Dictionnaire universel des poids et mesures anciens et modernes ...

MONNAIES 287
circulent. Ainsi, à l'étranger, les monnaies de France n'ont plus cours légal (excepté dans les états qui ont
admis le même système monétaire) ; elles ne sont plus considérées que comme lingots et ne sont reçues que
d'après les tarifs des monnaies , ou d'après les prix des matières d'or ou d'argent dans chaque pays. De même
les espèces étrangères perdent en France leur valeur légale et ne se reçoivent oitlinairement qu'au poids,
d'après le tarif fixé au change des monnaies, c'est-à-dire, avec une certaine déduction pour frais de fabri-
cation et une légère diminution sur le titre ; sans cette précaution les entrepreneurs de la fabrication pour-
raient être exposés à des pertes plus ou moins considérables. Ainsi, le souverain d'Angleterre, supposé droit
de poids et de titre , vaut , d'après la table des monnaies , environ :25 francs 22 centimes en monnaies légales
de France ; mais son poids réel , à cause de la tolérance , n'est guère que de 7 .97 grammes , et son titre n'est
admis que pour 913 millièmes, de manière que la valeur réelle du souverain, c'est-à-dire, la valeur réali-
sable au change des monnaies , et payable en monnaies légales de France , ne serait que d'environ 23 francs
7 centimes , le prix du kilogramme d'or à ce titre étant fixé à 5143 francs 37 centimes. La pièce de 10 florins
de Hollande, du poids effectif de 6.7 grammes, étant admise au titre légal de 900 millièmes, vaudra réellement
au change des monnaies , à raison de 3094 francs le kilog., 20 francs 73 centimes au lieu de 20 francs
86 centimes qui est sa valeur légale. Mais ces valeurs mêmes , calculées d'après les prix fixés aux hôtels des
monnaies en France, ne sont pas constantes et sont inférieures à celles qu'on leur attribue généralement dans
le commerce. On ajoute ordinairement au prix du tarif un agio ou prime de 8 à 13 francs pour 1000 francs
plus ou moins pour les matières d'or, et de 3 à 10 francs pour 1000 francs pour les matières d'argent. Cet
agio varie d'ailleurs en raison de la plus ou moins grande abondance des matières au marché. Plusieurs
espèces se vendent à Paris à un cours variable , entre autres les quadruples d'Espagne de 83 francs 30 cen-
times à 84 francs ; les ducats de Hollande de 1 1 francs 80 centimes à 1 1 francs 83 centimes ; les piastres à
colonne de 5 francs 40 centimes à 3 francs 42 centimes ; les piastres mexicaines de 3 francs 33 centimes à
5 francs 37 centimes ; les souverains d'Angleterre de 23 francs 20 centimes à 23 francs 30 centimes ; les pièces
de 20 et de 40 francs, monnaie légale, portent elles-mêmes un agio relativement à l'argent, de à 10 pour
mille. Nous avons consulté, pour établir ces nombres, les cours officiels de la bourse de Paris de mars à
juillet 1839. Il résulte de ce qui'précède que la valeur réelle des monnaies ne peut être déterminée d'une manière
fixe, et qu'elle varie selon les prix-courants des matières ou des espèces d'or et d'argent dans le commerce.
Ce qui s'oppose d'ailleurs à ce qu'on puisse fixer cette valeur, c'est que les espèces semblables , frappées au
même poids et au même titre, offrent souvent des différences entre elles dans ce poids et dans ce titre, soit
à cause de la tolérance ou du remède que chaque gouvernement accorde, soit à cause du peu de soin que
l'on met dans certains pays à les fabriquer, soit enfin à cause du frai, c'est-à-dire, de la diminution de poids
qu'elles éprouvent par le frottement dans la circulation. Les auteurs qui ont cru pouvoir établir cette valeur
réelle se sont donc grandement trompés , car cette valeur est variable de sa nature et suit nécessairement les
fluctuations que les divers échanges du commerce font éprouver aux prix des matières d'or et d'argent
comme à ceux des autres marchandises, quoique dans une moindre proportion.
Faleur variable. Pour se faire une idée quelque peu exacte de ce qui constitue la valeur des monnaies en
général , il faut considérer aussi que cette valeur varie selon les lieux et les temps où elles sont employées ,
c'est-à-dire, qu'une même somme de monnaies ne suffit pas pour acheter la même quantités de choses dans
des temps et dans des lieux différents. Ainsi une même somme a bien moins de valeur à Paris qu'en pro-
vince ; une maison de 20000 francs en Basse-Bretagne a plus de valeur qu'une maison de 20000 francs à
Paris ; de même qu'un revenu de 1 0000 francs en Basse-Bretagne est bien plus considérable qu'un revenu
de pareille somme à Paris. Une maison à Paris de 10000 écus , au temps de Henri IV , valait bien plus qu'une
maison qui vaudrait à présent 10000 écus. Un revenu de 10000 francs en France représentera en Angleterre
une somme bien moins considérable, eu égard à la cherté des objets de consommation. Ces différences de
valeur d'une même somme , selon les lieux et les temps , ne pouvant être déterminées d'une manière fixes ,
rendent impossible la comparaison qu'on a quelquefois tenté de faire des richesses de deux époques ou de
deux nations différentes. Ce parallèle , dit M. Say , est la quadrature du cercle de-l'économie politique , parce
qu'il n'y a pas de mesure commune pour l'établir.
II. Prix des matières d'or et d'argent au cliange des monnaies en France.
En France , on fabrique d'un kilogramme d'or, au titre de 900 millièmes, 155 pièces de 20 francs ou
3100 francs d'or, et le kilogramme d'argent, au même titre, fournit 40 pièces de 5 francs ou 200 francs
d'argent , de manière que l'or et l'argent monnayés sont dans le rapport de 13| à 1 . Mais le gouvernement
exige pour toutes les espèces étrangères et autres matières d'or ou d'argent, qui sont portées au change des
monnaies , une retenue pour les frais de fabrication, déchets compris. Cette retenue était, du 17 prairial
an XI (6 juin 1803) au l"""^ juillet 1833 , de 9 francs par kilogramme d'or à 900 millièmes et de 5 francs par
kilogramme d'argent au même titre. A dater du 1" juillet 1833 , elle a été réduite à 6 francs pour l'or et à
2 francs pour l'argent. Il est à remarquer que les prix-courants commerciaux indiquent encore les prix de
l'ancien tarif.
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