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Le saumon de l'Atlantique dans l'histoire de l'Amérique du Nord

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son achètent les intérêts <strong>de</strong> George Cartwright aux environs<br />

<strong>de</strong> 1785, époque à laquelle ils possè<strong>de</strong>nt six stations<br />

<strong>de</strong> pêche au <strong>saumon</strong> qui emploient trente hommes<br />

au Labrador : St-Mo<strong>de</strong>ste, havre Mary, rivière St-<br />

François, baie Black Bear, anse Sand Hill et baie Sandwich.<br />

Cette année-là, les prises totales s'élèvent à 161<br />

tierces."' À cette époque, la société Hunt et Henley<br />

pêche également <strong>dans</strong> les cours d'eau <strong>du</strong> Labrador, et la<br />

compagnie <strong>de</strong> Jersey <strong>de</strong> Simon <strong>du</strong> Bois, <strong>dans</strong> la Rivière<br />

aux Saumons. Entre 1783 et 1800, <strong>de</strong>s compagnies <strong>de</strong><br />

Jersey s'établissent à Blanc Sablon et à Forteau, et<br />

d'autres pêcheurs travaillent <strong>dans</strong> les stations <strong>du</strong> havre<br />

Henley, <strong>du</strong> havre-Grady et <strong>de</strong> l'Anse-au-Loup.'" En<br />

fait, l'expansion <strong>de</strong>s intérêts terre-neuviens <strong>dans</strong> la pêcherie<br />

<strong>du</strong> Labrador et <strong>de</strong> la côte vers Québec est si<br />

rapi<strong>de</strong> que toute la région au nord <strong>du</strong> détroit <strong>de</strong> Mingan<br />

est cédée à Terre-Neuve en 1809 par décision <strong>du</strong> Parlement<br />

britannique. L'île d'Anticosti est également<br />

comprise <strong>dans</strong> cette cession."' <strong>Le</strong>s sociétés terreneuviennes<br />

ne sont pas les seules à vouloir tirer profit<br />

<strong>de</strong> la pêche au <strong>saumon</strong> au Labrador; en effet, les habitants<br />

<strong>du</strong> Bas-Canada et les Néo-Écossais tentent eux<br />

aussi <strong>de</strong> combler le vi<strong>de</strong> laissé par les Américains sur la<br />

côte nord.<br />

<strong>Le</strong>s registres <strong>de</strong>s exportations donnent une bonne<br />

idée <strong>de</strong> l'expansion rapi<strong>de</strong> <strong>de</strong>s activités commerciales<br />

sur la côte <strong>du</strong> Labrador et <strong>du</strong> nord-est <strong>du</strong> golfe. En<br />

1804, les prises effectuées au Labrador représentent<br />

14 % <strong>de</strong>s exportations combinées <strong>du</strong> Labrador et <strong>de</strong><br />

Terre-Neuve; en 1815, elles sont passées à 36%. Encore<br />

faut-il préciser que ce pourcentage est partiel, car<br />

une partie <strong>de</strong>s prises effectuées au Labrador n'apparaît<br />

pas <strong>dans</strong> les registres, étant donné l'impossibilité d'obtenir<br />

la quantité <strong>de</strong> poissons capturés par les <strong>saumon</strong>iers<br />

américains et néo-écossais à cette époque. <strong>Le</strong> pourcentage<br />

<strong>de</strong>s prises effectuées au Labrador est d'autant<br />

plus significatif que la pêche s'était également intensifiée<br />

à Terre-Neuve.'"<br />

<strong>Le</strong>s registres <strong>de</strong>s exportations pour la pério<strong>de</strong> allant<br />

d'octobre 1786 à octobre 1791 indiquent que 97%<br />

<strong>de</strong>s prises effectuées à Terre-Neuve et au Labrador sont<br />

exportés vers l'Italie, le Portugal et Madère. En dépit <strong>de</strong><br />

la forte <strong>de</strong>man<strong>de</strong> américaine en poissons, il était quelque<br />

peu difficile d'intro<strong>du</strong>ire <strong>de</strong>s pro<strong>du</strong>its anglais sur<br />

les marchés américains, car le Parlement britannique<br />

avant interdit tout commerce avec les États-Unis, à<br />

moins <strong>de</strong> détenir un permis spécial. Malgré tout, pour<br />

quiconque était titulaire d'un permis <strong>de</strong> pêche et d'une<br />

licence commerciale américaine, l'entreprise était lucrative<br />

et en particulier, comme l'écrit Simeon Perkins<br />

en 1788, pour « ceux qui pêchent le <strong>saumon</strong> et le maquereau,<br />

Boston et d'autres villes américaines étant actuellement<br />

les meilleurs marchés pour ces pro<strong>du</strong>its »." 6<br />

Pendant ce temps-là, les Américains se sont <strong>de</strong><br />

nouveau aventurés sur les lieux <strong>de</strong> pêche <strong>du</strong> Labrador et<br />

<strong>de</strong> Terre-Neuve. Vers le début <strong>de</strong>s années 1800, John<br />

86<br />

Stewart fait la constatation suivante « <strong>Le</strong>s pêcheries <strong>de</strong><br />

<strong>saumon</strong> établies sur les cours d'eau <strong>de</strong> la côte <strong>du</strong> Labrador<br />

et <strong>du</strong> détroit <strong>de</strong> Belle-Isle sont principalement entre<br />

les mains <strong>de</strong>s Américains, tout comme une bonne partie<br />

<strong>du</strong> commerce avec les Indiens sur la côte, sans autre<br />

droit <strong>dans</strong> les <strong>de</strong>ux cas que la tolérance ». 1" Siméon<br />

Perkins souligne que les Américains ont le monopole<br />

exclusif <strong>de</strong> la pêche à la morue et déplore la concurrence<br />

existante. De plus, la pêcherie <strong>de</strong> <strong>saumon</strong> est <strong>dans</strong><br />

un tel état <strong>de</strong> dégradation qu'il conclut qu'elle est près<br />

<strong>de</strong> disparaître dès 1804 en raison <strong>de</strong> la surpêche. 1" La<br />

participation américaine aux activités <strong>de</strong> la pêche en<br />

général, et à la pêche au <strong>saumon</strong> en particulier est<br />

importante, mais il est impossible d'obtenir une estimation<br />

quantitative <strong>de</strong>s prises effectuées par les Yankees.<br />

Lorsque l'on <strong>de</strong>man<strong>de</strong> au capitaine Innis <strong>du</strong> sloop<br />

Chil<strong>de</strong>rs, <strong>de</strong> la station <strong>du</strong> Labrador, d'estimer la quantité<br />

<strong>de</strong> <strong>saumon</strong>s pêchés par les Américains <strong>du</strong>rant la<br />

saison <strong>de</strong> 1806, il laisse entendre l'impossibilité d'une<br />

évaluation en formulant cette réponse laconique « Peu<br />

probable ». 139<br />

L'animosité envers les Américains grandit,<br />

notamment <strong>du</strong>rant la guerre cle 1812, et suscite <strong>de</strong>s<br />

plaintes verbales, toutes dirigées contre leurs activités<br />

<strong>de</strong>structrices au Labrador. En 1814, le vice-amiral<br />

Richard Godwin Keats, gouverneur <strong>de</strong> Terre-Neuve, se<br />

plaint <strong>de</strong>s moindres irrégularités commises par les<br />

Américains et va même jusqu'à indiquer que le rejet <strong>de</strong><br />

poissons <strong>de</strong> qualité inférieure par les Yankees <strong>dans</strong> les<br />

eaux <strong>du</strong> Labrador<br />

a <strong>de</strong>s effets néfastes sur la pêcherie <strong>de</strong> <strong>saumon</strong> avoisinante<br />

<strong>de</strong> même que sur la pêcherie <strong>de</strong> capelan.. . <strong>Le</strong>s<br />

Américains nous réclament et nous disputent le droit <strong>de</strong><br />

propriété <strong>de</strong> la pêcherie dc <strong>saumon</strong> et, en tendant leurs<br />

filets à l'embouchure <strong>de</strong>s cours d'eau, ils empêchent la<br />

moitié <strong>de</strong>s poissons <strong>de</strong> déposer leurs oeufs.<br />

En dépit <strong>de</strong> la guerre, les Américains continuent à<br />

pêcher le <strong>saumon</strong> <strong>dans</strong> la région, persuadés que leurs<br />

droits n'ont pas été abolis en raison <strong>de</strong>s hostilités et que<br />

les actes <strong>de</strong> belligérance posés par les <strong>de</strong>ux parties<br />

n'entravent en rien la poursuite inoffensive <strong>de</strong> la pêche.<br />

En fait, on estime que <strong>de</strong> toutes les prises effectuées<br />

<strong>dans</strong> les eaux terre-neuviennes en 1814, 50% concernaient<br />

<strong>de</strong>s pêcheurs américains, 15% <strong>de</strong>s pêcheurs<br />

français et 35 % <strong>de</strong>s pêcheurs britanniques. En réalité,<br />

le déglacement plus rapi<strong>de</strong> <strong>de</strong>s eaux à l'ouest <strong>de</strong> Terre-<br />

Neuve et <strong>du</strong> Labrador avantageait nettement les Américains<br />

par rapport aux Européens. 141<br />

Contrairement aux commentaires pessimistes <strong>de</strong><br />

Perkins sur l'état <strong>de</strong> la pêcherie <strong>de</strong> <strong>saumon</strong> <strong>dans</strong> le golfe<br />

Saint-Laurent et au Labrador en 1804, les registres <strong>de</strong>s<br />

exportations révèlent une augmentation constante <strong>de</strong>s<br />

prises <strong>du</strong>e aux activités <strong>de</strong>s Américains et à la participation<br />

accrue <strong>de</strong>s Britanniques. En 1807, le gou-

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