La fabrication d'un paysage urbain à Hà-Nôi ... - Archipel - UQAM
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vietnamienne n'hésite pas <strong>à</strong> démolir ses propres créations pour mieux les perpétuer. Simon<br />
Leys y voit même, dans le cas chinois, une nécessité:<br />
N'y aurait-il pas une certaine relation entre l'inépuisable gerue créateur dont la<br />
civilisation chinoise fit preuve tout au long des âges, et le phénomène périodique de<br />
table rase qui empêcha cette culture d'étouffer sous le poids des trésors accumulés<br />
par les siècles? A l'instar des individus, les civilisations ont probablement besoin<br />
elles aussi <strong>d'un</strong>e certaine marge d'oubli créateur. Un excès de souvenirs risque de<br />
résulter en une forme d'inhibition, une mémoire infaillible et totale peut constituer<br />
une malédictions.<br />
<strong>La</strong> société vietnamienne ne serait pas jusqu'<strong>à</strong> aujourd'hui dépossédée de cette<br />
capacité collective <strong>à</strong> recréer de l'<strong>urbain</strong> sur ses propres bases, car la mémoire est ici vivante.<br />
Elle relie les gestes génériques du bâtir aux actes contemporains actuels. Ainsi le quartier est<br />
plus W1 lieu de « mémoire» qu'un lieu d' « histoire» où la mémoire collective autour des<br />
gestes et des savoir-faire nous renvoie <strong>à</strong> des identités enracinées dans le temps long des<br />
établissements humains.<br />
10.2 Incompatibilité opérationnelle des valeurs occidentales du patrimoine et remise<br />
en question du système des valeurs<br />
Ce patrimoine de la ville «ordinaire» ne s'oppose pas <strong>à</strong> celui des monuments<br />
historiques, mais nous oblige <strong>à</strong> obliquer le regard et <strong>à</strong> remettre les enjeux patrimoniaux et<br />
identitaires <strong>à</strong> plat. Ce processus de réflexion n'a pas pour autant été trivial. Car la vigueur des<br />
transformations du cadre bâti observées ces dernières années questionne objectivement la<br />
qualité patrimoniale des objets considérés et, par extension, l'identité même du quartier. Le<br />
maintien <strong>d'un</strong>e relative cohérence structurelle du parcellaire sur le moyen terme n'a pas<br />
garanti l'unité formelle du <strong>paysage</strong> architectural. <strong>La</strong> recomposition des éléments bâtis qui le<br />
composent suit des processus autonomisés et est directement mise en forme par l'acteur<br />
habitant, sans contrôle administratif ni véritable concertation d'ensemble planifiée. Leurs<br />
expressions formelles se présentent comme des collages d'éléments hétérogènes sur une<br />
même parcelle où se confrontent les styles anciens et nouveaux et des gabarits d'échelle<br />
différente. Le <strong>paysage</strong> <strong>urbain</strong> qui en découle apparaît lui aussi comme chaotique, jugé parfois<br />
sévèrement par la population et remettant en cause la capacité des autorités <strong>à</strong> maîtriser, <strong>à</strong><br />
gérer et <strong>à</strong> promouvoir la qualité du développement <strong>urbain</strong> de H<strong>à</strong>-NÔi.<br />
5 Leys, 1998: 747-748.