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Émile Zola et le pessimisme schopenhauerien ... - Archipel - UQAM

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démontre éloquemment Michael Lastinger, la fiction zolienne <strong>et</strong> la pensée ni<strong>et</strong>zschéenne<br />

entrevoient (i 1faut insister sur ce mot) l'effrayant éternel r<strong>et</strong>our en tant qu'éventualité se<br />

suffisant platement à el<strong>le</strong>-même, sans autre conséquence néfaste à Jong terme, car la<br />

longue durée s'en trou ve vaporisée: « What is really important is the possibility that life<br />

iTself does not change, Ihal Ihere is no llltima<strong>le</strong> goal 10 which man can aspiré ll . » En ce<br />

139<br />

sens, Ni<strong>et</strong>zsche <strong>et</strong> avec lui <strong>Zola</strong> se trouvent à aplanir l'Histoire qui alors peut être<br />

représentée adéquatement non plus par une ligne ascendante, fuyant au loin, mais par<br />

l'Ouroboros, <strong>le</strong> serpent qui se mange la queue.<br />

C'est <strong>le</strong> temps circulaire <strong>et</strong> «lOla<strong>le</strong>menllln S9 » dont par<strong>le</strong> Mikhaïl Bakhtine. Un temps<br />

d'avant J'Histoire - productif, laborieux <strong>et</strong> fécond - qui remonte aux origines<br />

archaïques 60 Un temps profondément humain:<br />

Il se dillérencie, se mesure aux épisodes de la vie col<strong>le</strong>clive. [... ] Le temps se mesure aux<br />

épisodes d'une existence laborieuse, aux phases des travaux agrico<strong>le</strong>s dans <strong>le</strong>ur diversité.<br />

Cest au sein d'une luite col<strong>le</strong>ctive contre la nature que la conscience du temps naÎt 61 •<br />

Ainsi, Bonnevil<strong>le</strong> est <strong>le</strong> théâtre de nombreux orages, auxquels <strong>le</strong>s personnages assistent<br />

avec émotion <strong>et</strong> fascination, incapab<strong>le</strong>s de se détourner, comme devant une mise en scène<br />

nouvel<strong>le</strong> d'un drame connu. Chaque fois, la mer, affectueusement nommée « la gueuse»<br />

58 Michael Lastinger. loe. cit.. p. 72.<br />

59 Esthétique <strong>et</strong> théorie du roman, trad. de D. Olivier. préf. de M. Aucouturier. Paris, Gallimard,<br />

coll. «Bibliothèque des idées ». 1978. p. 353.<br />

60 Bakhtine inaugure la notion d'un « symbolisme réaliste à base rolklorique» pour rendre comp<strong>le</strong><br />

des Iilléralures qui empruntent au stade agraire primitir de la société humaine son temps<br />

rolklorique. Ibid.. p. 366. « La vie humaine <strong>et</strong> la nature, écrit-il. sont perçues dans <strong>le</strong>s mêmes<br />

catégories. Les saisons. <strong>le</strong>s âges. <strong>le</strong>s nuits. <strong>le</strong>s jours (<strong>et</strong> <strong>le</strong>urs subdivisions). l'accoup<strong>le</strong>ment (<strong>le</strong><br />

mariage). la grossesse. la maturité. la vieil<strong>le</strong>sse, la mort. sont des catégOiies-images qui IoU<strong>le</strong>s. el<br />

de la même manière. servent de représentation thématique à la vie humaine <strong>et</strong> à la vie de la<br />

nature »: ibid.. p. 352. Mais ce temps de facto n'avance aucunement, car son caractère cyclique<br />

limite sa force <strong>et</strong> sa productivité: Bakhtine en convielll : « Le sceau du cyc<strong>le</strong>. de la répétition<br />

cycliql<strong>le</strong>, est posé sur tous <strong>le</strong>s événements à l'intérieur de ce temps, dont la marche en avant est<br />

ainsi réfrénée. Aussi la croissance ne devient pas ici une véritab<strong>le</strong> évolution. »Ibid., p. 354.<br />

61 Ibid., p. 351. Voilà bien <strong>le</strong> mode spatio-temporel qui régit l'existence à Bonnevil<strong>le</strong>. « Son cours<br />

n'anéantit ni ne diminue la quantité des choses précieuses: il<strong>le</strong>s multiplie <strong>et</strong> <strong>le</strong>s accroît. [... ] La<br />

destruclion. la mon, sont perçues comme des semail<strong>le</strong>s. Après. ce seront <strong>le</strong>s jeunes pousses. la<br />

moisson: el<strong>le</strong>s multiplieront ce qui a été semé ». indique Bakhtine, soulignant ainsi <strong>le</strong> rô<strong>le</strong><br />

nécessaire de la croissance (au sens large) comme orientation première des errons humains. Ibid..<br />

p. 352. En erf<strong>et</strong>. sous ce «ehronotope » (nous empruntons <strong>le</strong> terme bakhtinien). l'ensemb<strong>le</strong> des<br />

marqueurs temporels (positirs ou négatifs: Iloraison. récondité. maturation: fragilité. décrépitude,<br />

mon) se ramènent il des consiùérations de croissance <strong>et</strong> d'accroissement; <strong>et</strong> ce. « pour autant que<br />

lindividualité ne S'CSl pas dégagée encore ». cc qui est <strong>le</strong> ca, des villageois de Bonnevil<strong>le</strong>.<br />

semblab<strong>le</strong>s aux membres indillërcnciés ù'une Iribu; ibid. Sur tau<strong>le</strong> cel<strong>le</strong> queslion. voir<br />

« Fondements folkloriques du chronotope rabelaisien ». chap. dans ibid.. p. 351-366.

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