psychologie de l'identité _ soi et le groupe
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178 LA DYNAMIQUE IDENTITAIRE<br />
Col<strong>et</strong>te : « J’avais envie <strong>de</strong> donner la meil<strong>le</strong>ure image <strong>de</strong> moi-même.<br />
Même dans la façon <strong>de</strong> m’habil<strong>le</strong>r, il était important que <strong>le</strong>s autres me perçoivent<br />
agréab<strong>le</strong>ment. »<br />
L’estime <strong>de</strong> <strong>soi</strong> est généra<strong>le</strong>ment liée à la considération d’autrui. Le<br />
be<strong>soi</strong>n <strong>de</strong> valorisation apparaît comme un be<strong>soi</strong>n narcissique fondamental,<br />
support du sentiment d’i<strong>de</strong>ntité ; à preuve qu’à l’inverse, la dévalorisation, la<br />
dépréciation <strong>de</strong> <strong>soi</strong> sont étroitement liées au sentiment <strong>de</strong> fragilité <strong>et</strong><br />
d’inconsistance i<strong>de</strong>ntitaire.<br />
Annie : « C<strong>et</strong>te expérience n’a fait que renforcer mon manque <strong>de</strong> confiance<br />
en moi ; malgré mon espoir initial, je ne suis pas arrivée à surmonter<br />
ma timidité, ma peur <strong>de</strong>s autres <strong>et</strong> à prendre ma place dans <strong>le</strong> <strong>groupe</strong><br />
[…] Je me suis quand même sentie b<strong>le</strong>ssée par <strong>le</strong>s images qu’on m’a renvoyées<br />
<strong>et</strong> qui montraient que ma présence ne comptait pas beaucoup pour<br />
<strong>le</strong>s autres […] Tout ça fait que maintenant je doute encore plus <strong>de</strong> moi. »<br />
Le souci <strong>de</strong> valorisation amène chacun à m<strong>et</strong>tre en avant <strong>le</strong>s aspects <strong>de</strong> son<br />
i<strong>de</strong>ntité qui lui semb<strong>le</strong>nt <strong>le</strong>s plus propres à susciter l’approbation, l’estime ou<br />
l’admiration ; au contraire sera dissimulé tout ce qui peut apparaître comme<br />
défaut, manque, faib<strong>le</strong>sse ou stigmate. Ces mouvements font que, dans un<br />
premier temps au moins, <strong>le</strong>s attitu<strong>de</strong>s <strong>de</strong> prestance <strong>et</strong> <strong>de</strong> para<strong>de</strong> (dans <strong>le</strong><br />
doub<strong>le</strong> sens du terme) sont fréquentes : <strong>le</strong>s participants sont tentés <strong>de</strong> présenter<br />
aux autres un « masque » relativement neutre (dans une stratégie <strong>de</strong><br />
r<strong>et</strong>rait) ou socia<strong>le</strong>ment valorisant (dans une stratégie d’affirmation) ; c’est ce<br />
qui <strong>le</strong>ur donne une impression d’artificialité souvent dénoncée.<br />
Nicolas : « Ce qui me semb<strong>le</strong> gêner <strong>le</strong>s échanges entre nous, c’est que<br />
chacun veut donner aux autres une bonne image <strong>de</strong> lui pour se faire<br />
accepter ; j’ai quelquefois l’impression que nous nous réfugions <strong>de</strong>rrière<br />
un masque <strong>de</strong> politesse, <strong>de</strong> tolérance <strong>et</strong> d’ouverture ; je pense que c’est ce<br />
que voulait dire Mathil<strong>de</strong> lorsqu’el<strong>le</strong> affirmait que la situation était complètement<br />
artificiel<strong>le</strong>. Pourquoi ne pouvons-nous pas (<strong>et</strong> je pourrais dire<br />
je !) nous montrer tels que nous sommes ? »<br />
C<strong>et</strong>te question est effectivement pertinente : ces attitu<strong>de</strong>s présupposent la<br />
conviction que, si l’on se montrait « tel qu’on est », on ne serait pas accepté<br />
<strong>et</strong> qu’on risquerait la réprobation, la condamnation ou <strong>le</strong> rej<strong>et</strong> ; c<strong>et</strong>te présupposition<br />
montre donc que c’est la dimension évaluative <strong>et</strong> normative <strong>de</strong> la<br />
personnalité qui est stimulée par la situation : on peut comprendre en eff<strong>et</strong><br />
que la peur du jugement, <strong>de</strong> la dévalorisation <strong>et</strong> <strong>de</strong> l’exclusion provoquée par<br />
<strong>le</strong> contexte groupal (comme nous l’avons vu dans <strong>le</strong> chapitre 4) entraîne, en<br />
réaction, chez <strong>le</strong>s participants une activation du surmoi <strong>et</strong> <strong>de</strong> l’idéal du moi ;<br />
ils sont donc amenés à se présenter tels qu’ils se voudraient ou à se comporter<br />
« comme il faut » plutôt que « comme ils sont » ; ainsi <strong>le</strong> « masque »<br />
manifeste l’intériorisation <strong>de</strong>s va<strong>le</strong>urs <strong>et</strong> <strong>de</strong>s normes socia<strong>le</strong>s ; il apparaît<br />
comme une forme <strong>de</strong> para<strong>de</strong>, processus défensif face aux craintes suscitées