Les défis de l'agriculture mondiale - Vintage
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Des agricultures écologiquement intensives<br />
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Mais pour satisfaire les besoins <strong>de</strong>s sociétés, ces ren<strong>de</strong>ments doivent être élevés,<br />
tout en maintenant fonctionnelles et viables les différentes fonctionnalités<br />
<strong>de</strong> l’écosystème, sans recourir au forçage par <strong>de</strong>s intrants artificiels, mais en<br />
ne s’interdisant pas leur usage subsidiaire lorsque celui-ci est compatible. Par<br />
exemple, en ne renonçant pas aux insectici<strong>de</strong>s dans les situations où le contrôle<br />
biologique a échoué.<br />
Qu’appelle-t-on fonctionnalités ?<br />
Une fonctionnalité d’un écosystème est un processus écologique i<strong>de</strong>ntifié par<br />
l’usage qu’on en perçoit. Par exemple la fertilité du sol, ou la capacité d’autorégulation<br />
du parasitisme. Ces fonctionnalités peuvent fonctionner <strong>de</strong> manière<br />
dégradée (par exemple lors <strong>de</strong> la disparition d’insectes auxiliaires utiles à la<br />
défense <strong>de</strong>s cultures), ou <strong>de</strong> manière « aggradée » 83 (par exemple en mettant en<br />
place les habitats pour les mêmes auxiliaires). Parmi ces fonctionnalité, certaines<br />
sont <strong>de</strong>s macro fonctionnalités. Par exemple, la fertilité naturelle : tout dans la<br />
production <strong>de</strong> biomasse vient <strong>de</strong> l’énergie solaire ; intensifier écologiquement<br />
la fertilité, c’est donc utiliser le plus possible l’énergie solaire et maximiser la<br />
photosynthèse, en faisant en sorte qu’à tout moment <strong>de</strong> la durée potentielle d’un<br />
cycle végétatif le sol soit recouvert par <strong>de</strong> la végétation, laquelle, par décomposition,<br />
humification et minéralisation va contribuer à la fertilité naturelle du<br />
sol. Autre exemple <strong>de</strong> macro fonctionnalité, celui <strong>de</strong> la biodiversité : Dans les<br />
écosystèmes, l’innovation biologique explore par mutation permanente et <strong>de</strong><br />
manière foisonnante l’espace <strong>de</strong> liberté qui lui est limité par les contraintes<br />
locales propres au système. Chaque écosystème local génère donc sa propre<br />
biodiversité qui s’exprime dans les gènes <strong>de</strong> chaque espèce présente et même <strong>de</strong><br />
chaque individu. Une « innovation » locale dans le génome peut donc être utile<br />
pour <strong>de</strong>venir une innovation durable si on la transpose dans d’autres lieux. Cette<br />
diversité constitue une garantie <strong>de</strong> survie à long terme <strong>de</strong>s écosystèmes. Elle est<br />
par ailleurs une garantie <strong>de</strong> productivité naturelle.<br />
Toute technique productive, et par extension tout itinéraire technique, peut<br />
donc modifier une fonctionnalité <strong>de</strong> manière négative ou positive. Elle peut<br />
donc dégra<strong>de</strong>r ou « aggra<strong>de</strong>r » le système. Dès lors que l’on veut une agriculture<br />
hautement productive et à haute valeur environnementale, il faut donc que tout<br />
acte <strong>de</strong> production puisse être référencé à la fois par rapport à <strong>de</strong>s objectifs <strong>de</strong><br />
production classique, et par rapport aux aménités (aggradations) qu’il peut amener.<br />
Sachant que le nombre <strong>de</strong> techniques <strong>de</strong> production possibles est très élevé, et<br />
qu’il y a une quinzaine d’objectifs <strong>de</strong> qualité environnementale à poursuivre, on<br />
imagine facilement qu’une agriculture à haute valeur environnementale va induire<br />
<strong>de</strong>s raisonnements complexes en matière <strong>de</strong> choix techniques.<br />
83 J’emprunte ce terme « aggradation » au professeur Lemieux (Université Laval au Québec) qui définit ce processus comme un<br />
processus inverse à celui <strong>de</strong> la dégradation d’un système.<br />
<strong>Les</strong> <strong>défis</strong> <strong>de</strong> l’agriculture au XXI e siècle - Leçons inaugurales du Groupe ESA