psychologie de l'identité _ soi et le groupe
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L’EXPRESSION DE SOI 205<br />
problématique dominante est alors la problématique <strong>de</strong> l’exhibitionnisme <strong>et</strong><br />
du voyeurisme ; el<strong>le</strong> se traduit <strong>le</strong> plus souvent par une défense contre ces<br />
tendances. L’expression est assimilée à un dévoi<strong>le</strong>ment, une mise à nu <strong>et</strong><br />
l’écoute à un plaisir voyeur qui est dénoncé. La prise <strong>de</strong> paro<strong>le</strong> peut susciter<br />
alors une véritab<strong>le</strong> angoisse phobique en raison <strong>de</strong> ces fantasmes sousjacents.<br />
Ghislaine, après un long si<strong>le</strong>nce du <strong>groupe</strong>, qu’el<strong>le</strong> vit à l’évi<strong>de</strong>nce très<br />
mal : « Il faut que je me j<strong>et</strong>te à l’eau, je ne supporte plus c<strong>et</strong>te situation ;<br />
mais en même temps, j’ai horrib<strong>le</strong>ment peur <strong>de</strong> par<strong>le</strong>r… d’ail<strong>le</strong>urs je<br />
tremb<strong>le</strong>… l’idée <strong>de</strong> dire ce que je ressens, c’est comme si je me m<strong>et</strong>tais à<br />
nu <strong>de</strong>vant tout <strong>le</strong> mon<strong>de</strong>, c’est affreux, c’est comme un viol ! »<br />
Par<strong>le</strong>r <strong>de</strong> <strong>soi</strong> revient alors à s’exhiber, à ouvrir son intimité au regard <strong>et</strong> la<br />
pénétration <strong>de</strong> l’autre <strong>et</strong> donc à « se livrer », à se « donner » (Christine :<br />
« Livrer mon imaginaire ne pouvait être qu’un acte d’amour, qu’un don<br />
possib<strong>le</strong> en r<strong>et</strong>our d’une extraordinaire confiance »). C<strong>et</strong>te signification<br />
éclaire l’angoisse <strong>de</strong> viol ou <strong>de</strong> castration qui peut accompagner la prise <strong>de</strong><br />
paro<strong>le</strong> <strong>et</strong> la communication.<br />
Éric commence ainsi la présentation <strong>de</strong> son observation <strong>de</strong> la séance<br />
précé<strong>de</strong>nte : « J’ai préparé un truc, mais je sais pas comment vous al<strong>le</strong>z <strong>le</strong><br />
trouver ; bon, j’ai l’impression qu’il manque p<strong>le</strong>in <strong>de</strong> choses, alors je sais<br />
pas trop… je voudrais pas que vous soyez déçus, alors j’ai un peu <strong>le</strong><br />
trac ». Ici l’investissement phallique <strong>de</strong> la paro<strong>le</strong> entraîne la peur <strong>de</strong> la<br />
castration avec comme mécanisme <strong>de</strong> défense une sorte d’autocastration<br />
préventive.<br />
© Dunod – La photocopie non autorisée est un délit.<br />
Tous ces exemp<strong>le</strong>s montrent que la façon dont chacun perçoit <strong>et</strong> exprime<br />
(en partie <strong>de</strong> manière inconsciente) son i<strong>de</strong>ntité est marquée par <strong>le</strong> mo<strong>de</strong><br />
selon <strong>le</strong>quel se sont structurées ses pulsions agressives <strong>et</strong> libidina<strong>le</strong>s dans <strong>le</strong><br />
rapport à autrui. El<strong>le</strong> reflète c<strong>et</strong>te structure pulsionnel<strong>le</strong>, <strong>le</strong>s types <strong>de</strong> relation<br />
d’obj<strong>et</strong>, <strong>le</strong>s angoisses <strong>et</strong> <strong>le</strong>s mécanismes <strong>de</strong> défense qui la caractérisent. El<strong>le</strong><br />
transparaît <strong>et</strong> se proj<strong>et</strong>te dans la paro<strong>le</strong> à laquel<strong>le</strong> <strong>le</strong> suj<strong>et</strong> s’i<strong>de</strong>ntifie dans la<br />
communication avec <strong>le</strong>s autres. Ainsi la « chair se fait verbe » ; l’i<strong>de</strong>ntité<br />
s’affirme dans l’acte <strong>de</strong> paro<strong>le</strong> auquel la situation paradoxa<strong>le</strong> <strong>de</strong> communication<br />
groupa<strong>le</strong> sert <strong>de</strong> catalyseur <strong>et</strong> <strong>de</strong> révélateur.<br />
Laurence commente après coup la prise <strong>de</strong> conscience qu’un « jeu <strong>de</strong><br />
rô<strong>le</strong>s » a favorisée chez el<strong>le</strong> : « Je ne découvre que maintenant ce qu’il<br />
m’a plus ou moins révélé. Au départ, ma réticence vis-à-vis <strong>de</strong> ce jeu est<br />
encore une fois, mais plus vio<strong>le</strong>mment, sans doute, un symbo<strong>le</strong> <strong>de</strong> la peur<br />
<strong>de</strong> me livrer (d’être livrée) en pâture, dans ce qui m’apparaît comme<br />
l’arène d’un cirque romain. Bref, je redoute en participant à c<strong>et</strong> exercice,<br />
que je sens terrib<strong>le</strong>ment révélateur, d’y “laisser ma peau” (mon<br />
i<strong>de</strong>ntité ?). »