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Le saumon de l'Atlantique dans l'histoire de l'Amérique du Nord

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le pouvoir <strong>dans</strong> la région. Ces querelles internes<br />

fréquemment accompagnées d'une hostilité déclarée et<br />

<strong>de</strong> <strong>de</strong>struction persistent jusqu'en 1654, année où la<br />

Gran<strong>de</strong>-Bretagne s'empare une nouvelle fois <strong>de</strong><br />

l'Acadie. 15<br />

Malgré tout, ce bref épiso<strong>de</strong> d'occupation par<br />

les Anglais ne ralentit pas entièrement les activités<br />

halieutiques <strong>de</strong> la France. Cela était encore visible<br />

notamment <strong>dans</strong> la région <strong>du</strong> golfe et sur la rivière<br />

Sainte-Marie (rivière St. Marys) où, vers 1655, un<br />

commerçant nommé La Giraudière s'établit, <strong>de</strong>venant<br />

ainsi le premier à profiter commercialement <strong>de</strong> la pêche<br />

au <strong>saumon</strong> <strong>dans</strong> ce secteur. En 1658, il s'installe également<br />

à Chédabouctou (Guysborough), I6<br />

L'Acadie est encore une fois ren<strong>du</strong>e à la France en<br />

1667 par le traité <strong>de</strong> Breda, mais elle n'occupe plus<br />

tellement <strong>de</strong> place <strong>dans</strong> les plans ultérieurs <strong>de</strong> la France<br />

pour la consolidation et l'expansion territoriales. Elle<br />

est laissée à elle-même, ses progrès étant réalisés principalement<br />

grâce aux efforts <strong>de</strong> l'entreprise privée <strong>de</strong> la<br />

population faible mais permanente, remontant aux années<br />

1630. 17 Ses habitants — les Acadiens — sont avant<br />

tout <strong>de</strong>s agriculteurs soucieux d'assurer leur subsistance<br />

et dispersés sur une vaste surperficie <strong>dans</strong> un système<br />

seigneurial assez souple. <strong>Le</strong>s conditions <strong>dans</strong> lesquelles<br />

ils vivent sont souvent <strong>du</strong>res et terribles, et au début il<br />

y a peu <strong>de</strong> marchés pour écouler les pro<strong>du</strong>its. Un<br />

gouverneur va même jusqu'à encourager les Anglais à<br />

pêcher sur la côte croyant que cela peut améliorer le<br />

commerce et assurer un débouché facile aux pro<strong>du</strong>its<br />

régionaux.'<br />

<strong>Le</strong>s Acadiens pratiquent la pêche <strong>dans</strong> les rivières<br />

pour assurer leurs propres besoins; ils sont particulièrement<br />

attirés par le <strong>saumon</strong>, l'alose, le gaspareau et<br />

l'anguille, espèces qui effectuent toutes <strong>de</strong>s migrations<br />

annuelles <strong>dans</strong> les nombreux cours d'eau. Néanmoins,<br />

l'impact <strong>de</strong>s Acadiens sur ces ressources reste faible,<br />

leur nombre total n'excédant pas 700 habitants en 1671<br />

et n'atteignant que 855 lors <strong>du</strong> premier recensement<br />

officiel <strong>de</strong> 1686. 19 De concert avec les colons qui exploitent<br />

les postes <strong>de</strong> traite et les stations <strong>de</strong> pêche<br />

côtière, les Acadiens pêchent <strong>dans</strong> la majorité <strong>de</strong>s rivières<br />

à <strong>saumon</strong> importantes, dont les plus remarquables<br />

sont Penobscot, Saint Jean, Petitcodiac,<br />

Maccan, au Saumon (Truro), Shubénacadie, Avon,<br />

Gaspereau, Cornwallis, Annapolis, LaHave, Musquodoboit,<br />

St. Mary's, Guysborough, Inhabitants,<br />

Margaree, French (comté <strong>de</strong> Colchester), Miramichi et<br />

Restigouche.<br />

L'une <strong>de</strong>s exploitations <strong>de</strong> pêche les plus importantes<br />

en Acadie est celle <strong>de</strong> Nicolas Denys. Celui-ci<br />

arrive <strong>dans</strong> la colonie en 1632 avec Razilly et passe un<br />

certain temps à LaHave à mettre sur pied un commerce<br />

<strong>de</strong> poisson et <strong>de</strong> bois avec la France. Pendant la pério<strong>de</strong><br />

perturbée qui suit la mort <strong>de</strong> Razilly, Denys étend ses<br />

activités <strong>de</strong> pêche à d'autres régions <strong>de</strong> l'Acadie, no-<br />

tamment <strong>dans</strong> le golfe Saint-Laurent, construisant <strong>de</strong>s<br />

postes à Miscou (1645), Saint-Pierre (Cap Breton,<br />

1650), Nepisiguit (Bathurst, 1652) et Chédabouctou<br />

(Guysborough, 1659). En 1653, Denys achète à la compagnie<br />

<strong>de</strong> la Nouvelle-France les droits d'accès à la côte<br />

et aux îles <strong>du</strong> golfe Saint-Laurent — vaste territoire<br />

s'étendant <strong>du</strong> Cap Canso jusqu'à Gaspé et comprenant<br />

l'île Royale (Cap Breton), les îles <strong>de</strong> la Ma<strong>de</strong>leine et<br />

l'île Saint-Jean (île-<strong>du</strong>-Prince-Édouard).'<br />

Au cours <strong>de</strong>s années 1650, le principal domaine <strong>de</strong><br />

Denys est l'île Royale où, affirme-t-il, la pêche au<br />

<strong>saumon</strong> est pratiquée à plusieurs endroits sur tout son<br />

pourtour. Il fait remarquer qu'à Sainte-Anne où une<br />

petite colonie française et une mission <strong>de</strong> Jésuites existent<br />

<strong>de</strong>puis environ 1635, 2' « il y a pesche <strong>de</strong> <strong>saumon</strong><br />

<strong>dans</strong> le Havre, mais le maquereau y est (particulièrement)<br />

abondant ».* À propos d'un autre endroit <strong>de</strong><br />

l'île, probablement Margaree ou Mabou, il observe que<br />

l'on entre <strong>dans</strong> une petite rivière à chalouppes, où<br />

l'on pesche force Saumons.' »* Parlant <strong>de</strong> la station<br />

Saint-Pierre, Denys écrit : « L'autre costé <strong>de</strong> terre. . . a<br />

plus <strong>de</strong> dix lieues; ce ne sont que sapins autour, où la<br />

terre ne vaut rien jusques à une petite rivière, où il se<br />

trouve <strong>de</strong> bonnes terres & <strong>dans</strong> laquelle l'on pesche <strong>de</strong>s<br />

Saumone »•* La « petite rivière » était probablement la<br />

rivière Inhabitants, même s'il y ait <strong>de</strong> bonnes terres<br />

agricoles et aussi <strong>du</strong> <strong>saumon</strong> à Grand River.<br />

Denys est probablement le premier à tirer un avantage<br />

commercial notable <strong>du</strong> <strong>saumon</strong> en Acadie. Dans<br />

ses écrits, il mentionne fréquemment cette espèce et<br />

fournit <strong>de</strong>s détails captivants sur ses contacts avec ce<br />

poisson. Par exemple, à propos d'une excursion <strong>de</strong><br />

pêche sur une rivière au fond <strong>de</strong> la baie Chédabouctou,<br />

Denys écrit :<br />

. je fis donner un coup <strong>de</strong> saine à l'entrée, où il se prit<br />

une si gran<strong>de</strong> quantité <strong>de</strong> Saumons, que dix hommes ne<br />

l'a peurent amener à terre, & quoy qu'elle fust neusve,<br />

si elle n'eust crevé le Saumon l'auroit emportée, nous<br />

en eusmes encore plein notre chalouppe : les Saumons<br />

y sont forts, les moindres ont trois pieds <strong>de</strong> long. Une<br />

autre fois, je fus pescher à quatre lieues <strong>dans</strong> le haut <strong>de</strong><br />

la riviere jusques où les chalouppes peuvent aller : il y<br />

a <strong>de</strong>ux fosses où je fis jetter la saine : en une je pris bien<br />

<strong>de</strong>quoy remplir une banque <strong>de</strong> truites <strong>saumon</strong>nées, &<br />

en l'autre six-vingts Saumons. 24*<br />

Il s'agit probablement <strong>de</strong> la rivière Guysborough où<br />

Denys établit une station <strong>de</strong> pêche vers 1659; elle reste<br />

un endroit recherché pour la pêche, après son départ.<br />

On y trouve encore <strong>du</strong> <strong>saumon</strong> mais pas en gran<strong>de</strong><br />

quantité — 52 <strong>saumon</strong>s pesant en moyenne 6 livres<br />

chacun et mesurant bien moins <strong>de</strong> 3 pieds <strong>de</strong> long y sont<br />

pêchés à la ligne en 1972. 25<br />

Avec le temps, les conflits avec d'autres commerçants<br />

français <strong>de</strong> la région et le feu qui détruit le poste<br />

<strong>de</strong> Saint-Pierre en 1668 incitent Denys à transférer ses<br />

29

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