Projet de recherche sur le paiement forfaitaire compensatoire : le ...

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Chapitre 3
Les bénéficiaires interrogés n’étaient pas tous convaincus que les PF avaient pour conséquence inévitable
la généralisation de l’alcoolisme et de la toxicomanie, mais certains connaissaient seulement quelques
Survivants n’ayant pas sombré dans ce genre d’abus après avoir été indemnisés. L’un des bénéficiaires a
ainsi expliqué pourquoi certaines personnes ont tendance à faire un mauvais usage de leurs ressources
financières : [traduction] « Pour moi, 30 000 dollars, ce n’est rien. Ça l’est pour ce que les autres font
d’une telle somme, mais pas en termes de pouvoir d’achat. Ce n’est pas assez pour acheter un camion qui
coûte 40 000 $, par exemple, mais, pour un alcoolique, ça représente beaucoup de beuveries. »
Un conseiller ayant travaillé auprès de Survivants a relaté l’anecdote suivante : [traduction] « Lorsque
je demande aux gens le moment où ça va mieux pour eux, ils me répondent que c’est quand ils n’ont plus
d’argent. » Certains conseillers affirment d’ailleurs qu’il suffit de regarder comment les Autochtones utilisent
leurs allocations sociales ou leur crédit d’impôt pour enfants, pour avoir une idée des conséquences des PF :
[traduction] « Les gens se soûlent à la maison. Les enfants sont laissés à eux-mêmes et nous devons les
retirer de leur famille. »
On observe une recrudescence d’alcoolisme et d’abus sexuels à la suite de rentrées d’argent, ont souligné
les non-bénéficiaires. Ils craignent que les PF n’aient de telles répercussions. [traduction] « Il y a un
revendeur de drogue tous les cinquante mètres dans cette réserve », a fait savoir l’un des participants au
sondage. Un agent des forces de l’ordre locales a cependant tenu à préciser qu’on ne pouvait statistiquement
pas établir de lien direct entre les paiements forfaitaires et la multiplication des appels reçus par la police.
Dangers menaçant les enfants des bénéficiaires
Les non-bénéficiaires ont expliqué que les PF entraînent des risques particuliers pour les enfants des familles
indemnisées : [traduction] « Les nouveaux paiements vont empirer les choses. 80 pour cent des cas dont
je m’occupe concernent des enfants qui ont eu des problèmes [à cause des paiements forfaitaires]. » Un autre
conseiller a décrit le cas d’une famille indemnisée :
[traduction] Nous avons dû placer un jeune de 14 ans. Son père avait acheté des meubles
et une Thunderbird 1964. Sa voiture a brûlé dans sa cour et tous les biens matériels qu’il
avait achetés sont partis en fumée en l’espace d’un an. L’enfant a maintenant dix-sept ans et
il doit demander de l’argent pour acheter du pain et du papier hygiénique.
Les non-bénéficiaires ont également évoqué les cas de bébés drogués de mères toxicomanes et de très jeunes
consommateurs de drogues dans les familles bénéficiaires de PF. Ils ont aussi exprimé leur inquiétude
concernant la multiplication des risques de violence, d’inceste et d’abus sexuels.
Émotions et angoisse provoquées par les paiements forfaitaires
Lorsqu’ils ont reçu leur indemnité, de nombreux bénéficiaires ont senti ressurgir des souvenirs de pensionnat
et ils ont été en proie à de fortes émotions. Ils ont vite perdu tout espoir que l’indemnisation leur permettrait
de tirer un trait sur le passé. De fait, ce sont les versements qui ont ravivé de tels souvenirs. Cela a été si
éprouvant pour certains que l’idée du suicide leur a traversé l’esprit, tandis que d’autres se sont demandés
quelle était finalement la raison de cette indemnisation. L’un des non-bénéficiaires a décrit la manière dont
les versements pouvaient susciter un sentiment de culpabilité et de honte chez les Survivants :