La fabrication d'un paysage urbain à Hà-Nôi ... - Archipel - UQAM
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Ils se déroulent dans les quartiers nés spontanément de l'installation des migrants venus des<br />
campagnes chercher du travail dans le H<strong>à</strong>-NQi colonial qui se développe <strong>à</strong> la fin du<br />
xrx e siècle. Illégaux et d'apparence anarchiques, ces nouveaux quartiers s'établissent en<br />
périphérie de la ville, loin du regard du passant qui déambule sur les larges et beaux<br />
boulevards du quartier colonial. 11 s'agit de la « ville ordinaire », qui reste souvent insoumise<br />
et récalcitrante <strong>à</strong> toute remise en ordre. Son existence est de fait souvent reniée ou dénigrée<br />
par l'autorité dominante car stigmatisant les défauts de la ville vietnamienne par son caractère<br />
« insalubre », antinomique avec les qualités prônées par la science urbanistique coloniale.<br />
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Dans ces quartiers, l'architecture et la planification savante coloniale se confrontent <strong>à</strong><br />
une population locale pauvre et rétive <strong>à</strong> tout règlement, qui, dans un premier temps, reproduit<br />
pragmatiquement un modèle d'habitat vernaculaire d'origine rurale tout en l'adaptant aux<br />
besoins fonctionnels du moment, aux nouvelles donnes du péri<strong>urbain</strong> et aux contraintes<br />
locales du lieu d'établissement. Spontanées et vernaculaires, les architectures de ce type de<br />
quartier n'ont pas de statut d'objet inunaculé et intouchable. Au contraire, dans la ville<br />
« ordinaire» des Vietnamiens, l'objet bâti est continuellement réapproprié et travesti, selon<br />
des schèmes inconscients autour de la pratique de l'habiter qui restent inscrits dans la<br />
mémoire collective. Mais, dans le contexte colonial de l'époque, ces architectures locales ne<br />
peuvent pas échapper <strong>à</strong> la pression de l'imposition culturelle exogène que représente la<br />
science urbanistique française.<br />
L'enjeu autour de la maîtrise de ces quartiers populaires correspond pour les colons <strong>à</strong><br />
un troisième niveau d'intervention <strong>urbain</strong>e. Après avoir accaparé les anciens terrains<br />
collectifs des communautés villageoises et acheté les terrains privés nécessaires <strong>à</strong> la<br />
constitution <strong>d'un</strong> domaine municipal et <strong>à</strong> sa politique d'expansion <strong>urbain</strong>e, la conquête de la<br />
ville vietnamienne spontanée passe par le contrôle de la qualité architecturale des maisons<br />
d'habitation.<br />
Le quartier Bùi Thj Xuân fait partie de ces quartiers spontanés, se constituant aux<br />
marges méridionales de H<strong>à</strong>-NQi, au-del<strong>à</strong> du « noyau» formé par la juxtaposition des unités<br />
morphologiques de la citadelle, du quartier des « 36 rues et corporations» et de la ville<br />
coloniale européenne, cachée directement derrière la mise en scène spectaculaire du quartier<br />
colonial (Ill. 6.1). Formant une nouvelle entité <strong>urbain</strong>e d'apparence morphologique