27.06.2013 Views

Le saumon de l'Atlantique dans l'histoire de l'Amérique du Nord

Le saumon de l'Atlantique dans l'histoire de l'Amérique du Nord

Le saumon de l'Atlantique dans l'histoire de l'Amérique du Nord

SHOW MORE
SHOW LESS

You also want an ePaper? Increase the reach of your titles

YUMPU automatically turns print PDFs into web optimized ePapers that Google loves.

Autre problème persistant c'est que «jusqu'ici, tous les<br />

Acadiens. . . se sont intéressés davantage au commerce<br />

<strong>du</strong> castor et à la vente <strong>de</strong> l'eau <strong>de</strong> vie qu'à l'établissement<br />

d'une entreprise <strong>de</strong> pêche qui, pourtant, offre<br />

l'avantage le plus certain et le plus <strong>du</strong>rable... ».' En<br />

outre, le sieur <strong>de</strong> Gargas écrivant <strong>de</strong> Port-Royal à la fin<br />

<strong>de</strong>s années 1600 décrit une inspection officielle <strong>de</strong> la<br />

pêche locale qu'il a effectuée :<br />

Mes instructions comportaient également une brève<br />

inspection <strong>de</strong> la pêche. Cet ordre a été facile à exécuter<br />

étant donné que <strong>dans</strong> toute l'Acadie il n'y a que quatre<br />

ou cinq habitants qui pêchent la morue et Ic maquereau.<br />

En fait, les Acadiens négligent la pêche. .. En premier<br />

lieu, il n'y a personne pour acheter leur pro<strong>du</strong>it... (et<br />

en second lieu) ils n'ont pas les engins nécessaires.. .<br />

qu'importe que la rivière (à Port-Royal) regorge <strong>de</strong><br />

poissons, il n'y a pas trois colons qui possè<strong>de</strong>nt un<br />

filet... (le nombre <strong>de</strong> filets) en Acadie ne dépasse par<br />

six. 47<br />

<strong>Le</strong>s filets sont rares mais cela n'empêche pas quelques<br />

particuliers <strong>de</strong> la région <strong>de</strong> Port-Royal et <strong>de</strong><br />

Chignectou d'utiliser les barrières à poisson. La seine<br />

est parfois utilisée pour capturer le <strong>saumon</strong>, comme<br />

l'indiquent les rapports <strong>de</strong> Denys, mais ces engins ne<br />

sont généralement pas accessibles aux habitants et<br />

restent plutôt limités aux plus grosses entreprises <strong>de</strong><br />

pêche. Lorsque le colon acadien pratique la pêche <strong>de</strong><br />

façon limitée, il emploie le harpon — engin considéré<br />

comme supérieur à tout autre.<br />

Si, au terme <strong>du</strong> XVII' siècle, <strong>l'histoire</strong> sociale et<br />

économique <strong>de</strong> l'Acadie en est encore à son tout début,<br />

la connaissance <strong>de</strong> nombreuses ressources naturelles<br />

n'en était pas moins très complète. Si l'on pouvait<br />

réunir toutes les données connues à cette époque concernant<br />

le <strong>saumon</strong> et sa distribution, il y aurait peu <strong>de</strong><br />

cours d'eau où sa présence ne serait pas connue et son<br />

abondance, pas exploitée. Néanmoins, <strong>dans</strong> la colonie<br />

vivant <strong>de</strong> l'agriculture <strong>de</strong> subsistance, l'importance<br />

économique <strong>du</strong> <strong>saumon</strong> reste marginale là où la pêche<br />

commerciale, qui met l'accent sur la morue, est dominée<br />

par quelques sociétés françaises — et <strong>de</strong> nombreux<br />

intrus <strong>de</strong> la Nouvelle-Angleterre.<br />

Rivière <strong>du</strong> Canada<br />

Tant Cartier que Champlain parlent <strong>dans</strong> leurs<br />

chroniques <strong>de</strong> l'existence <strong>du</strong> <strong>saumon</strong> <strong>dans</strong> le Saint-<br />

Laurent et certains <strong>de</strong> ces affluents à la fin <strong>du</strong> XVI' et<br />

au débitt <strong>du</strong> XVII' siècle, et les explorations ultérieures<br />

vers les années 1650 révèlent une gran<strong>de</strong> abondance <strong>de</strong><br />

poissons <strong>dans</strong> les eaux côtières et intérieures <strong>de</strong>s provinces<br />

actuelles <strong>du</strong> Québec et <strong>de</strong> l'Ontario. Champlain<br />

consacre un temps et <strong>de</strong>s énergies considérables à tenter<br />

d'intéresser la cour <strong>de</strong> France aux pêches. Par exemple,<br />

juste avant sa mort en 1635, il parle <strong>dans</strong> sa <strong>de</strong>rnière<br />

32<br />

lettre au cardinal Richelieu <strong>de</strong> la variété considérable,<br />

<strong>de</strong> la gran<strong>de</strong> abondance et <strong>de</strong> l'ampleur extraordinaire<br />

<strong>de</strong>s ressources halieutiques à l'intérieur <strong>du</strong> Canada. 48<br />

Toutefois, la pêche au Canada reste passablement négligée,<br />

en grandie partie à cause <strong>de</strong> l'expansion rapi<strong>de</strong><br />

<strong>du</strong> commerce <strong>de</strong>s fourrures — « le moteur <strong>de</strong> la vie en<br />

Nouvelle-France », qui ne laisse guère d'hommes et<br />

d'efforts disponibles pour la poursuite d'autres entreprises.<br />

<strong>Le</strong>s Français signalent les premières pêcheries<br />

<strong>de</strong> <strong>saumon</strong> <strong>de</strong>s aborigènes à partir <strong>de</strong> la rivière<br />

Saguenay au Québec jusqu'à la rivière Credit en<br />

Ontario et au sud jusqu'au lac Champlain, mais la majorité<br />

<strong>de</strong> ces régions d'une gran<strong>de</strong> richesse reste entre<br />

les mains <strong>de</strong>s Indiens et sont exploitées seulement au<br />

minimum par les Français pendant près d'un siècle.<br />

Parmi les premiers rapports détaillés sur le <strong>saumon</strong><br />

et sa pêche au Canada figurent les écrits <strong>de</strong>s missionnaires<br />

jésuites arrivés en Nouvelle-France en 1625,<br />

établis à Québec et portant le flambeau <strong>de</strong> la foi aux<br />

villages indiens <strong>dans</strong> tout le bassin <strong>du</strong> Saint-Laurent.<br />

Rapi<strong>de</strong>ment, les missionnaires apprennent <strong>de</strong>s Indiens<br />

la valeur <strong>de</strong> la pêche <strong>dans</strong> la région et commencent à<br />

exploiter cette ressource pour assurer leur propre subsistance.<br />

Dans leur « relation » <strong>de</strong> 1646, il est fait<br />

mention <strong>de</strong> la pêche au <strong>saumon</strong> <strong>de</strong> l'Ordre sur les rives<br />

<strong>du</strong> Saint-Laurent. <strong>Le</strong>s missionnaires signalent qu'à<br />

Québec leur pêche débute généralement vers la mi-mai<br />

mais que, en 1646,1e premier <strong>saumon</strong> n'est capturé que<br />

le 11 juin. À la fin <strong>de</strong> juillet, 200 poissons sont pêchés<br />

et salés <strong>dans</strong> <strong>de</strong>s tonnelets pour les pères en prévision <strong>de</strong><br />

l'hiver. Ils mentionnent qu'il y a <strong>dans</strong> leur magasin<br />

<strong>de</strong>ux tonnelets <strong>de</strong> <strong>saumon</strong> qui leur ont été expédiés<br />

d'une pêcherie, « en plus <strong>de</strong> quatre <strong>de</strong> notre propre<br />

pêcherie et d'un <strong>de</strong> la part <strong>de</strong> monsieur le Gouverneur<br />

<strong>de</strong> l'Isle aux Oyes ». 49 <strong>Le</strong> premier <strong>saumon</strong> en 1647 est<br />

pêché le 10 mai et l'année suivante, le 18 mai; au<br />

moment où la saison <strong>de</strong> pêche prend fin en 1648, c'està-dire<br />

pendant la troisième semaine <strong>de</strong> juillet, les jésuites<br />

ont salé 18 tonnelets <strong>de</strong> <strong>saumon</strong> — probablement<br />

900 poissons.'<br />

<strong>Le</strong>s missionnaires jésuites sont amenés par leurs<br />

tournées à courvrir un vaste territoire <strong>du</strong> bassin versant<br />

<strong>du</strong> Saint-Laurent, et ils décrivent fréquemment en détail<br />

leurs contacts avec la faune <strong>de</strong> la région. Par exemple,<br />

ils racontent que la rivière Chicoutimi, un affluent <strong>du</strong><br />

Saguenay, est recherchée par les Indiens pour la<br />

pêche au <strong>saumon</strong>, cette rivière étant profon<strong>de</strong> et<br />

«poissonneuse». > ' En 1656, un groupe <strong>de</strong> jésuites en<br />

mission apures <strong>de</strong>s Onondagas à la rivière Oswego<br />

souffre beaucoup <strong>du</strong> manque <strong>de</strong> nourriture jusqu'à ce<br />

que<br />

Il (Dieu) remplisse <strong>de</strong> nouveau la rivière <strong>de</strong> poissons<br />

expressément pour nous; car cette même nuit, nos<br />

hommes ont capturé 20 gros <strong>saumon</strong>s et <strong>de</strong> la barbotte.<br />

Et le 10 <strong>de</strong> ce même mois <strong>de</strong> juillet, en franchissant <strong>de</strong>s

Hooray! Your file is uploaded and ready to be published.

Saved successfully!

Ooh no, something went wrong!