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Émile Zola et le pessimisme schopenhauerien ... - Archipel - UQAM

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C'est la déroute du pessimiste.· La vitalité contagieuse d'Octave martè<strong>le</strong> <strong>le</strong> pauvre Paul<br />

d'observations positives <strong>et</strong> emporte toute considération contraire dans <strong>le</strong> flot r<strong>et</strong>entissant du<br />

succès:<br />

Toute la joie de l'action, toute la gai<strong>et</strong>é de ('existence sonnaient dans ses paro<strong>le</strong>s. TI répéta qu'il<br />

était de son époque. Vraiment, il fallait être mal bâti, avoir Je cerveau <strong>et</strong> <strong>le</strong>s membres attaqués,<br />

pour se refuser à la besogne, en un temps de si large travail, lorsque <strong>le</strong> sièc<strong>le</strong> ernier se j<strong>et</strong>ait à<br />

l'avenir. Et il raillait <strong>le</strong>s désespérés, <strong>le</strong>s dégoûtés, <strong>le</strong>s pessi mistes, tous ces malades de nos sciences<br />

commençantes, qui prenaient des airs p<strong>le</strong>ureurs de poètes ou des mines pincées de sceptiques, au<br />

milieu de l'immense chantier contemporain. Un joli rô<strong>le</strong>, <strong>et</strong> propre, <strong>et</strong> intelligent, que de bâil<strong>le</strong>r<br />

devant <strong>le</strong> labeur des autres 61 !<br />

Paul, sonné par la charge d'Octave, accepte <strong>le</strong> reproche <strong>et</strong> tente de <strong>le</strong> récupérer à son<br />

avantage. Dernier signe de vie d'un <strong>pessimisme</strong> mort-né, parce qu'inaudib<strong>le</strong>: « C'est mon<br />

seul plaisir de bâil<strong>le</strong>r devant <strong>le</strong>s autres, dit Vallagnosc, en souriant de son air froid 62 . » À<br />

peine s'est-il prononcé, on <strong>le</strong> gourmande comme un vieillard gâteux <strong>et</strong> têtu: « Ah' ce vieux<br />

Paul, toujours <strong>le</strong> même, toujours paradoxal'... Hein? nous ne nous r<strong>et</strong>rouvons pas pour nous<br />

querel<strong>le</strong>r 63 . »L'antagonisme est balayé d'un trait.<br />

L'un crie, l'autre bail<strong>le</strong>. Et, bientôt, la machine moderne, <strong>le</strong> positivisme en marche, <strong>et</strong> tout<br />

<strong>le</strong> peup<strong>le</strong> des clientes du grand magasin s'embal<strong>le</strong>ront à nouveau dans <strong>le</strong> tapage assourdissant<br />

qui monopolise l'al<strong>le</strong>ntion des convives. Ainsi, Mour<strong>et</strong> tâchant de se faire conciliant, ne peut<br />

s'empêcher de convier son ami aristocrate à emboîter <strong>le</strong> pas de la modernité: « Chacun a ses<br />

64<br />

idées, heureusement. Mais il faudra que je te montre ma machine en bran<strong>le</strong>, tu verras ». Le<br />

génie de <strong>Zola</strong> dans cel<strong>le</strong> scène consiste à montrer que <strong>le</strong>s deux camarades, jadis au coude à<br />

coude, ne sont plus l'image d'eux-mêmes: Paul n'est plus l'ombre de lui-même ni de sa<br />

« qualité »; Octave au contraire rayonne de mil<strong>le</strong> feux vivaces.<br />

La « thèse» qu'on ne veut pas « faire sentir », qu'on veut seu<strong>le</strong>ment « mellre », s'articu<strong>le</strong><br />

ici autour de deux truchements corollaires: l'audib<strong>le</strong> <strong>et</strong> <strong>le</strong> visib<strong>le</strong>, qui évitent d'entrer dans un<br />

l'interrogation de Vallagnosc el la réponse de Mour<strong>et</strong>: « Tu t'amuses?» lui demande-t-il, <strong>et</strong> l'autre de<br />

rétorquer « Sans doute, jamais je n'ai tant vécu ... Ah 1 mon vieux, ne te moque pas, ce sont <strong>le</strong>s heures<br />

<strong>le</strong>s plus courtes, cel<strong>le</strong>s où l'on meurt de souffrance! [...] Je suis brisé, je n'en peux plus; n'importe, lu<br />

ne saurais croire combien j'aime la vie! » Ibid.. p. 696.<br />

(>1 Ibid., p. 451-452.<br />

(>2 Ibid., p. 452<br />

(>J Ibid.<br />

(>-1 Ibid., p. 452.<br />

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