Annibal
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extrêmement confus. On croit que le Danube relie la mer Adriatique à la mer<br />
Noire ; que le Rhône prend ses sources tout près de là, etc. Pythéas a poussé<br />
une pointe jusqu'à l'extrémité de la Bretagne, mais très vite, et il n'a rapporté<br />
que des renseignements généraux, intéressant plutôt la météorologie que la<br />
géographie. Polybe essaiera de suivre ses traces, mais n'ira même pas aussi loin.<br />
D'ailleurs, ces voyages isolés, rapides, ne suffisaient pas à faire connaître le<br />
pays.<br />
Ce qu'on connaissait, on le connaissait mal.<br />
L'usage des cartes est tellement entré dans nos mœurs ; l'homme moderne, qu'il<br />
soit militaire, ingénieur, marin, savant, commerçant, et lors même que ses<br />
fonctions ne l'obligent pas à manier journellement des cartes géographiques, y<br />
est si bien accoutumé depuis l’enfance, qu'il ne conçoit plus la possibilité de se<br />
tromper sur la grandeur, la forme, l’orientation des lignes du terrain ou des<br />
régions. Il nous est presque impossible, sans un violent effort, de nous placer<br />
dans l'état d'esprit d'un ancien, tenu sous l'empire de nombreuses erreurs<br />
fondamentales, avec lesquelles il accorde toutes les observations qu'il fait sur les<br />
pays qu'il visite.<br />
Les anciens savaient, depuis longtemps, que la terre est ronde, et ils en avaient<br />
mesuré la circonférence avec assez de précision. Partant de là, ils avaient<br />
inventé les coordonnées géographiques, longitude et latitude, et en avaient fixé<br />
la relation avec les longueurs mesurées sur la sphère.<br />
Le principe était posé, mais l'application laissait à désirer. On obtenait les<br />
latitudes avec une précision suffisante pour dresser le canevas d'une carte<br />
générale, mais il n'en était pas de même dés longitudes. Au IIIe siècle avant J.-<br />
C, Ératosthène détermine les latitudes de Syène et d'Alexandrie en mesurant la<br />
longueur de l'ombre portée par un gnomon, et il ne commet qu'une erreur de<br />
quelques minutes (24° au lieu de 24° 5' 23" à Syène, et 31° 8' 34" au lieu de 31'°12'<br />
53" à Alexandrie). Hipparque, à peu près contemporain de Polybe, avait étudié les<br />
phénomènes célestes et indiqué tous ceux qu'on pouvait utiliser pour la<br />
détermination des latitudes. Il avait dressé des tableaux indiquant les<br />
apparences célestes pour tous les parallèles sur le méridien de Rhodes. Il<br />
indiquait sans doute pour chacun la longueur du gnomon, la hauteur maximum<br />
du soleil au-dessus de l'horizon, la longueur du jour solstitial, etc. C'est du moins<br />
ce qui semble, résulter du passage assez obscur que Strabon consacre à ce<br />
travail1. Mais il paraît que ces divers renseignements furent rarement utilisés.<br />
Peut être faut-il l’attribuer à l’impossibilité de faire le point complètement, car on<br />
n'avait pas la moindre précision dans la détermination des longitudes.<br />
Celles-ci devaient être obtenues en enregistrant les heures auxquelles se<br />
produisait un même phénomène céleste dans différentes localités. L'observation<br />
d'une éclipse ou d’une occultation était aisée à faire, mais on n'appréciait l'heure<br />
que très grossièrement.<br />
Ptolémée dit qu'une éclipse de lune qui avait commencé à Arbelles à 5 heures,<br />
avait commencé à 2 heures à Carthage. On en concluait donc trois heures<br />
d'intervalle ou 45 degrés de longitude entre ces deux villes. Des connaissances<br />
plus exactes ont fait voir depuis qu'elles n'étaient pas éloignées Tune de l'autre<br />
de plus de 33° 45' ; d'où il résulte qu'on s'était trompé, soit à Carthage, soit à<br />
1 II, p. 131-135.