La fabrication d'un paysage urbain à Hà-Nôi ... - Archipel - UQAM
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5.4 Modernisation du projet colonial sous les tropiques: une ouverture <strong>à</strong> l'altérité<br />
181<br />
<strong>La</strong> troisième phase de l'évolution <strong>urbain</strong>e de H<strong>à</strong>-NQi <strong>à</strong> l'époque coloniale est<br />
marquée par une forme d'ouverture vers la société locale. À la suite des premières tentatives<br />
de politiques dites « d'assimilation» de la France, qui cherche <strong>à</strong> imposer ses vues et ses<br />
valeurs sans concession, s'opère un virage vers des politiques visant davantage<br />
« d'association» avec le substrat culturel local. Demandées en France par des personnalités<br />
politiques comme Maurice Sarraut (frère ainé d'Albert), Maurice Long ou Alexandre<br />
Varenne dès les années 1910 2 °, ces politiques visent une meilleure prise en compte des<br />
besoins de la population locale pour ne plus totalement l'ignorer ni chercher obligatoirement<br />
<strong>à</strong> l'assimiler par la force au projet civilisateur. Les institutions administratives se sont<br />
renforcées en Indochine et le projet colonial demeure, mais il a besoin <strong>d'un</strong>e remise en valeur<br />
moderne et est perçu comme étant plus efficace s'i! reçoit le soutien volontaire <strong>d'un</strong>e<br />
population en accord avec la cause défendue, en particulier en séduisant l'élite intellectuelle<br />
vietnamienne. Albert Sarraut, ministre des Colonies de 1920 <strong>à</strong> 1924, prône une «politique<br />
indigène» spécifique qui se soucie <strong>d'un</strong>e meilleure prise en charge sociale et sanitaire des<br />
populations locales. Maintenant que l'administration publique joue un rôle prépondérant dans<br />
l'exploitation de la colonie, la modernisation du projet colonial et son optimisation passent<br />
aussi par une meilleure coordination du développement <strong>urbain</strong> de ses principales villes.<br />
Observant les pratiques de l'urbanisme colonial marocain prônées par Hubert<br />
Lyautey, alors résident général de France au Maroc, et par l'architecte Henri Prost (lauréat du<br />
premier grand prix de Rome en 1902), dont les plans d'aménagement (Casablanca, Fès,<br />
Marrakech, Meknès et Rabat, entre 1914 et 1922) servent de référence, le gouverneur général<br />
de l'Indochine, Maurice Long, demande en 1921 <strong>à</strong> Albert Sarraut la création <strong>d'un</strong> service<br />
central d'architecture et d'urbanisme <strong>à</strong> H<strong>à</strong>-N9i pour mieux gérer l'expansion de la ville. Ce<br />
désir politique vise <strong>à</strong> appliquer aux villes indochinoises la loi Cornudet de 1919, complétée<br />
en 1924, qui oblige en France les municipalités de plus de 10 000 habitants <strong>à</strong> se doter <strong>d'un</strong><br />
plan d'aménagement, d'embellissement et d'extension dans le but de mettre en place les<br />
bases de la planification <strong>urbain</strong>e après la fin de la Première Guerre mondiale. Cette décision<br />
20 Deux de ces députés seront nommés gouverneur général de l'Indochine: Maurice Long de 1920 <strong>à</strong><br />
1922 et Alexandre Varenne de 1925 <strong>à</strong> 1928. Avant d'occuper son poste de ministre, Albert Sarniult<br />
sera quant <strong>à</strong> lui deux fois gouverneur général (1914-1915 et 1917-1919).