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LES MÉTAMORPHOSES

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leine de l'Auster n'avait cessé de souffler sur la terre des poisons<br />

dévorants. Les lacs et les fontaines en sont infectés. On voit par<br />

milliers les serpents ramper dans nos champs abandonnés, et<br />

souiller les sources de leur venin. Les premiers feux de la contagion<br />

attaquent les chiens, les oiseaux, les bœufs, et les brebis. Ils<br />

se font sentir aux hôtes sauvages des forêts. Le laboureur infortuné<br />

s'étonne de voir ses taureaux les plus vigoureux tomber<br />

dans les sillons. L'agneau perd sa toison, il bêle tristement, il<br />

sèche, tombe, et meurt. Le coursier généreux n'a plus sa noble<br />

ardeur ; il oublie les combats, et la palme, et l'arène ; il languit<br />

sur la litière où l'attend une mort sans honneur. Le sanglier a<br />

perdu sa fureur, le cerf sa vitesse ; l'ours ne se précipite plus sur<br />

les troupeaux. Tout souffre, tout périt. Les forêts, les champs,<br />

les chemins sont couverts d'animaux que l'horrible fléau moissonne.<br />

Ni les chiens, ni les oiseaux de proie, ni les loups avides,<br />

n'osent en approcher. La corruption ajoute à l'infection de l'air,<br />

et accélère les ravages de la contagion. Bientôt dans sa furie elle<br />

atteint les tristes habitants des campagnes ; elle établit son horrible<br />

empire dans les vastes cités.<br />

« D'abord, elle porte dans les entrailles ses feux dévorants.<br />

Un visage ardent, une pénible et brûlante haleine annoncent<br />

leur présence. La langue est âpre, et s'épaissit. La bouche desséchée<br />

s'ouvre, et aspire, en haletant, des poisons qui vicient le<br />

sang dans les veines. Le lit irrite le mal ; un voile léger est un<br />

poids insupportable. C'est sur la terre nue qu'on s'étend ; mais<br />

la terre n'a point de fraîcheur ; elle s'échauffe encore des feux<br />

des corps qui la pressent. Rien n'arrête les progrès de la contagion.<br />

Elle attaque ceux qui travaillent à la détruire : ils périssent<br />

victimes de leur art impuissant.<br />

« Ceux qui se montrent les plus empressés à donner des<br />

soins pieux marchent à plus grands pas vers la mort. Tout espoir<br />

de salut est évanoui. Tous ne voient que dans le trépas la<br />

fin de leurs souffrances. Ils cessent de se contraindre. Ils ne<br />

cherchent plus ce qui peut les sauver. Toute ressource est inu-<br />

– 179 –

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