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Les défis de l'agriculture mondiale - Vintage

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Biotechnologies, progrès<br />

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(celui qui ne voit pas plus loin que le bout <strong>de</strong> son nez), <strong>de</strong> doter ces êtres afin qu’ils<br />

puissent survivre. Epiméthée, qui est le moins intelligent, se met donc le<br />

premier au travail – les plus malins savent toujours se dérober, c’est bien<br />

connu –. Il est besogneux mais sérieux. Pour doter les bêtes du septentrion,<br />

Epiméthée leur confère une fourrure épaisse afin <strong>de</strong> les protéger <strong>de</strong>s morsures<br />

du froid. Pour qu’un équilibre persiste entre les proies et les prédateurs, il fait en<br />

sorte que les premières soient un peu plus rapi<strong>de</strong>s à la course et se reproduisent<br />

un peu plus vite que les seconds. Sinon, il n’y aurait point <strong>de</strong> durabilité, les<br />

antilopes étant bien vite éliminées par les lions. Il fait si bien que lorsqu’il en<br />

arrive à l’homme, il a tout épuisé ce qu’il avait dans sa hotte. Et l’homme est là<br />

tout nu qu’il va falloir expulser du cœur <strong>de</strong> la terre pour l’exposer à sa surface.<br />

Ses chances <strong>de</strong> survie sont nulles face à <strong>de</strong>s quantités <strong>de</strong> bêtes sauvages bien<br />

mieux armées que lui. C’est un désastre. Prométhée arrive, voit ça et son sang<br />

ne fait qu’un tour. Il se promet <strong>de</strong> sauver l’homme. La nuit suivante, il monte<br />

au sommet <strong>de</strong> l’Olympe où il a repéré la grotte profon<strong>de</strong> où Zeus entrepose<br />

les éclairs et la foudre. Il y dérobe une étincelle. Afin <strong>de</strong> ne pas se faire repérer<br />

en re<strong>de</strong>scendant <strong>de</strong> la montagne, il l’utilise pour amorcer la combustion lente<br />

<strong>de</strong> la moelle <strong>de</strong> sureau, sans aucune incan<strong>de</strong>scence détectable. <strong>Les</strong> Dieux ne le<br />

repèrent pas et il fait don du feu aux hommes. Ceux-ci possè<strong>de</strong>nt désormais<br />

la technique, la science. Ils savent forger les outils. Vont-ils survivre ? Et bien<br />

non, car malgré leurs armes, leurs techniques, ils sont incapables <strong>de</strong> s’accor<strong>de</strong>r.<br />

Quand trois <strong>de</strong> ces hommes se retrouvent ensembles, <strong>de</strong>ux se liguent entre eux<br />

pour tuer le troisième. Ensuite, les <strong>de</strong>ux qui restent finissent par se chamailler<br />

et s’entretuer. Jamais ils ne se mettent d’accord pour se défendre contre les<br />

tigres ou les rhinocéros mieux dotés qu’eux pour le combat. Or les projets <strong>de</strong><br />

Zeus incluent la présence <strong>de</strong> l’homme à la surface du globe, et il ne souhaite<br />

ainsi pas voir l’homme disparaître si rapi<strong>de</strong>ment. Alors le Dieu <strong>de</strong>s dieux<br />

charge son messager Hermès d’aller leur porter ce qui leur manque pour<br />

vivre. Que peut-il bien leur manquer, eux qui ont déjà la science ? Deux mots<br />

grecs : diké et aïdos que l’on va traduire par la pru<strong>de</strong>nce et la sagesse, la justice<br />

et l’esprit <strong>de</strong> solidarité. « Dieu <strong>de</strong>s Dieux », dit Hermès, « à qui dois-je les apporter ?<br />

Quand tu m’as <strong>de</strong>mandé <strong>de</strong> transmettre les sciences agricoles, c’est aux agriculteurs que je les<br />

ai apportées, et la science <strong>de</strong> construire <strong>de</strong>s maisons, je l’ai donnée aux architectes, la science<br />

<strong>de</strong> guérir aux mé<strong>de</strong>cins ». Zeus répond à son messager ailé : « A tous les hommes<br />

naturellement. Car si tous les citoyens n’ont pas accès à l’esprit <strong>de</strong> justice et à la sagesse, il n’y<br />

a pas <strong>de</strong> cité possible sur terre ». Ce que veut signifier Protagoras, c’est que pour<br />

survivre l’homme a besoin <strong>de</strong> la science, <strong>de</strong> la technique, bien sûr, mais que<br />

cela ne saurait suffire. Il lui faut <strong>de</strong> plus s’engager dans une autre démarche <strong>de</strong><br />

l’esprit qui reste irréductible à la recherche du vrai : la quête du bien, le sens<br />

<strong>de</strong> la justice. Cette discussion perdure encore dix-neuf siècles après Platon, et<br />

même <strong>de</strong> nos jours.<br />

<strong>Les</strong> <strong>défis</strong> <strong>de</strong> l’agriculture au XXI e siècle - Leçons inaugurales du Groupe ESA

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