La fabrication d'un paysage urbain à Hà-Nôi ... - Archipel - UQAM
La fabrication d'un paysage urbain à Hà-Nôi ... - Archipel - UQAM
La fabrication d'un paysage urbain à Hà-Nôi ... - Archipel - UQAM
Create successful ePaper yourself
Turn your PDF publications into a flip-book with our unique Google optimized e-Paper software.
autorisant le transfert dans d'autres lieux ou dans des édifices reconstruits <strong>à</strong> neuf, car c'est la<br />
pérennité des pratiques culturelles et sociales qui importe plus que la simple matérialité de<br />
l'objet.<br />
302<br />
<strong>La</strong> reconfiguration des pagodes de Bùi Th! Xuân durant le XX e siècle, liée aux<br />
récurrentes reconstructions, témoigne de la capacité d'adaptation des éléments traditionnels<br />
villageois dans un contexte d'urbanisation moderne. Régulièrement remises <strong>à</strong> jour jusqu'<strong>à</strong><br />
aujourd'hui, les pagodes demeurent des lieux où les cultes sont toujours très vivaces, tout en<br />
continuant <strong>à</strong> jouer leur rôle primordial de lieux de rencontres des communautés locales. Alors<br />
que l'observateur étranger peut être frappé, comme souvent dans le cas des édifices cultuels<br />
asiatiques, par l'absence d'authenticité matérielle des objets architecturaux, il appert que la<br />
pratique collectivement partagée du culte religieux constitue en elle-même cet acte de<br />
mémoire et du souvenir dans lequel s'inscrit l'ancrage identitaire de la population. Les cultes<br />
rappellent au souvenir des habitants les récits légendaires des héros vénérés. Les stèles<br />
gravées et les sentences sculptées sur les panneaux de bois suffisent <strong>à</strong> évoquer l'authenticité<br />
du lieu, dans le sens où elles permettent de « relier les détails pour en constituer le destin<br />
historique, pour donner une identité <strong>à</strong> une nation qui se reflète dans cette histoire »44. Les<br />
pagodes ne sont que le support matériel du culte <strong>d'un</strong> souvenir figuratif et identitaire qui peut<br />
se réincarner par la magie évocatrice de la pratique du culte religieux.<br />
Si le bâti « sacré» lui-même se permet de nombreuses transformations de son<br />
intégrité sans que cela ne remette en question l'identité du lieu et la ferveur des fidèles, peut<br />
être ne faut-il plus dès lors s'étonner du sort réservé au bâti «profane» ? Le « sacré» cultuel<br />
n'ayant pas besoin <strong>d'un</strong> support fixe et immuable pour exister, les modèles de l'habitat<br />
hanoien suivront-ils la même logique?<br />
Dans le temps présent, la situation architecturale et <strong>urbain</strong>e du quartier Bùi Thi Xuân<br />
apparaît dans une première vision comme chaotique. Depuis l'ouverture économique du Viet<br />
Nam en 1986, la spéculation immobilière fait rage et crée une fièvre constructive que<br />
personne ne semble arriver <strong>à</strong> gérer de manière cohérente. Dans ces quartiers historiques<br />
fortement parcellarisés, les nouvelles dynamiques en œuvre se matérialisent principalement<br />
44 Liang, 2003.