Actes de la Conférence des Nations Unies sur le commerce ... - unctad

134 Annexes
Ce sont là des questions éminemment humaines et
morales, et elles doivent être examinées dans toutes leurs
dimensions.
L'une de ces dimensions est naturellement la rémunération
de la tâche réellement accomplie par chaque individu.
Mais ce n'est pas la seule. Il importe de tenir compte du
droit de chaque peuple à utiliser les biens qui sont
directement confiés à sa gestion, et dont l'utilisation
raisonnable et réfléchie conditionne son libre développement.
De plus, comme le travail concerne des êtres
humains, leur rémunération doit leur permettre de vivre
comme il sied à des êtres humains, pour faire face à toutes
les tâches qui leur incombent, à tous les besoins de
l'existence, à commencer par le besoin de créer, par
l'emploi, la possibilité même de travailler. En outre, les
individus et les peuples sont solidaires : leur rémunération
devrait traduire cette solidarité, dans un même pays et entre
les pays, et elle doit représenter une participation équitable
aux richesses matérielles et culturelles qui sont produites à
un stade déterminé de l'histoire humaine et qui ont
toujours une destination universelle.
Il est nécessaire de tenir compte concrètement de toutes
ces exigences sans exception dans les processus contractuels
qui visent à déterminer le montant du juste prix. On ne
peut pour ces processus s'en remettre aux forces du marché,
qui en fait ne sont jamais naturelles et sont toujours créées
par l'homme, ni à l'influence dominante de petits groupes
ou à celle du nombre. Tout contrat est une affaire humaine,
conduite par des hommes et destinée à servir les hommes.
Alors, seulement, les forces du marché, mises en place et
périodiquement modifiées et diversifiées, pourront jouer
leur rôle bénéfique, car elles fonctionneront sous la
responsabilité d'individus et de peuples qui sont libres,
égaux et liés par la solidarité, et elles seront régularisées par
des normes morales liant tout un chacun.
Une saine compétition de cette sorte est à son tour
conditionnée par "une redistribution plus large et plus
immédiate des richesses et de leur contrôle" (Redemptor
Hominis, 16). C'est donc dans cette perspective qu'il faut
clarifier et résoudre le douloureux problème des dettes qui
pèsent sur les pays pauvres, le problème des fonds communs,
le problème d'un cadre institutionnel plus adéquat et
plus efficace pour la solidarité mondiale.
La destination universelle des biens s'effectue en partie
par des affectations judicieuses et par des échanges; mais
elle exige aussi des institutions exprimant plus immédiatement
la solidarité et la mise en commun. Ce qui existe
encore, souvent de façon exemplaire, dans l'hospitalité et
l'aide mutuelle pratiquées par les peuples les moins avancés,
ce qui a été réinstauré ailleurs par le truchement des budgets
nationaux et des régimes de sécurité sociale — autrement dit
la volonté de mettre de côté une partie importante de la
richesse pour la mettre directement au service d'usages et de
besoins communs, en dehors de toute logique de compétition
et d'échange -, tout cela doit semblablement trouver
sa place dans le développement de la communauté humaine
mondiale. La Conférence de Manille doit être l'occasion
d'explorer et d'encourager, avec réalisme et générosité,
toutes les possibilités qui s'offrent maintenant d'avancer sur
cette voie, dans l'ordre de la production comme dans celui
de la distribution.
J'exprime sincèrement l'espoir, monsieur le Secrétaire
général, que cette cinquième session de la Conférence des
Nations Unies sur le commerce et le développement, que
vous avez préparée avec tant de soin et de largeur de vues,
produira les fermes décisions que les peuples défavorisés et
en fait toute l'humanité attendent. Puissent à cette réunion
exceptionnelle de nouvelles idées germer, mûrir et se
répandre, et ces idées permettre de définir une nouvelle
stratégie à long terme, capable d'arrêter un développement
gigantesque de la situation décrite dans la parabole biblique
du riche bon vivant et du pauvre Lazare (cf. Redemptor
Hominis, 16). Puisse cette réunion exceptionnelle réussir à
éliminer une situation qui est aujourd'hui la honte de
l'humanité et qui est lourde de menaces pour l'avenir, et
infuser ainsi un nouvel espoir chez d'innombrables êtres
humains.
Je prie Dieu, notre père à tous, de bénir la Conférence de
Manille.
Message de M. A. N. Kossyguine,
président du Conseil des ministres
de l'Union des Républiques socialistes soviétiquesh
Au nom du Gouvernement de l'Union des Républiques
socialistes soviétiques et en mon nom propre, permettezmoi
de souhaiter la bienvenue à tous les participants à la
cinquième session de la Conférence des Nations Unies sur le
commerce et le développement.
La période qui s'est écoulée depuis la quatrième session
de la Conférence a été marquée par une lutte sans relâche
pour la paix, contre l'oppression colonialiste et néocolonialiste
et pour la cessation de la course aux armements
et le désarmement véritable, la poursuite de la détente, la
liberté et le progrès social. La restructuration des relations
économiques internationales sur une base équitable et
démocratique, qui est l'une des principales tâches dont
s'occupe la CNUCED, est étroitement liée à la recherche des
solutions à apporter à ces problèmes urgents du monde
contemporain.
La cinquième session de la Conférence est appelée à
donner une réponse à de nombreuses questions posées par
le développement actuel du commerce mondial et des
relations économiques internationales. La crise qui a frappé
l'économie capitaliste dans les années 70 a donné naissance
à des tendances qui ne répondent pas à la nécessité de
normaliser les relations commerciales et économiques internationales,
et vont à rencontre des efforts accomplis par les
pays devenus libres pour consolider leur indépendance
économique, affirmer leur souveraineté sur leurs ressources
nationales et accélérer leur développement économique.
Devant cette situation, il convient de redoubler d'efforts
dans la lutte pour la restructuration des relations économiques
internationales sur une base équitable et démocratique,
ce qui permettrait d'accélérer le développement des
pays devenus libres, d'assurer le progrès de l'humanité tout
entière et d'instaurer un nouvel ordre économique international
fondé sur le respect de la souveraineté nationale et
sur les principes de l'égalité et de l'avantage mutuel.
Les initiatives constructives prises dans ce sens par les
pays en développement, notamment à la présente session de
h Message distribué à la Conférence sous la cote TD/L.144.