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Le saumon de l'Atlantique dans l'histoire de l'Amérique du Nord

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divers personnages intéressés par la pêche qui, recherchant<br />

la faveur <strong>du</strong> Roi pour obtenir leurs propres<br />

droits et concessions, protestent contre le monopole<br />

géographique considérable exercé par Denys. Un premier<br />

exemple est fourni après 1682 par la compagnie <strong>de</strong><br />

la Pêche sé<strong>de</strong>ntaire <strong>de</strong> l'Acadie — la compagnie<br />

Acadia. Avec le consentement <strong>du</strong> Roi qui lui accor<strong>de</strong><br />

l'accès à la côte <strong>de</strong> l'Acadie et à la rivière Saint-Jean,<br />

la compagnie tente d'abord d'utiliser celle-ci avant <strong>de</strong><br />

choisir finalement le fond <strong>de</strong> la baie Chédabouctou —<br />

ancien emplacement <strong>de</strong> Denys — comme principal<br />

centre d'exploitation. En 1687, le poste compte 150<br />

personnes, dont plus <strong>de</strong> la moitié sont <strong>de</strong>s pêcheurs' et<br />

dont certains pacquent sans aucun doute <strong>du</strong> <strong>saumon</strong> <strong>de</strong><br />

la rivière Guysborough et <strong>de</strong> la rivière au Saumon pour<br />

l'exporter en France.<br />

À son tour, le monopole <strong>de</strong> cette compagnie est<br />

contesté par d'autres entreprises <strong>de</strong> pêche et <strong>de</strong> nouvelles<br />

dispositions s'imposent concernant les concessions<br />

et droits <strong>de</strong> pêche. Apparemment, Nicolas Denys<br />

est le seul possesseur <strong>de</strong> la côte <strong>du</strong> golfe jusqu'en 1686,<br />

année où Gabriel Gautier, membre <strong>de</strong> la compagnie<br />

Acadia, fait l'acquisition <strong>de</strong> droits <strong>de</strong> pêche à l'île<br />

Saint-Jean et aux îles <strong>de</strong> la Ma<strong>de</strong>leine; cependant, les<br />

efforts <strong>de</strong> Gautier pour y établir un poste <strong>de</strong> pêche<br />

sé<strong>de</strong>ntaire échouent. La concession accordée initialement<br />

à Denys par la compagnie <strong>de</strong> la Nouvelle-France<br />

est révoquée et, en 1687, les droits <strong>de</strong> pêche à l'île<br />

Royale sont concédés à un dénommé Bergier, directeur<br />

<strong>de</strong> la compagnie Acadia; en compensation, Denys reçoit<br />

une vaste seigneurie <strong>dans</strong> la région <strong>de</strong> Miramichi.'<br />

Par conséquent, à la fin <strong>du</strong> XVII' siècle, les intérêts<br />

français <strong>dans</strong> la pêche au <strong>saumon</strong> sur toute la côte<br />

<strong>de</strong> l'Acadie sont bien délimités. On pêche régulièrement<br />

sur la rivière St. Mary's et, plus à l'ouest,<br />

Mouscoudabouet Harbour (Musquodoboit) est décrit<br />

comme un havre convenant aux petites embarcations <strong>de</strong><br />

pêche ainsi qu'« une excellente région pour la chasse, et<br />

où il y a <strong>de</strong> la pêche au <strong>saumon</strong> »." LaHave, Port-<br />

Rossignol, Port La Tour et Port-Royal sont <strong>de</strong>s noms<br />

mentionnés précé<strong>de</strong>mment parce qu'ils sont<br />

vraisemblablement associés au <strong>saumon</strong>; un autre endroit<br />

fréquemment mentionné est la baie <strong>de</strong> Passamaquoddy,<br />

à propos <strong>de</strong> laquelle un Français fait la<br />

remarque suivante : «On peut y pêcher la morue à<br />

coups <strong>de</strong> pistolet à partir <strong>de</strong> la terre ferme et le <strong>saumon</strong><br />

y est capturé à huit lieues en amont <strong>de</strong> la rivière Sainte-<br />

Croix »."<br />

L'île Royale est également célèbre pour son <strong>saumon</strong>.<br />

Lorsque Joseph Robinau, sieur <strong>de</strong> Villebon, <strong>de</strong>vient<br />

gouverneur <strong>de</strong> l'Acadie en 1691, il se tient très au<br />

courant <strong>de</strong>s entreprises <strong>de</strong> la colonie. Dans son registre<br />

<strong>de</strong> renseignements sur la pêche, il ne peut fournir <strong>de</strong>s<br />

<strong>de</strong>scriptions exactes <strong>de</strong> l'île Royale, mais il connaît les<br />

havres les plus importants comme la baie <strong>de</strong>s Espagnols<br />

(Sydney), Havre à la baleine (Baleine Cove), Havre à<br />

l'Anglois (Louisbourg) et Neiganiche (Ingonish) où les<br />

Français vont pêcher. 11 note également que « <strong>de</strong> plus il<br />

y a (sur l'île Royale) <strong>de</strong> nombreuses rivières grouillantes<br />

<strong>de</strong> poissons, en particulier <strong>de</strong> <strong>saumon</strong>s »." En<br />

1699, écrivant au comte <strong>de</strong> Pontchartrain, secrétaire<br />

d'État aux affaires maritimes, V illebon faisant allusion<br />

au potentiel halieutique <strong>de</strong> l'Acadie en général affirme :<br />

Il me semble, sire, que nous pouvons tirer <strong>de</strong> la pêche<br />

<strong>dans</strong> ce pays <strong>de</strong> la morue, <strong>du</strong> <strong>saumon</strong>, <strong>du</strong> hareng, <strong>du</strong><br />

maquereau, <strong>de</strong> la sardine, <strong>de</strong> l'alose, <strong>du</strong> gaspareau, <strong>de</strong><br />

l'esturgeon, <strong>du</strong> bar, <strong>de</strong> l'aiglefin, poissons qui peuvent<br />

tous être salés pour L'Europe ou les îles.'<br />

En fait, la pêche prend une expansion rapi<strong>de</strong> mais<br />

seule la suprématie <strong>de</strong> la France Commence à fléchir.<br />

La présence <strong>de</strong>s pêcheurs <strong>de</strong> la Nouvelle-Angleterre y<br />

a été encouragée <strong>dans</strong> l'espoir qu'ils représenteraient un<br />

marché pour les pro<strong>du</strong>its locaux, permettant ainsi <strong>de</strong><br />

maintenir les colons acadiens sur leurs terres. Toutefois,<br />

les colons <strong>de</strong> la Nouvelle-Angleterre manifestent<br />

peu d'intérêt pour ce genre <strong>de</strong> commerce, par contre ils<br />

font pour leur propre compte d'excellentes récoltes <strong>dans</strong><br />

les eaux acadiennes. Lorsque la guerre éclate entre la<br />

France et l'Angleterre en 1689, les hostilités entre les<br />

<strong>de</strong>ux parties existent déjà en Acadie <strong>de</strong>puis plusieurs<br />

années, la Nouvelle-Angleterre dominant la pêche locale<br />

et pillant souvent les bateaux acadiens. Cependant,<br />

les Français ne tar<strong>de</strong>nt pas à répliquer et pendant la<br />

première année <strong>de</strong> la guerre seulement, la France est<br />

supposée avoir confisqué 54 <strong>de</strong>s 60 ketches <strong>de</strong> pêche en<br />

provenance <strong>de</strong> Salem.'<br />

Même après le retour <strong>de</strong> la paix en Europe avec la<br />

signature <strong>du</strong> traité <strong>de</strong> Ryswick en 1697, le calme ne<br />

revient pas pour autant <strong>dans</strong> la pêche acadienne. Villebon,<br />

écrivant au gouverneur <strong>du</strong> Massachusetts, lui propose,<br />

en matière <strong>de</strong> pêche, le maintien d'un état <strong>de</strong><br />

neutralité entre les <strong>de</strong>ux colonies; cette proposition aurait<br />

pu se concrétiser si Villebon n'avait pas stipulé <strong>dans</strong><br />

sa lettre que les colons <strong>de</strong> la Nouvelle-Angleterre ne<br />

<strong>de</strong>vaient pas pêcher <strong>dans</strong> les eaux situées à proximité <strong>de</strong><br />

la côte acadienne tant que toute cette question <strong>de</strong>s droits<br />

n'aurait pas été tranchée par Londres et Paris." C'est<br />

une condition que les colons <strong>de</strong> la Nouvelle-Angleterre<br />

refusent, et pour finir Villebon reçoit l'ordre <strong>du</strong> Roi <strong>de</strong><br />

France <strong>de</strong> saisir tous les bateaux anglais pêchant à l'est<br />

<strong>de</strong> la rivière Kennebec.' À l'encontre <strong>de</strong> la nouvelle<br />

politique, les pêcheurs <strong>de</strong>s colonies britanniques continuent<br />

<strong>de</strong> pêcher <strong>dans</strong> les eaux limitrophes <strong>de</strong>s postes<br />

et <strong>de</strong>s forts acadiens, et vers 1700 ils n'ont pas moins<br />

<strong>de</strong> 300 bateaux en activité <strong>dans</strong> la région.'<br />

Il est évi<strong>de</strong>nt que les Acadiens ne sont pas trop<br />

pressés <strong>de</strong> s'engager <strong>dans</strong> l'entreprise pourtant profitable<br />

<strong>de</strong> la pêche commerciale. Villebon déclare en<br />

1699 que le potentiel halieutique <strong>du</strong> bassin Minas est<br />

considérable, niais ajoute que cela n'a pas gran<strong>de</strong> utilité<br />

étant donné que les marchés sont encore inexistants.'<br />

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