Nr. 4 (33) anul IX / octombrie-decembrie 2011 - ROMDIDAC
Nr. 4 (33) anul IX / octombrie-decembrie 2011 - ROMDIDAC
Nr. 4 (33) anul IX / octombrie-decembrie 2011 - ROMDIDAC
Create successful ePaper yourself
Turn your PDF publications into a flip-book with our unique Google optimized e-Paper software.
EX PONTO <strong>Nr</strong>.4, <strong>2011</strong><br />
150<br />
Une martyre, surprenante par son satanisme rhétorique a été sortie des<br />
éditions suivantes. En échange, on y a ajouté d’autres poèmes à fort caractère<br />
protestataire (Le guignon, Le Squelette qui fouille, La Mort des amants,<br />
Harmonie du soir) qui ont fait passé à leur traducteur un difficile examen de<br />
virtuosité. Les modifications opérées à presque tous les poèmes publiés dans<br />
l’édition de 145 ou celle de 1957 sont apparemment insignifiantes. Ce sont<br />
les témoignages du désir constant du traducteur d’aspirer à une forme qui vit<br />
la perfection. Philippide n’a peut-être osé de traduire plusieurs des poésies<br />
des Tableaux parisiens, expliquant ses options avec élégance et modestie,<br />
dans sa préface de l’édition de 1945: «Le traducteur des éditions présentes<br />
a essayé d’éviter l’irréalisable. Il vaut mieux renoncer de traduire un poème,<br />
même essentiel, même très beau, après avoi vu que, à la suite des tentatives<br />
répétées, on ne pourrait parvenir qu’à une traduction approximative ou, du<br />
moins, correcte, mais privée du charme de l’original» 15<br />
Si nous prenions en discussion un, seulement, de ces poèmes, Le Cygne,<br />
par exemple, nous pourrions constater combien les scrupules du traducteur<br />
sont justifiés. Le cygne qui se débat, impuissant, comme le poisson sur l’herbe,<br />
devant le Louvre, évoque à Baudelaire tantôt l’image d’Andromaque, captive<br />
et veuve, tantôt l’image moderne de la négresse malade de phtisie, suffoquant<br />
dans l’atmosphère accablante de la capitale. Depuis ces images, le poète se<br />
dirige vers les vaincus, les captifs, les opprimés et les déshérités du destin.<br />
C’est un grand poème qui aurait bien mérité de figurer aussi en version<br />
roumaine s’il n’y avait pas eu de sérieuses difficultés d’ordre technique. Certes,<br />
lorsque Baudelaire évoque la captive Andromaque, le vers revêt la cadence<br />
majestueuse et régulière de l’alexandrin classique; lorsque les souffrances<br />
infinies du monde moderne sont évoquées, toutes les variations introduites<br />
par la révoluton romantique dans l’emploi de l’alexandrin sont adoptées par le<br />
poète avec un raffinement particulier. Les effets obtenus par Baudelaire sont<br />
tout à fait spécifiques à la versification française, étant le resultat d’une longue<br />
tradition littéraire et c’est difficile de trouver des équivalences en roumain. Mis<br />
en roumain, le poème serait tout au plus une «approximation», il n’aurait pas<br />
pu rendre fidélement l’original.<br />
Pour trouver le ton juste de la poésie baudelairienne, le ton de chaque<br />
poème, pour pouvoir arriver à cette «transfusion poètique», là dont le<br />
traducteur parlait, dans la préface de la même édition, de longues années et<br />
de laborieux essais ont été nécessaires. «on travaille à une telle traduction<br />
toute sa vie» 16 , déclarait Al. Philippide. Forte personnalité, remarquable<br />
tant par la vocation lyrique que par la conscience critique, l’interprète des<br />
«correspondences» baudelairiennes n’a pas accepté que l’impact avec<br />
les valeurs étrangères dénaturât ou atténuât sa propre voix. En ce qui le<br />
concerne, la rencontre avec l’oeuvre traduite occasionne son autodéfinition<br />
à travers le même laps de temps où il se rapporte, avec respect et fidélité,<br />
au texte original. Evidemment, les affinités qu’il avait avec Baudelaire l’ont<br />
aidé dans le processus de traduction. Et pourtant, le travail n’a pas été facile.<br />
Pour mettre en évidence son assiduité dans l’art de la traduction, on pourrait<br />
donner pas mal d’exemples de modifications opérées dans certains poèmes<br />
dès la première édition jusqu’à la dernière. Le dernier vers de l’Albatros est<br />
en original: „Les ailes de géant l’empêchent de marcher” est différent dans les<br />
versions de 1945: „Aripile-i imense l-împiedică să meargă” ou 1957: „Aripile<br />
imense nu-i lasă loc să meargă” .