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Annibal

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légers. Les premiers étant transportés ainsi, on revint chercher les antres et on<br />

les fit passer à leur tour.<br />

Ils n'avaient aucune crainte tant qu'ils étaient conduits sur cette espèce de pont<br />

continu. Ils commençaient à avoir peur quand le radeau se détachait du reste et<br />

les emportait au large. Alors ils se pressaient les uns contre les autres ; ceux qui<br />

étaient au bord s’éloignant de l'eau, et ils produisaient quelque agitation. Enfin la<br />

peur même les faisait tenir tranquilles en regardant l'eau. Quelques-uns, plus,<br />

agités, tombèrent dans l'eau, où leur poids même les maintint. Débarrassés de<br />

leurs cornacs, ils cherchèrent le fond et prirent pied, pais gagnèrent le rivage.<br />

29. — Pendant que l'on faisait passer les éléphants, <strong>Annibal</strong> avait envoyé 500<br />

cavaliers numides vers le camp des Romains pour découvrir où et combien ils<br />

étaient, et quelles étaient leurs intentions. Cette troupe rencontre 300 cavaliers<br />

romains envoyés, comme nous l'avons dit, de l'embouchure du Rhône. Ils se<br />

livrent on combat plus sérieux que leur nombre ne le comportait, car, sans parler<br />

de nombreux blessés, les morts furent en quantité à peu près égale de part et<br />

d'autre. La fuite et l’effroi des Numides donna la victoire aux Romains, déjà<br />

presque épuisés. Les vainqueurs perdirent environ 160 hommes, non pas tous<br />

Romains, mais comprenant des Gaulois ; les vaincus en perdirent plus de 200.<br />

Ce début de la guerre en était comme le présage, et promettait aux Romains<br />

l'avantage définitif, mais une victoire précédée de bien des alternatives, et<br />

achetée par des flots de sang. L'affaire ainsi terminée, les deux détachements<br />

rejoignirent leurs généraux ; Scipion ne pouvait prendre d'autre parti que de<br />

régler ses opérations sur les projets et les entreprises de l'ennemi. Quant à<br />

<strong>Annibal</strong>, il se demandait s il allait continuer sa route vers l'Italie, ou s'il<br />

combattrait la première armée romaine qui s'offrait à lui ; l'arrivée des<br />

ambassadeurs boïens et du petit roi Magalus lui fit écarter le projet de combattre<br />

sur-le champ j ceux-ci venaient affirmer qu'ils seraient ses guides pendant la<br />

route et ses compagnons dans le danger, mais ils pensaient qu'il fallait entrer en<br />

Italie» avec son armée encore intacte, et sans avoir entamé les hostilités. La<br />

masse des soldats, du reste, redoutait l'ennemi, car le souvenir de la dernière<br />

guerre n'était pas encore effacé, mais ils redoutaient surtout l'immense longueur<br />

de la route et les Alpes, dont la renommée leur avait fait, dans leur ignorance,<br />

une chose épouvantable.<br />

30. — <strong>Annibal</strong>, quand il eut pris le parti de poursuivre sa route et de gagner<br />

l’Italie, rassembla les troupes et excita en elles des sentiments divers par ses<br />

reproches et ses exhortations. Il s’étonnait de cette terreur subite qui avait<br />

envahi des cœurs jusqu'alors intrépides ; il y avait tant d'années qu’il les menait<br />

à la victoire ! Et ils n'étaient sortis d'Espagne qu’après avoir soumis à Carthage<br />

toutes les terres et tous les peuples que les deux mers opposées embrassent<br />

entre elles. Indignés de ce que le peuple romain avait osé demander comme des<br />

criminels tous ceux qui avaient assiégé Sagonte, ils avaient passé l’Èbre pour<br />

détruire le nom romain et délivrer l'univers. Personne alors ne trouvait trop<br />

longue la route du couchant extrême jusqu'au levant. Et maintenant, quand ils<br />

voient la plus grande partie du chemin parcourue, qu'ils ont traversé les gorges<br />

des Pyrénées et les populations les plus sauvages, et le Rhône, ce fleuve<br />

immense que défendaient tant de milliers de Gaulois, qu'ils ont vaincu la<br />

puissance même de ce courant, qu'ils ont devant eux les Alpes, de l'autre côté<br />

desquelles se trouve l'Italie, c'est maintenant qu'ils s'arrêtent épuisés, aux portes<br />

mêmes de l'ennemi ? Que croient-ils donc qu'il y ait d'extraordinaire dans les<br />

Alpes, en dehors de leur altitude ? Ils n'ont qu'à se figurer les Pyrénées en plus<br />

haut. Il n'y a pas de terres qui touchent le ciel, ni qui soient insurmontables pour

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