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Le saumon de l'Atlantique dans l'histoire de l'Amérique du Nord

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grands ouvrages en pierres en forme d'entonnoir qui<br />

retiennent le poisson <strong>dans</strong> les rivières; et pratiquement<br />

toutes les autres tribus emploient un certain type <strong>de</strong><br />

barrières à poisson pour faciliter les captures sur les<br />

côtes, <strong>dans</strong> les estuaires et <strong>dans</strong> les cours d'eau.<br />

La majorité <strong>de</strong>s barrières construites par les aborigènes<br />

font toute la largeur <strong>du</strong> cours d'eau. Pendant<br />

leur migration, <strong>de</strong> grands nombres <strong>de</strong> poissons s'y heurtent<br />

et sont facilement capturés au harpon; certaines<br />

barrières ont <strong>de</strong>s ouvertures par lesquelles les petits<br />

poissons s'intro<strong>du</strong>isent <strong>dans</strong> <strong>de</strong>s paniers ou casiers en<br />

osier, qui ont la forme d'un cône et dont la plus gran<strong>de</strong><br />

extrémité est fixée à l'ouverture pratiquée <strong>dans</strong> l'ouvrage.<br />

En 1593, Richard Fisher est sans doute le premier<br />

à décrire les barrières construites sur les cours d'eau en<br />

bor<strong>du</strong>re <strong>de</strong> la côte nord-est : « . .. en nous dirigeant un<br />

peu plus à l'intérieur <strong>de</strong>s terres, nous avons observé <strong>de</strong>s<br />

étangs circulaires artificiels, fabriqués par les autochtones<br />

pour y conserver le poisson, et <strong>dans</strong> lesquels ils<br />

sont construit <strong>de</strong>s barrières pour faciliter sa capture ». 9 '<br />

L'on croit que ces barrières sont érigées sur la rivière<br />

Margaree. Nicolas Denys, qui crée plusieurs postes <strong>de</strong><br />

traite en Acadie au milieu <strong>de</strong>s années 1600, décrit les<br />

barrières <strong>de</strong> la façon suivante* :<br />

Ils fe fervent encore d'une autre invention au plus étroit<br />

<strong>de</strong>s rivieres où il y a le moins d'eau, ils font une<br />

paliffa<strong>de</strong> <strong>de</strong> bois tout au travers <strong>de</strong> la riviere pour<br />

empefcher le poiffon <strong>de</strong> paffer, & au milieu ils laiffent<br />

une ouverture, en laquelle ils mettent <strong>de</strong>s naffes faites<br />

comme celles <strong>de</strong> France, en forte qu'il faut <strong>de</strong> neceffité<br />

que le poiffon donne <strong>de</strong><strong>dans</strong> : ces naffes qui font plus<br />

gran<strong>de</strong>s que les noftres, ils les levent <strong>de</strong>ux ou trois fois<br />

le jour, il s'y trouve toûjours <strong>du</strong> poiffon, c'eft au Printemps<br />

que le poiffon monte, & l'Automne il <strong>de</strong>cend &<br />

retourne à la mer, pour lors ils mettoient l'embouchure<br />

<strong>de</strong> leur naffes <strong>de</strong> l'autre cofté. 92<br />

Outre les barrières fluviales, les Micmacs <strong>de</strong> la<br />

Nouvelle-Écosse construisent surtout <strong>de</strong>s barrières côtières<br />

et estuariennes le long <strong>de</strong> la côte <strong>de</strong> la baie <strong>de</strong><br />

Fundy. Au début <strong>de</strong>s années 1600, Marc <strong>Le</strong>scarbot<br />

décrit <strong>de</strong> la façon suivante <strong>de</strong>s ouvrages similaires et<br />

l'importance <strong>de</strong>s captures qui y sont faites :<br />

<strong>Le</strong>s autochtones construisent <strong>de</strong>s barrières ou barrages<br />

<strong>dans</strong> <strong>de</strong>s ruisseaux; ils les dressent <strong>de</strong> sorte qu'ils sont<br />

presque droits, les contreboutent au moyen <strong>de</strong> barres <strong>de</strong><br />

bois et pratiquent une ouverture pour permettre le passage<br />

<strong>de</strong>s poissons; à marée basse, les poissons piégés<br />

sont si nombreux que les Indiens en laissent pourrir sur<br />

place. 93<br />

En 1701, le Sieur <strong>de</strong> Dièreville donne une autre <strong>de</strong>scription<br />

<strong>de</strong>s barrières à Port Royal :<br />

*Cette citation est extraite telle quelle <strong>du</strong> texte original.<br />

... <strong>de</strong>s pieux sont dressés côte à côte à l'embouchure<br />

<strong>de</strong>s ruisseaux et cours d'eau <strong>dans</strong> lesquels avance la<br />

mer et, à marée haute, les poissons les franchissent<br />

pour aller se nourrir <strong>du</strong> limon <strong>de</strong>s marais. À la fin <strong>du</strong><br />

flux, lorsqu'ils manquent d'eau, les poissons se laissent<br />

ramener par le reflux, mais ils se heurtent aux<br />

pieux car le niveau <strong>de</strong> l'eau est trop faible et ils peuvent<br />

alors être capturés. 94<br />

Chez les pêcheurs aborigènes, le terme « barrière »<br />

(en angl. weir) désigne une barrière fixe faite <strong>de</strong> matériaux<br />

assez lourds comme <strong>du</strong> bois, <strong>de</strong>s pierres ou <strong>de</strong>s<br />

fagots tandis que le « filet » est un engin qui permet <strong>de</strong><br />

retenir, trapper, piéger ou prendre par les ouïes les<br />

poissons et est fabriqué <strong>de</strong> fils ou <strong>de</strong> cor<strong>de</strong>s légers qui<br />

sont entortillés ou attachés par <strong>de</strong>s noeuds pour former<br />

<strong>de</strong>s mailles. Puisque le filet est relativement léger, il<br />

peut être fixe ou mobile.<br />

Malheureusement, les documents qui mentionnent<br />

les premiers filets <strong>de</strong>s aborigènes ne décrivent ni leur<br />

fabrication ni leur mo<strong>de</strong> d'utilisation et les renseignements<br />

détaillés dont on dispose à cet effet datent<br />

d'une époque où les engins et les métho<strong>de</strong>s <strong>de</strong>s Européens<br />

sont déjà largement répan<strong>du</strong>s parmi les autochtones.<br />

Toutefois, on sait que les Indiens utilisent un<br />

type <strong>de</strong> senne et peut-être aussi <strong>de</strong>s filets maillants<br />

simples, faits <strong>de</strong> lanières d'écorce ou <strong>de</strong> racines, <strong>de</strong><br />

petites branches ou <strong>de</strong> jeunes arbres, <strong>de</strong> ban<strong>de</strong>s <strong>de</strong><br />

peaux ou <strong>de</strong> tendons d'animaux. Même si un tel engin<br />

est peut-être trop rudimentaire pour être classé <strong>dans</strong> la<br />

catégorie <strong>de</strong>s filets, il y a d'autres preuves que les<br />

Indiens fabriquent <strong>de</strong>s filets plus perfectionnés. D'après<br />

Erhart Rostlund, les Indiens sont familiarisés avec le<br />

noeud universel <strong>de</strong> filet avant l'arrivée <strong>de</strong>s Européens'<br />

et, <strong>dans</strong> leurs anciens campements <strong>de</strong> pêche, les archéologues<br />

ont retrouvé <strong>de</strong> petites pierres portant <strong>de</strong>s rainures<br />

et <strong>de</strong>s encoches qui, selon eux, servent alors <strong>de</strong><br />

plomb pour les engins <strong>de</strong> pêche relativement légers<br />

similaires à un filet. Ces pierres sont presque i<strong>de</strong>ntiques<br />

aux plombs sculptés <strong>dans</strong> la pierre <strong>de</strong> savon que les<br />

pêcheurs <strong>de</strong>s temps mo<strong>de</strong>rnes fixent à leurs filets à<br />

<strong>saumon</strong> <strong>dans</strong> le nord <strong>du</strong> Nouveau-Brunswick.' Parmi<br />

les outils <strong>de</strong>s aborigènes que Jean Cabot rapporte en<br />

Angleterre <strong>de</strong> Terre-Neuve, se trouve « une aiguille<br />

pour fabriquer les filets », 97 soit un instrument qui n'est<br />

pas nécessaire pour la construction <strong>de</strong>s barrages ou<br />

autres barrières rudimentaires; ces aiguilles ressemblent<br />

peut-être à celles qui ont été exhumées d'un ancien site<br />

d'Indiens à Port au Choix, à Terre-Neuve, qui étaient<br />

faites <strong>de</strong> fins morceaux d'ossements d'oiseau et dont le<br />

chas mesure moins d'un <strong>de</strong>mi-millimètre."<br />

La toute première <strong>de</strong>scription d'un filet nous<br />

provient <strong>de</strong> Jacques Cartier qui, en 1534, dépeint la<br />

pêcherie <strong>de</strong>s Indiens <strong>dans</strong> la baie <strong>de</strong> Gaspé : « Nous<br />

avons trouvé une gran<strong>de</strong> quantité <strong>de</strong> maquereaux qu'ils<br />

avaient capturés près <strong>de</strong> la côte au moyen <strong>de</strong> filets <strong>de</strong><br />

pêche faits <strong>de</strong> chanvre qui croît <strong>dans</strong> le pays où ils<br />

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