tout aussi intensément que <strong>le</strong>s autres. »<br />

Mais il ne faudrait pas non plus interpréter l’affectivité dans <strong>le</strong> <strong>groupe</strong><br />

comme la simp<strong>le</strong> addition <strong>de</strong> réactions individuel<strong>le</strong>s à un même stimulus. En<br />

eff<strong>et</strong> certains processus groupaux contribuent à l’amplification <strong>et</strong> à l’unification<br />

du vécu col<strong>le</strong>ctif : c’est <strong>le</strong> cas, par exemp<strong>le</strong>, d’une sorte <strong>de</strong> « contagion »<br />

affective, très souvent observée ; el<strong>le</strong> résulte d’une empathie élémentaire qui<br />

fait que chacun, en se m<strong>et</strong>tant « à la place » <strong>de</strong> l’autre, est amené à ressentir<br />

<strong>de</strong>s sentiments semblab<strong>le</strong>s aux siens.<br />

Joël : « J’ai vu que Gérard se troublait, il est <strong>de</strong>venu assez pâ<strong>le</strong> <strong>et</strong> sa voix<br />

tremblait ; je <strong>le</strong> sentais mal à l’aise <strong>et</strong> j’ai eu peur, un instant, qu’il ne se<br />

m<strong>et</strong>te à p<strong>le</strong>urer ; je me suis senti moi-même très mal à l’aise, car, involontairement,<br />

je m’imaginais à sa place. »<br />

Il s’agit là d’une forme passagère <strong>et</strong> minima<strong>le</strong> d’i<strong>de</strong>ntification qui se fait à<br />

partir d’une réaction commune, ou imaginée commune, face à une même<br />

situation <strong>de</strong> base (peur, compassion, honte, rire, colère, attaque, défense…) ;<br />

el<strong>le</strong> constitue une <strong>de</strong>s composantes fondamenta<strong>le</strong>s <strong>de</strong> l’affectivité groupa<strong>le</strong>.<br />

Une autre est <strong>le</strong> phénomène <strong>de</strong> « résonance fantasmatique » analysé par<br />

D. Anzieu (1975). Un <strong>de</strong>s fantasmes unificateurs <strong>de</strong> la groupalité est, selon<br />

R. Kaës, celui <strong>de</strong> la fusion, <strong>de</strong> l’incorporation <strong>de</strong> chacun dans un corps groupal,<br />

fantasmé comme corps maternel 1 . Il présente un caractère sécurisant,<br />

1. De même que l’i<strong>de</strong>ntité personnel<strong>le</strong> s’étaye sur l’enveloppe corporel<strong>le</strong> (selon la notion <strong>de</strong> « moipeau<br />

» développée par D. Anzieu, 1985), l’i<strong>de</strong>ntité groupa<strong>le</strong> requiert la fantasmatisation d’une<br />

enveloppe commune.

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