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des armes avec sa canne contre la cloison quand il passait<br />

devant c<strong>et</strong> endroit.<br />

Dans la chambre de p<strong>et</strong>ite mère elle r<strong>et</strong>rouva, piquée<br />

derrière une porte, dans un coin sombre auprès du lit, une fine<br />

épingle à tête d’or qu’elle avait enfoncée là autrefois (elle se le<br />

rappelait maintenant), <strong>et</strong> qu’elle avait, depuis, cherchée<br />

pendant des années. Personne ne l’avait trouvée. Elle la prit<br />

comme une inappréciable relique <strong>et</strong> la baisa.<br />

Elle allait partout, cherchait, reconnaissait des traces<br />

presque invisibles dans les tentures des chambres qu’on n’avait<br />

point changées, revoyait ces figures bizarres que l’imagination<br />

prête souvent aux dessins des étoffes, des marbres, aux ombres<br />

des plafonds salis par le temps.<br />

Elle marchait à pas mu<strong>et</strong>s, toute seule dans l’immense<br />

château silencieux, comme à travers un cim<strong>et</strong>ière. Toute sa <strong>vie</strong><br />

gisait là-dedans.<br />

Elle descendit au salon. Il était sombre derrière ses vol<strong>et</strong>s<br />

fermés <strong>et</strong> elle fut quelque temps avant d’y rien distinguer ; puis,<br />

son regard s’habituant à l’obscurité, elle reconnut peu à peu les<br />

hautes tapisseries où se promenaient des oiseaux. Deux<br />

fauteuils étaient restés devant la cheminée comme si on venait<br />

de les quitter ; <strong>et</strong> l’odeur même de la pièce, une odeur qu’elle<br />

avait toujours gardée, comme les êtres ont la leur, une odeur<br />

vague, bien reconnaissable cependant, douce senteur indécise<br />

des <strong>vie</strong>ux appartements, pénétrait Jeanne, l’enveloppait de<br />

souvenirs, grisait sa mémoire. Elle restait hal<strong>et</strong>ante, aspirant<br />

c<strong>et</strong>te haleine du passé, <strong>et</strong> les yeux fixés sur les deux sièges. Et<br />

soudain, dans une brusque hallucination qu’enfanta son idée<br />

fixe, elle crut voir, elle vit, comme elle les avait vus si souvent,<br />

son père <strong>et</strong> sa mère chauffant leurs pieds au feu.<br />

– 281 –

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