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CMJN de base

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Le Cycle <strong>de</strong> négociations <strong>de</strong> Doha offre <strong>de</strong> nombreux<br />

exemples illustrant le lien entre le commerce et les droits <strong>de</strong><br />

l’homme. Dernièrement, <strong>de</strong>ux pays développés ont présenté<br />

une proposition visant à durcir les dispositions et restrictions à<br />

l’exportation pour tous les Membres <strong>de</strong> l’OMC. Au début <strong>de</strong> la<br />

crise alimentaire, la Bolivie a annoncé une mesure <strong>de</strong> restriction<br />

<strong>de</strong>s exportations indispensable pour protéger le droit à la<br />

nourriture <strong>de</strong> la majorité pauvre <strong>de</strong> la population 10 , mesure qui<br />

aurait pu être affectée par cette proposition.<br />

Compte tenu <strong>de</strong> l’effet considérable <strong>de</strong>s politiques<br />

commerciales et économiques sur les droits civils, politiques,<br />

économiques, sociaux et culturels, il est manifestement temps<br />

<strong>de</strong> modifi er les règles économiques et commerciales mondiales.<br />

C’est pourquoi la Bolivie a soumis <strong>de</strong>ux propositions dans le<br />

cadre <strong>de</strong>s négociations à l’OMC. Elle a d’abord <strong>de</strong>mandé qu’il<br />

soit fait référence à l’ai<strong>de</strong> alimentaire, pour préciser qu’elle<br />

ne doit jamais créer <strong>de</strong> dépendance alimentaire dans le pays<br />

bénéfi ciaire, et que le maintien <strong>de</strong> l’indépendance soit supervisé<br />

par les organismes <strong>de</strong>s Nations Unies. 11 Ensuite, <strong>de</strong> concert<br />

avec le Venezuela, Cuba et le Nicaragua, la Bolivie a <strong>de</strong>mandé<br />

que les services <strong>de</strong> <strong>base</strong>, comme la santé, l’éducation, l’eau,<br />

l’énergie et les télécommunications (tous indispensables pour la<br />

réalisation <strong>de</strong>s droits humains) soient traités dans une catégorie<br />

différente, voire retirés complètement <strong>de</strong>s négociations. Les<br />

organismes <strong>de</strong> la société civile se sont montrés très favorables<br />

à cette initiative.<br />

En conclusion, Mme Navarro a souligné que les droits <strong>de</strong><br />

l’homme <strong>de</strong>vaient prévaloir sur le commerce: le commerce est<br />

un moyen, non une fi n en soi, et les droits <strong>de</strong> l’homme <strong>de</strong>vraient<br />

être au centre <strong>de</strong>s activités et <strong>de</strong>s négociations <strong>de</strong> l’OMC.<br />

(d) Ibrahim Salama – Chef du Service <strong>de</strong>s traités<br />

et du Conseil, Haut Commissariat aux droits <strong>de</strong><br />

l’homme, ancien membre du Groupe <strong>de</strong> travail sur<br />

le droit au développement<br />

Il est clair que le commerce a besoin <strong>de</strong>s droits <strong>de</strong> l’homme<br />

pour avoir un impact durable, et que les <strong>de</strong>ux disciplines ont<br />

beaucoup <strong>de</strong> points communs. Comment expliquer le hiatus<br />

persistant entre ces <strong>de</strong>ux mon<strong>de</strong>s? Outre les différences<br />

en termes d’équilibre <strong>de</strong>s pouvoirs, d’expérience requise et<br />

d’institutions, ces <strong>de</strong>ux ensembles <strong>de</strong> normes sont fondés sur <strong>de</strong>s<br />

logiques fondamentalement différentes; il n’est pas nécessaire<br />

<strong>de</strong> mériter les droits <strong>de</strong> l’homme, mais il faut mériter les gains<br />

tirés du commerce. C’est peut-être à cause <strong>de</strong> cette différence<br />

fondamentale que les spécialistes du commerce considèrent les<br />

droits <strong>de</strong> l’homme comme <strong>de</strong> simples aspirations.<br />

10 Cette restriction était indispensable parce que le prix du litre d’huile était passé <strong>de</strong><br />

moins <strong>de</strong> 1 dollar EU à plus <strong>de</strong> 2 dollars EU. Comme 60 pour cent <strong>de</strong> la population<br />

bolivienne vit avec moins <strong>de</strong> 1 à 2 dollars EU par jour, cette hausse a eu <strong>de</strong>s effets<br />

considérables sur la capacité <strong>de</strong> la population <strong>de</strong> jouir <strong>de</strong> son droit à une nourriture<br />

suffi sante.<br />

11 Cette proposition tient à l’histoire <strong>de</strong> la Bolivie. Après avoir reçu une ai<strong>de</strong> alimentaire<br />

<strong>de</strong>s États-Unis dans les années 50, la Bolivie est restée dépendante du blé américain<br />

pendant 60 ans, alors qu’auparavant, elle était autosuffi sante. Ce qui a commencé sous<br />

forme d’une ai<strong>de</strong> alimentaire d’urgence a abouti à une situation <strong>de</strong> dépendance qui a<br />

obligé les petits producteurs boliviens à abandonner leur activité à cause <strong>de</strong> l’importation<br />

<strong>de</strong> produits agricoles subventionnés, compromettant le droit à une nourriture suffi sante et<br />

la souveraineté alimentaire.<br />

Forum public <strong>de</strong> l’OMC «Un commerce tourné vers l’avenir»<br />

Il subsiste aussi la crainte que suscite le mot “droits”, illustrée<br />

par le fait que les Objectifs du Millénaire pour le développement,<br />

qui sont en fait <strong>de</strong>s droits économiques, sociaux et culturels, ont<br />

dû être dénommés «objectifs» et non «droits».<br />

Par ailleurs, les relations entre les institutions ne sont pas<br />

productives. De nombreux organismes spécialisés dans les<br />

droits <strong>de</strong> l’homme ont un rapport étroit avec le commerce,<br />

notamment le Comité <strong>de</strong>s droits économiques, sociaux et<br />

culturels, les rapporteurs spéciaux sur <strong>de</strong>s questions telles que<br />

le droit à l’alimentation ou le droit à la santé, le Groupe <strong>de</strong> travail<br />

sur le droit au développement et le Haut Commissariat aux droits<br />

<strong>de</strong> l’homme. Mais ils restent très éloignés <strong>de</strong> l’OMC.<br />

Malgré cela, on observe <strong>de</strong>s progrès majeurs en ce qui<br />

concerne l’intégration <strong>de</strong>s droits <strong>de</strong> l’homme dans le commerce,<br />

notamment:<br />

<strong>de</strong>s indicateurs <strong>de</strong>s droits <strong>de</strong> l’homme sont en cours<br />

d’élaboration; les droits <strong>de</strong> l’homme seront ainsi presque<br />

autant quantifi ables que le commerce (malgré la résistance<br />

<strong>de</strong> certains États Membres);<br />

les évaluations <strong>de</strong> l’impact sur les droits <strong>de</strong> l’homme,<br />

comme celles mises au point par Simon Walker, permettent<br />

aussi <strong>de</strong> démystifi er les droits <strong>de</strong> l’homme et <strong>de</strong> les<br />

quantifi er sous une forme que comprennent les praticiens<br />

du développement;<br />

le Groupe <strong>de</strong> travail sur le droit au développement a<br />

commencé à élaborer <strong>de</strong>s critères pour l’évaluation <strong>de</strong>s<br />

partenariats <strong>de</strong> développement. Ces critères sont <strong>de</strong>s outils<br />

qui permettront aux spécialistes du commerce <strong>de</strong> pointer<br />

les éléments qui <strong>de</strong>vraient être intégrés dans la politique<br />

commerciale du point <strong>de</strong> vue <strong>de</strong>s droits <strong>de</strong> l’homme. En ce<br />

sens, le droit au développement commence à faire fonction<br />

d’intermédiaire entre <strong>de</strong>ux langages et <strong>de</strong>ux logiques.<br />

Les critères concernant le droit au développement<br />

comportent notamment l’obligation d’examiner dans quelle<br />

mesure un partenariat <strong>de</strong> développement prévoit <strong>de</strong>s évaluations<br />

d’impact ex ante et <strong>de</strong>s dispositifs <strong>de</strong> protection sociale en cas<br />

<strong>de</strong> retombées négatives, et dans quelle mesure il permet un<br />

processus participatif pour les populations concernées, <strong>de</strong><br />

même qu’un mécanisme d’évaluation et <strong>de</strong> mesure périodique<br />

permettant <strong>de</strong> procé<strong>de</strong>r, le cas échéant, à <strong>de</strong>s ajustements.<br />

Les évaluations d’impact, les dispositifs <strong>de</strong> protection sociale<br />

et les critères relatifs au droit au développement peuvent ai<strong>de</strong>r<br />

à établir les liens manquants entre le commerce et les droits <strong>de</strong><br />

l’homme.<br />

M. Salama a déconseillé aux défenseurs <strong>de</strong>s droits <strong>de</strong><br />

l’homme d’affi rmer la supériorité <strong>de</strong> ces droits sur le commerce.<br />

Il convient <strong>de</strong> gar<strong>de</strong>r à l’esprit que les droits <strong>de</strong> l’homme<br />

sont souvent considérés comme un maillon faible du droit<br />

international par rapport au droit commercial. Parmi les droits<br />

<strong>de</strong> l’homme, les droits économiques, sociaux et culturels sont<br />

jugés moins forts que les droits civils et politiques. Et le droit au<br />

développement est considéré comme le <strong>de</strong>rnier échelon <strong>de</strong> cette

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