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Chapitre 2 – Catégorisation perceptive vs. conceptuelle : effet du type d’expertise
Notre hypothèse, basée sur les résultats de notre étude précédente et sur les résultats des études de
Solomon (1997) et Ballester et al. (2008), était que la nature même de l’expertise peut avoir une
influence sur la catégorisation et que des panélistes entraînés à l’évaluation sensorielle et des
professionnels ne fonctionnent pas de la même façon. Les résultats de l’étude présentée ici confirme
cette hypothèse puisqu’en comparant directement des participants entraînés et des professionnels de la
bière, nous avons trouvé que ces deux types d’experts ne catégorisaient pas les bières de la même
façon. Ces différences de catégorisation perceptive observées entre les participants entraînés et les
brasseurs peuvent en partie être expliquées par les différences de capacités discriminatives entre les
deux groupes. Des tests triangulaires ont en effet mis en évidence des performances différentes des
deux groupes de participants selon leur degré de familiarité avec les bières testées. Il est probable que
la familiarité vis-à-vis des bières à catégoriser dans l’épreuve du tri hiérarchique était différente pour
les participants entraînés et les brasseurs, voire même que la familiarité au sein d’un groupe de
participants variait selon les bières. Il nous est difficile de vérifier cette hypothèse pour les brasseurs,
mais en ce qui concerne les entraînés, nous savons que certaines bières leur sont plus familières que
d’autres car elles sont dégustées régulièrement pendant les séances d’entraînement du panel. C’est le
cas notamment de la Duvel et de la Leffe blonde, qui sont fréquemment présentées au panel comme
référence de descripteurs sensoriels (l’amertume pour la Duvel et l’arôme phénol pour la Leffe), et
dans une moindre mesure, de la St Feuillien blonde, de la St Bernardus triple, de la Bière du Démon,
de la Grimbergen et de la Maredsous 6, qui ont été présentées quelquefois au panel. Par ailleurs, les
catégorisations perceptives des participants étaient globalement assez différentes de la catégorisation
théorique extraite d’un livre sur la bière.
L’ensemble de ces résultats suggère que le type d’expertise a un effet sur la catégorisation
perceptive des bières mais pas sur la catégorisation conceptuelle. Par ailleurs, il semble que les
catégorisations de bières trouvées dans les livres soient davantage conceptuelles que perceptives. Pour
vérifier cela, il serait intéressant de reproduire l’épreuve de tri de photos de bières mais en dégustant
réellement les bières afin de comparer plus directement la catégorisation conceptuelle et la
catégorisation perceptive. Etant donné le nombre important de bières pour cette épreuve (65 bières), il
faudrait que le tri soit fait sur des blocs incomplets équilibrés de bières. Cependant, ce tri nécessiterait
un nombre très important de participants, ce qui le rend impossible avec les panélistes entraînés qui ne
sont au maximum qu’une vingtaine. De même, il serait intéressant de reproduire l’épreuve de tri
hiérarchique mais cette fois-ci en utilisant les photos des bières et non pas les bières réelles. Le
croisement de l’ensemble de ces données de tri permettrait d’apporter des informations plus précises et
plus complètes sur les différences entre les catégorisations perceptives et conceptuelles des bières.
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