Bernard Boller, Gottschalk d'Orbais de Fulda à Hautvillers

Gottschalk incarne les deux extrêmes de l’homme médiéval
: le marginal et le saint 120 . Ce qui réunit ces extrêmes en
un même profil, c’est leur exclusion de la société reconnue
par les pouvoirs religieux et laïcs. lorsque Gottschalk dans
ses nombreux poèmes fait allusion à la souffrance de son
exil, il ne parle pas seulement d’un bannissement physique,
mais aussi d’un bannissement intérieur, comme
celui qui résulte de l’exclusion d’un homme d’un pays du
bénéfice des sacrements, d’une privation des moyens quotidiens
du salut.
Son exil est vécu comme une peine de substitution à la
mort. Malgré la demande de son ami d’enfance W. Strabon,
cela lui coûte énormément de composer des vers et des
chants. S’il cède, c’est plus pour l’affection qu’il porte à
son compagnon de jeunesse bien-aimé, qu’à l’usage 121 .
les critiques violentes de ses supérieurs raban Maur et
Hincmar provoquent sa mauvaise réputation, «infamia», et
Gottschalk en a conscience. déjà marginalisé en refusant
l’irréversibilité de son état, il est tourmenté et obsédé par le
péché. Son chemin de chrétien le conduira du bannissement
à l’exclusion, puis de l’exclusion à l’excommunication.
Sa véritable marginalisation provient de la décision de sa
communauté de le priver du droit de séjour sur le territoire
de ses ancêtres. en transformant ses voyages en errance
pour fuir la vie organisée et la règle de sa communauté,
Gottschalk entame un long processus de déconsidération :
l’«ordo» est la seule valeur de son temps. Son existence
apparaît scandaleuse parce qu’elle échappe à l’organisation
de la société. Il attire la méfiance sociale et s’expose à
l’hostilité et à la répression. Ses déplacements constants à
travers les royaumes et les marches francs sont considérés
comme des éléments de désordre social. ainsi, il usurpe
l’autorité des évêques.
(121) Il était courant de demander à ses amis
des poèmes. Florus de lyon le fit envers le
II. le gyrovague
grammairien Vulfin d’orléans, audin et
Thomas au diacre Florus de lyon.
Gottschalk d’Orbais
de Fulda à Hautvillers :
une dissidence
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