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Le saumon de l'Atlantique dans l'histoire de l'Amérique du Nord

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er cette opinion, la situation réelle est plus facile à<br />

comprendre si on tient compte <strong>du</strong> fait qu'un fort pourcentage<br />

<strong>de</strong>s exportations enregistrées à Terre-Neuve<br />

proviennent en réalité <strong>du</strong> Labrador. <strong>Le</strong>s pêches au<br />

<strong>saumon</strong> à Terre-Neuve sont toutefois prospères <strong>dans</strong><br />

certaines régions traditionnelles comme les baies <strong>de</strong><br />

Gan<strong>de</strong>r, White, <strong>de</strong>s Exploits et Bonavista <strong>de</strong> même<br />

qu'à plusieurs autres postes sur la côte sud-ouest.<br />

Cependant, la pêche à la morue mobilise tellement les<br />

intérêts <strong>de</strong>s Terre-Neuviens que le <strong>saumon</strong> est presque<br />

aussi rare et coûteux <strong>dans</strong> les marchés <strong>de</strong> St-Jean que<br />

<strong>dans</strong> ceux <strong>de</strong> Londres, même si le prix <strong>de</strong> vente <strong>de</strong><br />

l'époque, soit six pence, ou 12 cents, la livre nous<br />

semble très peu élevé <strong>de</strong> nos jours.<br />

<strong>Le</strong>s registres <strong>de</strong>s exportations <strong>de</strong> Terre-Neuve<br />

pour 1840 nous montrent comment se répartissent les<br />

marchés <strong>du</strong> <strong>saumon</strong> à cette époque : 38 % <strong>de</strong>s 3 396<br />

tierces exportées sont allées aux États-Unis, 22 % aux<br />

marchés européens et étrangers, 19 % à d'autres colonies<br />

d'Amérique <strong>du</strong> <strong>Nord</strong> britannique, 13 % aux<br />

Antilles britanniques et 8% à la Gran<strong>de</strong>-Bretagne: 28<br />

Nouvelle-Angleterre<br />

Après la guerre <strong>de</strong> 1812, les habitants <strong>de</strong> la<br />

Nouvelle-Angleterre et, surtout ceux <strong>du</strong> Massachusetts,<br />

sont avi<strong>de</strong>s <strong>de</strong> poisson; en fait, ils sont surtout très<br />

désireux d'obtenir le droit <strong>de</strong> continuer <strong>de</strong> pêcher <strong>dans</strong><br />

les eaux <strong>de</strong> <strong>l'Amérique</strong> <strong>du</strong> <strong>Nord</strong> britannique. Ils sont si<br />

obsédés par l'idée <strong>de</strong> retrouver leurs droits que leur<br />

négociateur principal se rappellera ce point plus tard :<br />

«II est extraordinaire que la paix n'ait dépen<strong>du</strong> que <strong>de</strong><br />

<strong>de</strong>ux facteurs. . . l'île Moose et les pêcheries relevant <strong>de</strong><br />

la compétence britannique »• 129<br />

Cette convoitise <strong>de</strong>s eaux étrangères démontre<br />

clairement l'état pitoyable <strong>de</strong>s pêches <strong>de</strong> la Nouvelle-<br />

Angleterre à cette époque, tant sur la côte qu'à l'intérieur<br />

<strong>de</strong>s terres. Tout comme <strong>l'Amérique</strong> <strong>du</strong> <strong>Nord</strong><br />

britannique, les États <strong>de</strong> l'Est sont activement engagés<br />

<strong>dans</strong> l'exploitation forestière, ce qui entraîne l'obstruction<br />

<strong>de</strong> nombreux cours et empêche ainsi les montaisons<br />

<strong>de</strong>s poissons anadromes. Ainsi, en 1837, on<br />

trouve 250 scieries le long <strong>du</strong> réseau fluvial Penobscot,<br />

l'ensemble <strong>du</strong> Maine en comptant 1 300." Un observateur,<br />

parlant <strong>de</strong> la menance <strong>de</strong>s scieries pour le <strong>saumon</strong><br />

pendant cette pério<strong>de</strong> remarque que : « presque<br />

tous les cours d'eau. . . assez importants pour faire<br />

fonctionner une scierie sont obstrués <strong>de</strong> un à douze<br />

endroits le long <strong>de</strong> leur cours ». 131<br />

Au contraire <strong>du</strong> Nouveau-Brunswick, <strong>de</strong> la<br />

Nouvelle-Écosse et <strong>de</strong> Terre-Neuve, l'implantation,<br />

dès les débuts <strong>de</strong> la colonisation, d'un énorme réseau <strong>de</strong><br />

manufactures en Nouvelle-Angleterre, surtout <strong>de</strong> coton<br />

et <strong>de</strong> textile, contribue beaucoup à l'obstruction <strong>de</strong><br />

nombreuses rivières; en 1840, les États-Unis comptent<br />

déjà 1 200 manufactures, dont 800 en Nouvelle-<br />

Angleterre. La rivière Merrimack est endiguée à Lowell<br />

dès 1822, limitant la remonte <strong>de</strong> <strong>saumon</strong>s <strong>dans</strong> le cours<br />

d'eau principal à environ un cinquième <strong>de</strong> ce qu'il a<br />

déjà été. <strong>Le</strong> <strong>saumon</strong> continue toutefois <strong>de</strong> remonter la<br />

rivière jusqu'à ce barrage pendant un certain nombre<br />

d'années, puisque l'on rapporte qu'en 1830 le <strong>saumon</strong><br />

<strong>de</strong> la Merrimack approvisionne en partie le marché <strong>de</strong><br />

Boston. Un barrage est construit à Augusta en 1837<br />

<strong>dans</strong> la rivière Kennebec située plus au nord, complétant<br />

ainsi une série d'ouvrages qui empêche le <strong>saumon</strong><br />

<strong>de</strong> remonter le cours d'eau au-<strong>de</strong>là d'environ 50<br />

milles alors qu'autrefois il allait jusqu'à 300 milles. En<br />

1840, le <strong>saumon</strong> <strong>de</strong> la rivière Kennebec se raréfie et les<br />

Bostoniens sont si friands <strong>de</strong> spécimen frais que le<br />

premier à être capturé <strong>dans</strong> la Kennebec cette année-là<br />

se vend pour 42 $ à Boston.'<br />

Manoeuvres militaires et sociales<br />

La pêche au <strong>saumon</strong> à la ligne se développe lentement<br />

<strong>de</strong> 1760 à 1840 en Amérique <strong>du</strong> <strong>Nord</strong> britannique.<br />

Elle est surtout pratiquée par un petit groupe d'officiers<br />

<strong>de</strong> la marine et <strong>de</strong> l'armée britanniques qui ont déjà été<br />

en poste à <strong>de</strong>s endroits comme York (Toronto), la ville<br />

<strong>de</strong> Québec, Halifax et Fre<strong>de</strong>ricton et qui souhaitent<br />

échapper <strong>de</strong> temps en temps à la monotonie et à la<br />

réclusion <strong>de</strong> la vie <strong>de</strong> garnison." Des récits et <strong>de</strong>s<br />

relations <strong>de</strong> voyages conservés jusqu'à présent décrivent<br />

comment ces officiers s'adonnent au sport <strong>de</strong> la<br />

pêche à la morue et au maquereau et comment ils pêchent<br />

le homard à la pointe, en guise <strong>de</strong> passe-temps; la<br />

pêche <strong>du</strong> <strong>saumon</strong> à la ligne fait néanmoins <strong>de</strong> plus en<br />

plus d'a<strong>de</strong>ptes. Il s'ensuit que ce sont les cours d'eau<br />

situés près <strong>de</strong>s garnisons qui sont les premiers à attirer<br />

le plus grand nombre <strong>de</strong> pêcheurs <strong>de</strong> <strong>saumon</strong> à la ligne<br />

en Amérique <strong>du</strong> <strong>Nord</strong>. Ainsi, la pêche au <strong>saumon</strong> pratiquée<br />

<strong>dans</strong> la rivière Nashwaak, près <strong>de</strong> Fre<strong>de</strong>ricton,<br />

est décrite comme une activité « pratique, agréable et<br />

amusante » dès 1791. 1 Dans ces années-là, les<br />

hommes postés à la ville <strong>de</strong> Québec fréquentent la rivière<br />

Jacques Cartier et ceux d'Halifax trouvent que les<br />

rivières Gold, Sackville et Musquodoboit sont idéales<br />

pour pratiquer l'art d'Izaak Walton, la pêche à la ligne;<br />

les hommes se ren<strong>de</strong>nt régulièrement <strong>dans</strong> ces régions<br />

après 1800 pour pratiquer ce sport.<br />

La pêche <strong>du</strong> <strong>saumon</strong> à la ligne <strong>dans</strong> la rivière Gold<br />

commence, dit-on, vers 1833; en 1842, un groupe d'of-<br />

ficiers <strong>de</strong> l'armée attrape 114 poissons en trois se-<br />

maines. Dès 1825, la famille Mason achète <strong>de</strong>s terres<br />

autour <strong>de</strong> la rivière Indian, <strong>dans</strong> l'est <strong>du</strong> comté<br />

d'Halifax, pour pourvoir tout particulièrement aux be-<br />

soins <strong>de</strong>s pêcheurs à la ligne <strong>de</strong> la garnison d'Halifax."<br />

Dans les écrits <strong>de</strong> l'époque, la Nouvelle-Écosse<br />

semble être un lieu où la pêche à la ligne est une activité<br />

sportive pratiquée assez fréquemment et où l'on s'ef-<br />

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