Les défis de l'agriculture mondiale - Vintage

242
Les défis de l’agriculture mondiale
non reconnue, ce qui serait choquant pour la morale. En revanche aujourd’hui,
les externalités négatives provoquées par certains types d’agriculture étant
connus, il est légitime que les exportations agricoles s’adaptent à la nouvelle
situation, et que par la négociation, les coûts d’adaptation soient en partie pris
en charge par la société.
Les efforts à consentir au-delà du niveau des exploitations
Outre ce qui peut être fait directement par les producteurs dans leurs
parcelles et leurs exploitations, la constitution d’infrastructures écologiques et
de ce que l’on appelle une « trame verte » met en jeu des techniques et des
réalisations sans doute plus coûteuses. Par exemple : le traitement hydraulique
des bassins versants (haies, fossés, aménagements des rives, bandes enherbées et
plantées, plantations, etc.), traitement des différents types d’érosion, prévention
des incendies, aménagements pour la biodiversité, esthétique paysagère, etc. Tout
cela suppose un grand nombre de travaux dont on peut supposer a priori que
le coût pourrait être équivalent ou supérieur à celui du remembrement dans le
passé. S’agissant d’investissements destinés à produire des biens publics, c’est-àdire
des biens produisant des effets à caractère d’intérêt général pour la société, il
est légitime que le financement soit pris en compte par les collectivités publiques.
Après une phase d’investissement, le nouveau capital ainsi constitué devra être
entretenu, et cet entretien que les agriculteurs sont bien placés pour pouvoir
effectuer, devrait de la même façon être financé sur des financements publics
pour la partie correspondant à la fourniture de services d’intérêt général.
La distinction entre premier et second pilier
n’est plus réellement opérationnelle
Dès lors que le premier pilier finance l’agriculture sous des conditions
agro-environnementales aux effets significatifs, et que le deuxième pilier serait
consacré en grande partie à adapter l’agriculture à une gestion environnementalement
encore plus vertueuse, on peut se demander s’il est nécessaire de maintenir
deux piliers, ou à tout le moins, s’il ne faut pas généraliser la modulation et la
souplesse dans la répartition du financement entre les deux piliers. Il pourrait
en effet y avoir des périodes pendant lesquelles il faudrait financer fortement
les revenus agricoles en raison de prix momentanément bas et donc renoncer
momentanément à financer des infrastructures écologiques, et d’autres périodes
– qu’il faut souhaiter beaucoup plus fréquentes – pendant lesquelles il n’y aurait
pas besoin de financer des compléments de revenus, l’essentiel de la dépense
étant réservé aux coûts de transition et de constitution des infrastructures
écologiques.
Les défis de l’agriculture au XXI e siècle - Leçons inaugurales du Groupe ESA