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Émile Zola et le pessimisme schopenhauerien ... - Archipel - UQAM

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]62<br />

Sous c<strong>et</strong> ang<strong>le</strong>, l'agacement de la vi ei I<strong>le</strong> bonne envers sa nou vel<strong>le</strong> maîtresse signal e<br />

seu<strong>le</strong>ment ses difficultés à s'adapter <strong>et</strong> non un hypothétique (<strong>et</strong> inexplicab<strong>le</strong>) désir<br />

d'imiter <strong>le</strong>s anciennes méchanc<strong>et</strong>és d'une maîtresse dont el<strong>le</strong> a réprouvé la malhonnêt<strong>et</strong>é.<br />

Car, comme <strong>le</strong> souligne Micheline Van der Beken : « Pauline Quenu devient Je tyran de<br />

la maisonnée qui est toute sa vie dans La Joie de vivre l95 . »<br />

Il faut reconnaître d'emblée que la désuétude du personnage au sein du ménage ne<br />

suffit pas à expliquer son suicide. Sophie Spandonis montre bien que l'absence de<br />

l'ancienne maîtresse de maison - qui appelait sa servante « ma fil<strong>le</strong>» - joue un rô<strong>le</strong><br />

déterminant dans <strong>le</strong> suicide« imprévisib<strong>le</strong>» de Véronique l96 : «on note qu'au moment de<br />

l'enterrement de Mme Chanteau, Véronique par<strong>le</strong> d'une "voix étranglée", inscrivant<br />

métaphoriquement sa future pendaison dans <strong>le</strong> texte <strong>et</strong> la relation de cel<strong>le</strong>-ci avec<br />

l'événement en cours l97 . » Force est donc de placer <strong>le</strong> suicide de Véronique sous <strong>le</strong> signe<br />

d'une doub<strong>le</strong> souffrance mora<strong>le</strong>: sa propre obso<strong>le</strong>scence <strong>et</strong> sa tristesse devant la mort de<br />

Mme Chanteau, mère symbolique '98 .<br />

Au fond, <strong>le</strong> second terme de c<strong>et</strong>te doub<strong>le</strong> dou<strong>le</strong>ur peut être envisagé comme la<br />

manifestation extérieure du premier, chagrin plus profond, souterrain dirions-nous, un peu<br />

comme <strong>le</strong> discours désabusé de Lazare n'est que l'effervescence de sa peur de mourir. En<br />

conséquence, la voI<strong>le</strong>-face de Véronique vis-à-vis de Pauline <strong>et</strong> la variante qui la fait<br />

idéaliser une spoliatrice décédée sont à placer sous Je signe du caractère invivab<strong>le</strong> du<br />

régime instauré par la nouvel<strong>le</strong> maîtresse, régime totalitaire <strong>et</strong> exclusif au sens forl. De ce<br />

point de vue, la <strong>le</strong>nte exclusion de Véronique du cerc<strong>le</strong> fami liaI fait figure d'une longue<br />

agonie aussi «bavarde» que l'avait été cel<strong>le</strong> de Mme Chanteau. Et, contrairement aux<br />

crises répétées de Lazare, la dou<strong>le</strong>ur mora<strong>le</strong> de Véronique ne culmine qu'une seu<strong>le</strong> fois,<br />

avec <strong>le</strong>s conséquences fata<strong>le</strong>s qu'on connaît. Ainsi donc, Véronique, sou mise à un mal<br />

ponctuel qui sourd soudainement <strong>et</strong> finit par J'emporter, s'inscrit parmi ceux des<br />

personnages à connaître <strong>le</strong> deux ième degré de la souffrance.<br />

195 <strong>Zola</strong>: Le desso/ls des femmes. Bruxel<strong>le</strong>s, Le Cri. coll. « Essai ». 2000, p. 329.<br />

196 Voir Sophie Spandonis, dans V. Jouve el A. Pagès (dir.), op. ci/., p. 204-205. Du reste <strong>le</strong> geste<br />

drastique de la bonne n'a rien de si improbab<strong>le</strong>. commente avec justesse Spandonis : « El<strong>le</strong> a des<br />

"lubies" <strong>et</strong> des "lunes", el<strong>le</strong> est "fantasque". Cel<strong>le</strong> imprévisibilité qui penurbe <strong>le</strong>s personnages est<br />

pounant. à force d'être dite <strong>et</strong> soulignée. d'une grande prévisibilité. El<strong>le</strong> prépare. cn somme.<br />

l'imprévisib<strong>le</strong> suicide linal. » Ibid.. p. 204.<br />

197 Ibid.. p. 205.<br />

108 Clayton Alcorn.lr s'allache sUr!out à cel<strong>le</strong> dimension-là du mal de Véronique: «suffering<br />

horribh DI'er rhe loss of her beloved mis/ress (as <strong>Zola</strong> s/lffered over /he deOlh of his mO/her), /she<br />

isl finall,' ab<strong>le</strong> /0 .l'land no more. » Loc. cil.. p. 80.

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