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Rafael Benítez, Universidad de Valencia - framespa

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Personnage fastueux, il entretient aussi <strong>de</strong>s relations étroites avec la noblesse avignonnaise,<br />

bien que ses prérogatives politiques se limitent en principe au Comtat dont il prési<strong>de</strong><br />

l’assemblée <strong>de</strong>s communautés. Lors <strong>de</strong> l’affrontement entre pessugaux et pévoulins, Bichi se<br />

montre un fervent partisan <strong>de</strong>s premiers qu’il vient soutenir à Avignon en cherchant à faire<br />

élire ses partisans au consulat. Quelques nobles le suivent ensuite à Carpentras lorsqu’il doit<br />

quitter Avignon en juillet 1653. Bichi apparaît alors comme un obstacle à la paix qu’il avait<br />

favorisé en Provence. Comment expliquer cette attitu<strong>de</strong> ? Les pessugaux constituent-ils un<br />

parti favorable à la France que Bichi, créature <strong>de</strong> Mazarin, soutiendrait ? A aucun moment<br />

pourtant, les troubles avignonnais n’ont entraîné une tentative d’intervention française dans<br />

les affaires locales, même lorsque la Fron<strong>de</strong> s’est terminée. Ce que veulent les pessugaux, en<br />

<strong>de</strong>hors <strong>de</strong> la domination du conseil <strong>de</strong> ville, n’apparaît jamais sous la forme d’un programme<br />

politique clair.<br />

Pour le début <strong>de</strong>s conflits avec les fermiers <strong>de</strong> la foraine et <strong>de</strong>s troubles avignonnais (<strong>de</strong><br />

novembre 1650 à octobre 1653), l’analyse fournie par le factum du vice-légat Cursi, texte<br />

bien informé sans doute <strong>de</strong>stiné justifier son action, est très éclairant 289 . La partialité du texte,<br />

violemment opposé à Bichi et à ses partisans, fait son intérêt. Le vice-légat insiste à plusieurs<br />

reprises sur la rivalité entre les familles nobles d’Avignon : dès le début <strong>de</strong> l’affaire <strong>de</strong>s<br />

commis, elle s’exprime par l’hostilité entre le baron <strong>de</strong> Crillon, qui servirait les intérêts <strong>de</strong>s<br />

fermiers <strong>de</strong> la douane, et Gaspard <strong>de</strong> Villefranche, qui agirait « en hayne » <strong>de</strong> ces fermiers.<br />

Mais pour le vice-légat Cursi, Crillon, qui se retrouve dans les années suivantes parmi les<br />

personnalités appréciées <strong>de</strong>s pévoulins, sans être vraiment un chef <strong>de</strong> cette tendance, est un<br />

conciliateur à la recherche du compromis, luttant à la fois contre les excès <strong>de</strong>s consuls en<br />

place et contre les débor<strong>de</strong>ments populaires avec l’ai<strong>de</strong> d’autres nobles (Chasteuil, <strong>de</strong><br />

Raymond, Massillian, La Grougière, Montcluds, Entremont).<br />

Il n’est pas possible d’opposer <strong>de</strong>ux noblesses en fonction <strong>de</strong> l’ancienneté, <strong>de</strong> la richesse ou<br />

<strong>de</strong>s fonctions occupées. Louis Berton <strong>de</strong> Crillon est un gentilhomme d’une gran<strong>de</strong> famille<br />

avignonnaise, petit-neveu du brave Crillon qui s’était illustré pendant les guerres <strong>de</strong> religion,<br />

d’abord au service <strong>de</strong>s Guises puis <strong>de</strong> Henri III et <strong>de</strong> Henri IV. Homme d’épée lui aussi, il est<br />

colonel <strong>de</strong> l’artillerie pontificale et a été élu pour occuper la charge <strong>de</strong> viguier d’Avignon en<br />

1653, preuve qu’il n’est pas écarté du pouvoir 290 . Il a fait construire au cœur <strong>de</strong> la ville en<br />

1648-1649 un magnifique hôtel particulier 291 . Ce bâtiment tout récent au moment <strong>de</strong>s troubles<br />

dit à la fois le rang social du personnage et ses ambitions politiques. De style baroque avec ses<br />

décors sculptés <strong>de</strong> mascarons, rinceaux, guirlan<strong>de</strong>s, cornes d’abondance et médaillons avec<br />

<strong>de</strong>s figures humaines, la faça<strong>de</strong> sur rue apparaît presque archaïque dans sa somptuosité au<br />

moment où elle est réalisée, alors que la cour intérieure est beaucoup moins soignée : il y a là<br />

incontestablement une volonté <strong>de</strong> marquer les esprits et <strong>de</strong> se démarquer <strong>de</strong>s autres nobles qui<br />

choisissent déjà un style plus épuré. Des membres <strong>de</strong> la noblesse <strong>de</strong> robe sont aussi favorables<br />

aux pévoulins, revendiquant notamment une meilleure gestion <strong>de</strong>s affaires municipales<br />

comme Henri <strong>de</strong> Suarez. Mais d’autres robins sont proches <strong>de</strong>s pessugaux et hostiles à Crillon<br />

comme M. Crivel, docteur en doit dont la maison est pillée dans la nuit du 5 au 6 novembre<br />

1655.<br />

289 . Bibl. Mun. Av., ms 2394, f° 129 v° sqq., « Copie du factum <strong>de</strong> Monseigneur Laurent Cursi, vice-légat d’Avignon »,<br />

publié dans J. MERITAN, « Les troubles et émeutes d’Avignon (1652-1659) », art. cité, p. 59-75. Ce texte ne nous est parvenu<br />

que sous la forme d’une copie mais il traduit le regard d’un contemporain. J. Méritan le considère comme une justification <strong>de</strong><br />

son action par le vice-légat Cursi, même si le document est écrit à la troisième personne.<br />

290 . Cette charge très importante est renouvelée chaque année. Qu’elle ait été occupée par Crillon ne lui confère donc qu’une<br />

autorité provisoire et fragile. Le viguier convoque et prési<strong>de</strong> le conseil <strong>de</strong> ville. Il prési<strong>de</strong> aussi la Cour ordinaire et<br />

temporelle <strong>de</strong> Saint-Pierre qui juge les affaires civiles et criminelles <strong>de</strong> l’Etat d’Avignon. Toutefois, sa fonction est surtout<br />

honorifique : issu <strong>de</strong>s gentilshommes, il n’est pas juge lui-même et le pouvoir municipal appartient en fait aux consuls. En<br />

revanche, il veille au respect <strong>de</strong>s institutions locales dans l’intérêts du pouvoir souverain.<br />

291 . P. LAVEDAN, « Hôtels particuliers à Avignon, XVII e – XVIII e siècle », Congrès archéologique <strong>de</strong> France, CXXI e session,<br />

1963, Avignon et Comtat Venaissin, Paris, Société Française d’Archéologie, 1963, p. 132-151.<br />

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