Les défis de l'agriculture mondiale - Vintage
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Biotechnologies, progrès<br />
165<br />
L’homme est un animal savant et rien ne peut légitimer qu’on lui interdise <strong>de</strong><br />
s’aventurer dans tel ou tel champ du savoir.<br />
Par ailleurs, la plupart <strong>de</strong>s débats dont dépend l’avenir <strong>de</strong> nos sociétés, celui<br />
<strong>de</strong> nos enfants, ont <strong>de</strong>s implications scientifiques et techniques : les plantes<br />
transgéniques, le clonage, l’énergie, le nucléaire, l’évolution <strong>de</strong> la circulation<br />
automobile en apportent quelques exemples. C’est vraiment là que rési<strong>de</strong>nt les<br />
clés du futur. En tant que citoyen d’une démocratie mo<strong>de</strong>rne, chacun d’entre<br />
nous espère pouvoir dire ce qu’il ressent, ce qu’il considère être souhaitable. Mais<br />
pour se prononcer démocratiquement sur ces questions, il faut préalablement<br />
avoir été informé. Pour l’être, il est nécessaire d’avoir accès à la connaissance <strong>de</strong>s<br />
enjeux <strong>de</strong>s questions posées. Le savoir et sa diffusion constituent non seulement<br />
une liberté mais sont aussi le moyen indispensable d’expression d’une liberté<br />
démocratique. Il n’existe pas <strong>de</strong> démocratie dans un pays mo<strong>de</strong>rne, dans une<br />
société mo<strong>de</strong>rne, sans circulation flui<strong>de</strong> <strong>de</strong>s savoirs au sein <strong>de</strong>s populations. Si<br />
on renonce à un tel accès à l’information nécessaire, à l’exercice d’un libre arbitre,<br />
on se résout à ce que les décisions soient prises non par les citoyens mais par les<br />
techniciens (la technocratie) ou par les puissances économiques (l’oligarchie).<br />
Si nous plaçons nos espoirs en une démocratie vivante accompagnant le<br />
développement <strong>de</strong>s nations mo<strong>de</strong>rnes, il faut préserver la capacité <strong>de</strong>s citoyens <strong>de</strong><br />
s’informer, y compris sur les questions à dimension scientifique et technique.<br />
<strong>Les</strong> savoirs peuvent certes aboutir au développement <strong>de</strong> nouveaux savoirfaire<br />
; cela n’en constitue cependant pas le seul but. Contrairement à ce qui est<br />
souvent avancé <strong>de</strong> nos jours, l’objectif <strong>de</strong> la science est d’abord <strong>de</strong> comprendre et<br />
<strong>de</strong> connaître. Il n’empêche que la connaissance est aussi la condition du développement<br />
technique et d’une maîtrise accrue dans tous les domaines (agricoles,<br />
biologiques, techniques <strong>de</strong> la communication, etc.).<br />
Bien entendu, ces outils-là sont très précieux pour venir en ai<strong>de</strong> à ceux qui en<br />
ont besoin : pensons aux perspectives <strong>de</strong> solidarité qu’offrent l’amélioration <strong>de</strong><br />
la production agricole, <strong>de</strong> la thérapeutique, <strong>de</strong> la vaccination, etc.<br />
Au total, je ne renie pas les espoirs investis dans le développement <strong>de</strong>s sciences<br />
et <strong>de</strong>s techniques. A une condition, cependant : qu’on les replace, ainsi que les<br />
richesses qu’elles ont permis aux pays développés d’accumuler, dans leur position<br />
réelle. Elles doivent <strong>de</strong>meurer <strong>de</strong>s moyens comme elles l’étaient dans l’esprit <strong>de</strong>s pères<br />
du Progrès. Pour le libéralisme du 18e siècle, le système <strong>de</strong> la libre compétition <strong>de</strong>s<br />
entreprises est le moyen pour l’homme <strong>de</strong> parvenir à une prospérité, qui constitue<br />
un outil essentiel à la quête du bonheur. Pour les progressistes originels, les sciences<br />
et les techniques sont les moyens d’œuvrer pour le bonheur <strong>de</strong> l’homme.<br />
Dans les <strong>de</strong>rnières décennies, et cela s’aggrave peu à peu, on a vu s’installer<br />
une inversion radicale <strong>de</strong> l’ordre <strong>de</strong>s fins et <strong>de</strong>s moyens. Tout se passe dans<br />
<strong>Les</strong> <strong>défis</strong> <strong>de</strong> l’agriculture au XXI e siècle - Leçons inaugurales du Groupe ESA