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L'éTAT de VILLes AFrIcAINes - UN-Habitat

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206<br />

6.3<br />

La Géographie du Foncier Urbain et<br />

les Finances Municipales<br />

L’appropriation <strong>de</strong>s terres appartenant aux indigènes africains s’est<br />

trouvée au cœur du colonialisme et <strong>de</strong> l’apartheid, et elle a <strong>de</strong>puis<br />

laissé son empreinte sur l’économie politique et l’i<strong>de</strong>ntité <strong>de</strong> la sousrégion.<br />

La lutte pour l’indépendance et le gouvernement majoritaire<br />

a été violente, et a été suivie d’une culture <strong>de</strong> l’impunité largement<br />

répandue et jusqu’au niveau <strong>de</strong>s ménages pris individuellement.<br />

Toutefois, le transfert du pouvoir politique <strong>de</strong>s mains <strong>de</strong>s colons et<br />

<strong>de</strong>s partisans <strong>de</strong> l’apartheid à celles <strong>de</strong>s élites indigènes <strong>de</strong>puis les<br />

années 1970 n’a entraîné aucune révision fondamentale du legs du<br />

passé en matière foncière. Ce qui domine plutôt aujourd’hui, c’est la<br />

continuité et la réaffirmation <strong>de</strong>s législations, politiques, procédures<br />

administratives et infrastructures foncières héritées du colonialisme.<br />

Il a fallu du temps pour que l’approche acheteur <strong>de</strong> plein gré, ven<strong>de</strong>ur<br />

<strong>de</strong> plein gré qui a présidé à la redistribution <strong>de</strong>s terres en Afrique du<br />

Sud, en Namibie et au Zimbabwe commence à satisfaire les besoins<br />

<strong>de</strong>s ménages pauvres marginalisés. Même au Zimbabwe, où <strong>de</strong>s<br />

réformes foncières accélérées ont été mises en place <strong>de</strong>puis l’an 2000,<br />

les structures administratives coloniales sont restées généralement<br />

intactes, et dans les zones urbaines en particulier.<br />

En Afrique australe, changement politique et politiques foncières<br />

ont relevé <strong>de</strong> l’adaptation et <strong>de</strong> la cooptation plutôt que d’une<br />

quelconque radicalité, ce qui n’a fait qu’accroître la capacité <strong>de</strong>s<br />

élites à étendre (ou consoli<strong>de</strong>r) leur mainmise sur les économies<br />

locales et nationales. 27 . L’un <strong>de</strong>s idéaux qui ont inspiré la lute pour<br />

l’indépendance, qui consistait à voir dans la terre une ressource qu’il<br />

fallait libérer au profit <strong>de</strong> tous, reste sans traduction dans les faits. Par<br />

conséquent, le foncier reste au cœur <strong>de</strong>s tensions politiques comme<br />

<strong>de</strong> l’i<strong>de</strong>ntité, <strong>de</strong> la culture et <strong>de</strong>s économies <strong>de</strong> la sous-région. Dans<br />

l’Afrique australe d’aujourd’hui, le foncier présente les gran<strong>de</strong>s<br />

caractéristiques suivantes:<br />

• Accès et distribution inéquitables, la majorité <strong>de</strong> la population se<br />

trouvant marginalisée en ville comme en campagne.<br />

• Dualité <strong>de</strong>s régimes juridiques et administratifs régissant<br />

l’économie et la tenure – un pour les villes et l’autre pour les<br />

campagnes; un pour les territoires indigènes africains et un<br />

autre pour les anciens territoires européens que s’approprient<br />

désormais les élites locales, le tourisme, les expatriés et les<br />

<strong>de</strong>scendants <strong>de</strong>s colons.<br />

• Des systèmes d’accès au foncier trop lents et bureaucratiques<br />

pour les besoins <strong>de</strong> l’aménagement urbain, ce qui encourage<br />

l’accumulation improductive, la spéculation et la mise en réserve<br />

dont les classes possédantes sont celles qui profitent le plus.<br />

• Une économie <strong>de</strong> zones franches pour l’exportation contrôlée<br />

par les nouvelles élites et leurs associés étrangers, qui contraste<br />

avec l’économie urbaine informelle, <strong>de</strong> subsistance et marginale<br />

qui permet à peine à la majorité <strong>de</strong> la population urbaine <strong>de</strong><br />

survivre.<br />

• La reconduction pure et simple <strong>de</strong>s gran<strong>de</strong>s lignes <strong>de</strong>s politiques<br />

et <strong>de</strong>s structures administratives coloniales, et les violations <strong>de</strong>s<br />

droits <strong>de</strong> la majorité qui en sont inséparables.<br />

• Le manque <strong>de</strong> terre, l’aménagement urbain non maîtrisé, les<br />

occupations illicites (squats), le surpeuplement et les conditions<br />

d’hygiène déplorables, la pollution <strong>de</strong> l’environnement, le<br />

délabrement et les quartiers pauvres et insalubres.<br />

Le colonialisme et l’apartheid ont, en Afrique australe,<br />

instrumentalisé la législation foncière pour dépossé<strong>de</strong>r les économies<br />

indigènes et contrôler les moyens <strong>de</strong> subsistance <strong>de</strong>s Africains tout<br />

en soutenant l’économie européenne et celle du mon<strong>de</strong> entier. La<br />

situation n’a pas beaucoup changé <strong>de</strong>puis en Afrique du Sud, en<br />

Namibie, ou encore au Zimbabwe en dépit du battage autour <strong>de</strong> la<br />

réforme foncière accélérée. Par conséquent, faute d’un changement<br />

radical dans les fon<strong>de</strong>ments mêmes du système, la mise en place <strong>de</strong><br />

nouvelles politiques ou techniques ne servira à rien.<br />

Formes et Dualité <strong>de</strong> la Tenure Foncière Urbaine<br />

La tenure foncière inclut les conditions dans lesquelles les droits<br />

sur <strong>de</strong>s biens-fonds (sols, eaux et bois compris) sont acquis, conservés,<br />

utilisés, transmis, partagés, légués ou transférés. Conformément<br />

aux pratiques héritées du colonialisme, les politiques et législations<br />

en vigueur ont favorisé le régime <strong>de</strong> la propriété pleine et entière<br />

en milieu urbain. Toutefois à Maseru (Lesotho) et Gaborone<br />

(Botswana), la tenure coutumière est très répandue, y compris dans<br />

les zones urbaines et périurbaines. Dans d’autres villes d’Afrique<br />

australe, propriété et tenure à bail coexistent, particulièrement à<br />

Lusaka et Maputo, où la dénationalisation <strong>de</strong>s terres n’est intervenue<br />

que récemment. Dans ces villes, les pouvoirs publics ont conservé<br />

la propriété tout en octroyant aux investisseurs et aux ménages <strong>de</strong>s<br />

baux <strong>de</strong> 50 à 99 ans. Il existe donc sept catégories <strong>de</strong> foncier urbain<br />

en Afrique australe : la propriété privée, le bien-fonds coutumier<br />

ou collectif (tenure à bail où les autorités traditionnelles sont<br />

responsables <strong>de</strong> la répartition et du règlement <strong>de</strong>s litiges), et le bienfonds<br />

public appartenant à l’Etat et cédé à bail pour usage privé et<br />

pour une pério<strong>de</strong> bien déterminée.<br />

Sous le régime <strong>de</strong> la tenure coutumière, la propriété est collective<br />

plutôt qu’individuelle. Les individus ne paient pas pour les terres qui<br />

leur sont allouées, ou seulement une re<strong>de</strong>vance purement symbolique,<br />

mais ils conservent le droit d’utiliser le terrain aussi longtemps qu’ils

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