Les défis de l'agriculture mondiale - Vintage

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Les défis de l’agriculture mondiale
céréales. Cette situation ne pourra que s’aggraver. Il faut également citer le cas de
l’Amérique Centrale qui devient de plus en plus structurellement déficitaire.
En Amérique latine, tout au contraire, la situation est inverse. La population
apparaît comme très réduite par rapport à l’immensité de l’espace et des
ressources naturelles disponibles. À l’échelle de l’histoire, on peut dire que ce
continent est encore en voie de colonisation. Il dispose par ailleurs d’avantages
comparatifs considérables pour les marchés mondiaux agricoles du futur : outre
un espace productif immense, il dispose d’un climat favorable, de très grandes
exploitations, d’une main-d’oeuvre à coûts réduits (sous-payée), de capitaux
disponibles en relative abondance, d’entrepreneurs avertis ayant recours à des
techniques modernes. Tout désigne l’Amérique latine, en particulier le Brésil,
comme étant un grand exportateur de produits agricoles vers l’Asie dans les
décennies qui viennent, ce qu’il est déjà.
Outre l’Amérique latine, d’autres régions peuvent prétendre exporter vers les
grandes régions importatrices. Tout d’abord les pays de grandes exploitations
extensives comme le Canada et l’Australie. Mais leurs réserves en terres, dans
l’hypothèse où le changement climatique se déclarerait lentement, et leur capacité
d’accroissement des rendements sont à moyen terme limitées. Les grandes plaines
des États-Unis disposent aussi d’avantages compétitifs, mais moins importants :
les exploitations y sont grandes et très productives, les capitaux et les politiques
d’appui sont disponibles, mais les rendements – comparés à l’Europe – restent
limités car tout accroissement augmenterait les coûts de façon importante. Il en
est de même, mais de manière encore plus accentuée, pour les grandes plaines
européennes. En revanche, l’Ukraine et les vastes plaines russes pourraient créer
à moyen terme la surprise grâce à l’immensité de l’espace disponible, aux marges
de progrès possibles (les rendements sont encore faibles), et aux capacités
managériales qui finiront bien, avec le temps, par s’améliorer.
Tout cela nous définit un paysage futur où le marché mondial des
produits agricoles et alimentaires prendra de l’importance, principalement par le
très fort développement d’un courant d’exportations d’aliments de l’Amérique du
Sud vers l’Asie, et sans doute aussi par des exportations de céréales provenant des
exportateurs traditionnels vers l’Asie et l’Afrique du Nord et le Moyen-Orient.
Quant à l’Afrique, sa situation est particulière, elle dispose encore de réserves
foncières importantes lui permettant de faire face à un accroissement rapide
de ses besoins mais au prix de grandes migrations pour occuper l’espace faute
de pouvoir accroître rapidement les rendements en raison d’un accès limité au
progrès technique.
Comme on l’a vu, le changement climatique pourrait modifier considérablement
la donne du marché mondial, peut-être dès le milieu du siècle.
Les défis de l’agriculture au XXI e siècle - Leçons inaugurales du Groupe ESA