26.06.2013 Views

Télécharger Une vie - Ebooks libres et gratuits

Télécharger Une vie - Ebooks libres et gratuits

Télécharger Une vie - Ebooks libres et gratuits

SHOW MORE
SHOW LESS

Create successful ePaper yourself

Turn your PDF publications into a flip-book with our unique Google optimized e-Paper software.

Mais le comte eut une sorte de grognement <strong>et</strong>, se courbant<br />

sur l’encolure de son pesant cheval, il le j<strong>et</strong>a en avant d’une<br />

poussée de tout son corps : <strong>et</strong> il le lança d’une telle allure,<br />

l’excitant, l’entraînant, l’affolant avec la voix, le geste <strong>et</strong><br />

l’éperon, que l’énorme cavalier semblait porter la lourde bête<br />

entre ses cuisses <strong>et</strong> l’enlever comme pour s’envoler. Ils allaient<br />

d’une inconcevable vitesse, se ruant droit devant eux ; <strong>et</strong> Jeanne<br />

voyait là-bas les deux silhou<strong>et</strong>tes de la femme <strong>et</strong> du mari, fuir,<br />

fuir, diminuer, s’effacer, disparaître, comme on voit deux<br />

oiseaux se poursuivant, se perdre <strong>et</strong> s’évanouir à l’horizon.<br />

Alors Julien se rapprocha, toujours au pas, en murmurant<br />

d’un air furieux : « Je crois qu’elle est folle, aujourd’hui. »<br />

Et tous deux partirent derrière leurs amis, enfoncés<br />

maintenant dans une ondulation de plaine.<br />

Au bout d’un quart d’heure ils les aperçurent qui<br />

revenaient ; <strong>et</strong> bientôt ils les joignirent.<br />

Le comte, rouge, en sueur, riant, content, triomphant,<br />

tenait de sa poigne irrésistible le cheval frémissant de sa femme.<br />

Elle était pâle, avec un visage douloureux <strong>et</strong> crispé ; <strong>et</strong> elle se<br />

soutenait d’une main sur l’épaule de son mari comme si elle<br />

allait défaillir.<br />

Jeanne, ce jour-là, comprit que le comte aimait<br />

éperdument.<br />

Puis la comtesse, pendant le mois qui suivit, se montra<br />

joyeuse comme elle ne l’avait jamais été. Elle venait plus<br />

souvent aux Peuples, riait sans cesse, embrassait Jeanne avec<br />

des élans de tendresse. On eût dit qu’un mystérieux ravissement<br />

était descendu sur sa <strong>vie</strong>. Son mari, tout heureux lui-même, ne<br />

la quittait point des yeux, <strong>et</strong> tâchait à tout instant de toucher sa<br />

main, sa robe, dans un redoublement de passion.<br />

– 164 –

Hooray! Your file is uploaded and ready to be published.

Saved successfully!

Ooh no, something went wrong!