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Émile Zola et le pessimisme schopenhauerien ... - Archipel - UQAM

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Mais puisque, pour <strong>Émi<strong>le</strong></strong> <strong>Zola</strong>, la philosophie est, nous l'avons vu, étroitement liée à la<br />

poétique romanesque, il convient de nous pencher sur la conception qu'il avait du<br />

« philosophique ». Si <strong>le</strong> processus de rédaction <strong>et</strong> de publication des vingt romans qui<br />

forment la saga des Rougon-Macquart s'étend sur un peu plus de vingt ans, de ]870 à 1893,<br />

l'idée du cyc<strong>le</strong> comme tel germe dès 1868. <strong>Zola</strong> prépare sa grande marche romanesque<br />

pendant deux années; il établit des plans, des directives <strong>et</strong> une méthode, mais il s'attache<br />

surtout à déterminer un élément capital: « Prendre avant tout une tendance philosophique,<br />

non pour J'éta<strong>le</strong>r, mais pour donner L1ne unité à mes Iivres 43 . » Il se sentait <strong>le</strong> besoin d'un<br />

code qui organiserait son œuvre, d'un système fédérateur du tout: la philosophie de son<br />

œuvre, c'était là son souci premier pendant la genèse du cyc<strong>le</strong>, cela restera. Au final, <strong>Zola</strong><br />

r<strong>et</strong>iendra comme « tendance philosophique» cel<strong>le</strong> de l'anatomiste ou, si l'on préfère, du<br />

naturaliste: « Ma grande affaire est d'être purement naturaliste, purement physiologiste 44 »,<br />

note-t-il encore en 1869.<br />

À l'ère du pOSItIVIsme, l'on déduit, à partir de faits vérifiés, <strong>le</strong>s traits généraux d'un<br />

phénomène 45 . <strong>Zola</strong> n'avait pas tort de considérer philosophique son esthétique romanesgue 46 :<br />

el<strong>le</strong> repose sur <strong>le</strong>s principes de causalité <strong>et</strong> de contingence, <strong>et</strong> sur la conviction gue <strong>le</strong> langage<br />

peut rendre <strong>le</strong> réel fidè<strong>le</strong>ment - el<strong>le</strong> repose sur la positivité de la science. De là l'ambition<br />

d'exploiter <strong>le</strong> réel (<strong>le</strong>s faits) à des fins didactiques. Dans l'artic<strong>le</strong> du Figaro de 1881<br />

susmentionné, <strong>le</strong> chef de fi<strong>le</strong> applaudit chez Céard la nudité du sty<strong>le</strong> <strong>et</strong> des fails - c'est<br />

Bovary ou L'Édllcation sentimenta<strong>le</strong>, <strong>le</strong> lyrique se déso<strong>le</strong> de la p<strong>et</strong>itesse des personnages, de la<br />

difficulté qu'il ya à faire grand avec des bonshommes ridicu<strong>le</strong>s ». <strong>Émi<strong>le</strong></strong> <strong>Zola</strong>, « Guslave Flaubert »,<br />

dans Les Romanciers naturalistes, op. cit., p. 104.<br />

43 <strong>Émi<strong>le</strong></strong> <strong>Zola</strong>, «Notes généra<strong>le</strong>s sur la nature de l' œu vre» [1869], dans É. <strong>Zola</strong>, Les ROllgon­<br />

Macqllarl, op. Cil., 1967, t. V, p. 1744.<br />

44 Idem, «Différences entre Balzac <strong>et</strong> moi », dans ibid., p. 1737.<br />

45 Tou<strong>le</strong> science posilive s'édifie sur la certitude qu'un résultaI provient exclusivement de causes<br />

imbriquées, en relation directe: «Pour qu'il y ait POSilivilé, il faut [...] pouvoir relier <strong>le</strong>s observations<br />

d'un développement: en référence à lin réel observé, opérer lin enchaÎnemenl ». Angè<strong>le</strong> Kremer­<br />

Mari<strong>et</strong>ti, Le Concept de science posilive, ses <strong>le</strong>nanls el ses aboillissanls dans <strong>le</strong>s slmC/llres<br />

al1/hropologiql<strong>le</strong>s dll posilivisme, Paris, Klincksieck, coll. «Épistémologie », 1983, p. 29.<br />

46 TI convienl pourlanl d'apporter une nuance: «Il existe dans <strong>le</strong>s ROllgon-Macqllart un système<br />

romanesque cohérent, on n'y trouvera pas l'application stric<strong>le</strong> d'un véritab<strong>le</strong> système philosophique.<br />

tout au plus 1...] une interprétation poétique d'un spinozisme latent el diffus », selon Auguste Dezalay.<br />

« J.'exigence de (otalité chez un romancier expérimental: <strong>Zola</strong> face aux philosophes <strong>et</strong> aux<br />

classificateurs », Cahiers de l'Association intemrl/iona<strong>le</strong> des élildes françaises. no 24 (mai 1972).<br />

p.174-175.<br />

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