27.06.2013 Views

Le saumon de l'Atlantique dans l'histoire de l'Amérique du Nord

Le saumon de l'Atlantique dans l'histoire de l'Amérique du Nord

Le saumon de l'Atlantique dans l'histoire de l'Amérique du Nord

SHOW MORE
SHOW LESS

Create successful ePaper yourself

Turn your PDF publications into a flip-book with our unique Google optimized e-Paper software.

epro<strong>du</strong>it et élevé artificiellement <strong>de</strong>s poissons dès<br />

1804, mais ses affirmations comportent trop <strong>de</strong> bizarreries<br />

pour ne pas éveiller <strong>de</strong>s soupçons. Finalement, il se<br />

discrédite totalement lui-même et perd toute chance <strong>de</strong><br />

<strong>de</strong>venir le premier pisciculteur <strong>de</strong> <strong>l'Amérique</strong>, en déclarant<br />

qu'il a réussi à obtenir <strong>du</strong> frai à partir d'oeufs <strong>de</strong><br />

perche séchés."'<br />

Garlick et Ackley poursuivent leurs expériences<br />

jusqu'en 1857, et <strong>dans</strong> tous les États <strong>de</strong> l'Union on<br />

s'intéresse <strong>de</strong> trèsprès à leurs efforts. Un certain Seth<br />

Green <strong>du</strong> comté <strong>de</strong> Livingston, <strong>dans</strong> l'État <strong>de</strong> New<br />

York, commence en août 1864 à élever <strong>de</strong>s truites,<br />

puis, plus tard, <strong>de</strong>s <strong>saumon</strong>s. Il <strong>de</strong>vient le premier éleveur<br />

connu <strong>de</strong> <strong>saumon</strong>s aux États-Unis.' Mais, les<br />

tentatives <strong>de</strong>s Américains en pisciculture sont en général<br />

largement dépassées par les excellents résultats <strong>de</strong><br />

Samuel Wilmot, avec la repro<strong>du</strong>ction <strong>du</strong> <strong>saumon</strong> en<br />

Ontario, comme on l'a vu précé<strong>de</strong>mment.<br />

Pêche à la ligne<br />

Charles Hallock , qui commence au milieu <strong>de</strong>s années<br />

1840 une longue carrière <strong>de</strong> pêcheur à la ligne,<br />

passionné et enthousiaste, écrit que « la pêche à la mouche<br />

en est encore à ses premiers balbutiements. C'est un<br />

art presque inconnu en Amérique, et peu pratiqué en<br />

Angleterre. L'école avant-gardiste <strong>du</strong> vieil Izaak et <strong>de</strong><br />

Kit North n'a pro<strong>du</strong>it que peu <strong>de</strong> diplômés avec<br />

mention ». 265 Donc, à cette époque, la pêche à la mouche<br />

est peu pratiquée en Gran<strong>de</strong>-Bretagne, principalement<br />

à cause <strong>du</strong> fait que ce sport est très exigeant; bien<br />

qu'il y ait <strong>de</strong>s pêcheurs à la ligne pour le <strong>saumon</strong> presque<br />

partout <strong>dans</strong> le royaume, leur nombre <strong>de</strong>meure<br />

limité pour une raison majeure — il faut disposer <strong>de</strong><br />

beaucoup <strong>de</strong> temps libre pour s'adonner à cette activité.<br />

Dans les années 1840, il s'agit-là d'un privilège dont<br />

ne jouissent que très peu <strong>de</strong> personnes en Gran<strong>de</strong>-<br />

Bretagne. La pêche à la ligne n'est donc pas un sport <strong>de</strong><br />

masse, mais plutôt un divertissement pour les riches ou<br />

ceux qui bénéficient d'une situation sociale favorable.<br />

Aux quelques privilégiés <strong>de</strong> la pêche à la ligne,<br />

l'Écosse convient très bien pour l'initiation et les exercices<br />

pratiques; il y a chaque année <strong>de</strong> plus en plus<br />

d'initiés, qui passent leur épreuve finale sur la Tweed,<br />

la Tay, la Thorso, ou l'une <strong>de</strong>s autres vingt rivières<br />

écossaises <strong>de</strong> choix. Parmi les nouveaux a<strong>de</strong>ptes, il y a<br />

<strong>de</strong>s officiers <strong>de</strong> l'armée britannique, qui constituent<br />

l'avant-gar<strong>de</strong> <strong>de</strong> ceux qui pratiqueront cet art <strong>dans</strong> les<br />

colonies <strong>de</strong> <strong>l'Amérique</strong> britannique.<br />

Mais, en Amérique, la pêche <strong>du</strong> <strong>saumon</strong> à la ligne<br />

est lente à démarrer et à se développer; bien que les<br />

inégalités sociales soient à nouveau en partie à l'origine<br />

<strong>de</strong> cette lente progression, il y a plusieurs autres facteurs<br />

qui éloignent <strong>de</strong> ce sport et qui le retar<strong>de</strong>nt considérablement<br />

par rapport à l'Europe. L'isolement et<br />

l'éloignement <strong>de</strong> beaucoup <strong>de</strong>s rivières à <strong>saumon</strong> <strong>de</strong><br />

<strong>l'Amérique</strong> <strong>du</strong> <strong>Nord</strong> ne constituent pas, <strong>de</strong> façon surprenante,<br />

les principales raisons qui découragent les<br />

pêcheurs à la ligne; ce qui les rebute bien davantage<br />

c'est qu'ils croient que le <strong>saumon</strong> américain est trop mal<br />

élevé pour attraper une mouche. . . 266.<br />

Comme on l'a déjà vu, Magrath écrit en 1833 que<br />

le <strong>saumon</strong> <strong>du</strong> lac Ontario est tellement bien nourri qu'il<br />

est très rare qu'on réussisse à le pêcher à la ligne et,<br />

jusqu'en 1855, on pense que c'est une vraie perte <strong>de</strong><br />

temps <strong>de</strong> pêcher à la ligne <strong>dans</strong> la rivière Saint-Jean.'<br />

Même à l'époque où les rivières Miramichi et Nepisiguit<br />

sont enfin acceptées comme pouvant éventuellement<br />

satisfaire les pêcheurs à la ligne, on évite toujours<br />

la Restigouche pour son manque <strong>de</strong> pro<strong>du</strong>ctivité; un<br />

pêcheur à la ligne va même jusqu'à dire que la valeur<br />

<strong>de</strong> la rivière en ce qui concerne le <strong>saumon</strong> est un<br />

mythe.268 La pêche à la ligne a généralement si mauvaise<br />

réputation que même les gentlemen sportifs que<br />

Hallock décrit comme "formés <strong>dans</strong> un esprit <strong>de</strong> légitimation<br />

<strong>du</strong> travail" en Amérique, se ren<strong>de</strong>nt au début en<br />

Écosse pour pêcher à la ligne leur <strong>saumon</strong>.'<br />

Bien que quelques gentlemen, aventuriers et militaires,<br />

considèrent que cela fait partie <strong>du</strong> jeu, d'affronter<br />

l'épais sous-bois, les hor<strong>de</strong>s <strong>de</strong> moustiques et les<br />

ban<strong>de</strong>s <strong>de</strong> branconniers, pour lancer leur ligne <strong>dans</strong> une<br />

rivière non encore profanée <strong>de</strong> la colonie, les pêcheurs<br />

plus fervents et plus aisés doutent sincèrement que<br />

<strong>l'Amérique</strong> <strong>du</strong> <strong>Nord</strong> puisse offrir au sportif cultivé et<br />

sérieux, l'environnement approprié, social ou autre,<br />

dont il a besoin.<br />

En outre, aux yeux <strong>de</strong>s habitants in<strong>du</strong>strieux <strong>de</strong>s<br />

colonies et <strong>de</strong>s états, cet « art » <strong>de</strong> la pêche à la mouche<br />

ne représente rien d'autre qu'une perte <strong>de</strong> temps et<br />

d'argent. Richard Dashwood écrit en parlant <strong>de</strong>s habitants<br />

<strong>de</strong>s colonies <strong>de</strong> <strong>l'Atlantique</strong> : « ces gens ne comprennent<br />

pas qu'on puisse se dépenser juste pour<br />

l'amour <strong>du</strong> sport — le dollar tout puissant est toujours<br />

présent <strong>dans</strong> leur l'esprit ». 2" Pour la gran<strong>de</strong> majorité<br />

<strong>de</strong> ces coloniaux, imbus <strong>de</strong> la valeur <strong>du</strong> travail et assez<br />

puritains, il est inconcevable qu'un indivi<strong>du</strong> puisse<br />

consacrer tellement <strong>de</strong> temps et d'argent à la capture <strong>de</strong><br />

quelques <strong>saumon</strong>s par une métho<strong>de</strong> ridicule comme la<br />

pêche à la ligne, alors qu'il est possible d'en pêcher<br />

rapi<strong>de</strong>ment <strong>de</strong>s milliers à la pointe ou au filet — et avec<br />

beaucoup moins d'efforts.<br />

En dépit <strong>de</strong> ces courants d'opinion, <strong>de</strong> plus en plus<br />

<strong>de</strong> touristes et <strong>de</strong> gentlemen d'Europe et <strong>de</strong>s États-Unis<br />

visitent les rivières à <strong>saumon</strong> <strong>de</strong> <strong>l'Amérique</strong> <strong>du</strong> <strong>Nord</strong><br />

britannique vers le milieu et la fin <strong>de</strong>s années 1850<br />

avec, comme résultat, que <strong>de</strong> plus en plus d'habitants,<br />

parmi les plus audacieux, sont localement eux aussi<br />

attirés par ce sport — même si fréquemment on les met<br />

en gar<strong>de</strong> contre tout enthousiasme excessif : « la pêche<br />

et la chasse, tout comme le jeu, sont <strong>de</strong>s chimères, et<br />

personne ne doit s'y adonner, encore moins les gens <strong>de</strong>s<br />

classes pauvres, au-<strong>de</strong>là <strong>de</strong> ses moyens ». 271 Beaucoup<br />

165

Hooray! Your file is uploaded and ready to be published.

Saved successfully!

Ooh no, something went wrong!