— 64 —C'est la question de la relation entre l'individu-citoyen et l'Etat,qu'on peut résumer ainsi: la justice doit donner la garantiela plus absolue que tout citoyen sera protégé, non seulementcontre tout acte volontaire de son concitoyen, mais aussi contretout acte arbitraire du gouvernement, du pouvoir exécutif, etque la liberté et la sûreté de l'individu sont tout à fait indépendantesde l'opinion du gouvernement politique. En un mot,c'est l'idée que les savants allemands ont si bien formulée etidéalisée dans l'adage que l'Etat soit un «Etat de droit», ein« Rechtsstaat ». Cet «Etat de droit» est alors personnifie clansla personne des juges, juristes de premier rang, qui sont persuadésque tout jugement est affaire de conscience, et que, nonseulement la condamnation, mais aussi bien la gravité de lapeine, pèsent sur leur propre conscience de tout le poids deleur responsabilité. — Mais, d'autre part, pour réaliser cet effet,les lois fondamentales de divers pays européens exigent desgaranties que ce juge sera inaccessible à toute influence étrangère; on le nomme pour la vie, on lui donne un traitementélevé, on lui interdit d'exercer d'autres professions, bref, ontâche de le rendre tellement indépendant que les motifs quipourraient avoir quelque valeur pour les fonctionnaires engénéral n'en auront point pour lui.Quant à moi, cette idée d'un juge savant et indépendantest la pierre angulaire de la liberté et du droit, et c'est de cesystème seul qu'émane le fait que la conscience publique pourraêtre satisfaite de la peine infligée par le juge, étant persuadéeque la mesure de la peine n'est pas dictée par la pitié, ni parl'indignation ou pour d'autres motifs, mais uniquement en vertudu droit. — Je crois que la sentence indéterminée porteraitatteinte à cet excellent système.J'ai été juge moi-même, et j'ai toujours constaté que ladifficulté de cette fonction consistait moins à affirmer que tellepersonne est coupable ou non — dans la plupart des cas, iln'y a pas d'hésitation — que de décréter spécialement la peinequi doit être infligée. Pour cela, il faudrait étudier le caractèredu coupable et connaître ses antécédents, en même temps quela gravité du crime, toutes les circonstances de l'action; enun mot, il faudrait pénétrer du point de vue pénal dans toute— 65 —l'accusation et motiver tout ce qui pourrait être de caractèreaggravant ou atténuant et de nature à aider à fixer la justemesure de la peine.La sentence indéterminée, comme je viens de le voir, pourraitbien changer tout cela : s'il suffit pour le juge comme pourle jury de déclarer que l'accusé est coupable d'un certain crimeet que, par conséquent, il doit être incarcéré pour le minimumd'une année et un maximum de trente ans, sa tâche en serasimplifiée; une partie bien importante du véritable jugementne sera plus prononcée par lui, mais par l'administration pénitentiaire,qui décidera quand le criminel sera libéré. Le jugementse replace du terrain pénal sur le terrain pénitentiaire,et je crois que c'est pour cette raison qu'en Amérique l'étudedu droit pénal me semble n'être pas envisagée au même degré,c'est-à-dire comme étant d'une aussi grande importance quel'étude pénitentiaire et sociologue.On m'objectera que la libération conditionnelle pourra, enun certain sens, avoir le même effet ; mais je ferai remarquerque, si cela est avantageux pour la société il n'en sera pas demême pour l'individu, qui n'aura plus la certitude qu'on ne luiinfligera pas une punition d'une plus longue durée que ne l'exigela gravité de son infraction, qu'il n'aura plus de garantie d'êtretraité, non selon les règles d'une opinion toujours variabled'intérêt public, mais selon les principes du droit.J'admets volontiers qu'il y a des personnes tellement dangereuseset antisociales que l'intérêt public exige leur éloignementde la société libre; j'admets qu'au même titre que lesaliénés, il faut enfermer, pour une durée indéterminée, les criminelsendurcis récidivistes et les intellectuellement anormauxainsi que les demi-fous. Dans ces cas, la sécurité publique doitprévaloir sur la liberté individuelle et, sous certaines garanties,je donnerai volontiers mon adhésion à la dernière partie de laquestion, mais tout cela à titre exceptionnel.A mon avis, la peine pour l'individu adulte normal n'estpas toujours affaire de réformation, mais doit avoir constammentun élément rétributif qui, pour une certaine part, dépendradu caractère de son délit: question qui est absolument indépendantede la vérité, que le but principal de la prison doitActes du Congrès pénitenliaire <strong>international</strong> de Washington, vol. I.ô
— 66 -être d'exercer une influence de correction et d'amendement.Et le degré de cette rétribution ne peut être fixé que par le ju«tY aurait-il alors de bonnes raisons de remplacer le jugepénal par le juge à demi pénitentiaire? J'en doute; car, revenantà mon point de départ, je déclare que le juge pénitentiairede l'administration des prisons, qui n'est pas exempt de toutesces garanties d'indépendance et du savoir qu'on exige du jugepénal,ne peut exercer une juridiction suffisante, une juridictionqui s'harmonise avec le droit pénal et la liberté individuelle.Et s'il est une vérité incontestable, à savoir qu'un juge supérieurest indispensable pour l'Etat de droit, je ne considérerais pascomme une amélioration si ce juge, juriste compétent pour lapartie la plus difficile et la plus importante, était remplacé parun juge incompétent et arbitraire, qui ne jugerait que sur lesrapports des gardiens, selon que la conduite du détenu clansla prison est satisfaisante ou non. Je répondrai alors à lapremière partie de la question que la sentence indéterminéeest en opposition avec le vrai principe de la justice. Qu'on mecomprenne bien : je ne dis pas que l'administration des prisons,telle que nous l'avons vue, ne soit pas composée d'hommestrès honnêtes et justes; au contraire, je crois que la très grandemajorité des commissions seront parfaitement dévouées à leurtâche et très aptes à la remplir. Je ne parle que théoriquementet d'un point de vue purement objectif, comme question deprincipe. J'ajoute encore que si le juge avait pour attributionde décider plus tard sur le terme d'expiration de la peine,cela pourrait changer mes idées. Mais, comme nous voyonsmaintenant l'idée réalisée dans la pratique, il n'est pas questionde tout cela. Nous voyons d'un côté le juge, le vrai juge, quicondamne pour ainsi dire à bien plaire et d'autre part l'administrationdes prisons, sans garantie spéciale, qui fixe ladurée de la peine arbitrairement, sans autre ligne de conduiteni autre loi que son bon vouloir, suivant sa propre conscience.Et, me plaçant à ce point de vue, je me permets alors, Monsieurle Président, de déclarer avec une entière conviction queje suis opposé au principe de la sentence indéterminée.M. E. Silvela. Contrairement au système de la sentenceà durée indéterminée, le congrès de Washington doit renouveler— 67 —la résolution prise à Bruxelles en 1900. Nous venons nous mettred'accord sur les décisions à soumettre à nos gouvernements,pour y être incorporées dans nos divers codes. La sentence àdurée indéterminée, qui fleurit sur le sol de l'Amérique du Nord,n'est pas transmissible ; elle dépend des circonstances sociales.M. Magnai'd Shipley de Oakland, dans son remarquablerapport, où il se montre partisan passionné de la sentence indéterminée,a écrit ce qui suit : « Une application rationnelle dela sentence indéterminée présuppose : 1° l'existence d'un systèmemoderne de réformatoires et la suppression des institutionspurement pénales ; — 2° des commissions des directeurs ou destribunaux pour la libération, composées en partie, tout au moins,de spécialistes en criminologie et en psychiatrie ; — 8° la certituded'un emploi pour le détenu libéré. »Or, les Américains du Nord peuvent tenter des expériencesqui nous sont interdites. Ils ont le bonheur de pouvoir êtreillogiques. Nous, les latins, nous sommes des logiciens impitoyables.Nous posons un principe, et nous en tirons les conséquences,malgré les avis de la réalité. Messieurs les Américainss'écartent du principe posé quand les conséquences leschoquent. Il peut exister dans ce pays des pratiques qui cheznous pourraient provoquer des troubles préjudiciables à la paixpublique et à l'existence du droit. — Nous avons vu l'admirablefonctionnement des institutions d'Elmira, de Chicago etde Mansfield, où fleurit l'application de la peine à durée indéterminée;c'est ce qu'il y a de plus moderne, et nous lisonsdans les journaux l'application, par la souveraineté populaire,des peines parfaitement déterminées et exécutées sur place.Chez nous, un état semblable serait le symptôme d'une gravemaladie sociale.Cela démontre que les conditions des nations étant différentes,la sentence indéterminée n'est pas transmissible commeprincipe général du droit pénal pour qu'elle puisse être acceptéedans certains cas où la peine est plutôt une mesure de sûreté,où l'on vise à l'éducation des jeunes délinquants qu'il faut arrêterà leur entrée sur le chemin du crime.Quant aux principes généraux, je pense que la peine estune affirmation d'une espèce particulière en face de la négation
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