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Annibal

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par le colonel Perrin ; mais c'est ici particulièrement que nous rappellerons ce<br />

que nous disions au début de cette étude : on aperçoit bien les bras morts, les<br />

traces des lits successifs du Rhône ; on peut bien dire : autrefois il a passé là ;<br />

mais à quelle antiquité remonte cet autrefois ? S'agira-t-il des temps<br />

préhistoriques, de l’époque romaine, ou d'une autre plus récente encore ? Rien<br />

ne nous le fera savoir si nous nous bornons à l'examen des vestiges encore<br />

empreints sur le sol.<br />

A cette (?) époque, dit le colonel Perrin1, le Rhône ne suivait pas le lit actuel ; à<br />

l'inspection des terrains, et d'après les dépressions que suivent encore<br />

aujourd'hui les canaux, on peut établir quelle Rhône, après avoir battu les<br />

rochers de Mornas, traversait la plaine presque en ligne droite et sans former<br />

d'îles, laissant Caderousse à sa gauche et rasant les rochers du Lampourdieu ;<br />

baignait Auriac, qui était encore il y a 38 ans un port très fréquenté par la<br />

navigation du Rhône, et qui n'a cessé d'exister que par suite des travaux<br />

d'endiguement qui ont commencé en 1841-1842.<br />

La carte de Cassini, presque contemporaine (de quoi ?), ne signale aucune île<br />

dans cette partie du lit du fleuve.<br />

Le Rhône, après avoir quitté Mornas, côtoyait les terrains de conglomérats de<br />

poudingues légers qui sont sur la rive gauche ; en quittant Piolenc, il se dirigeait<br />

vers le petit et le grand Frigoulet, suivait la petite Guiranne, où le canal porte<br />

encore le nom de Branche de la Gueyrannette, laissait Caderousse à gauche,<br />

gagnait Queyranne et Auriac, d'où, laissant à droite le château de Leis,<br />

actuellement isolé au milieu du Rhône sur un rocher que le travail des eaux a<br />

séparé de l'Esquatillon, et à gauche le rocher de Pierre-feu, qui ne figure pas sur<br />

la carte, il suivait la branche orientale actuelle, qu'on nomme le Bras des<br />

Arméniens...<br />

Il y a quelques années encore, le bras Est seul était navigable, et les bateaux,<br />

après avoir suivi le bras oriental, qu'on nomme le bras de Caderousse, passaient<br />

dans le bras occidental par le canal qui sépare l'île du Colombier de l'île de la<br />

Piboulette, et qu'on appelle le trou de Caderousse... Le bras qui a séparé les<br />

Capellous en deux parties n'a pas plus de 25 ans d’existence...<br />

Plus bas, le Rhône baignait le pied des collines qui s'étendent de Roquemaure à<br />

Villeneuve-lez-Avignon, car tout le terrain entre elles et le fleuve ne se compose<br />

que d'alluviens... Après avoir desséché l'étang de Pujaut (1630), les chartreux de<br />

Saint-Bruno firent, de la pointe à Canon à Taleur, la digue de 2.700 à 3.000<br />

mètres qui existe encore, pour conquérir les alluvions du Rhône.<br />

Ces renseignements ne manquent certes pas d'intérêt, mais on voit à chaque pas<br />

le défaut de la méthode suivie parle colonel Perrin : il nous prouve que la<br />

situation actuelle est toute récente, que les bras du Rhône, tels que nous les<br />

voyons, se sont formés depuis 48, 50, 55 ans à peine ; s'ensuit-il que la situation<br />

d'il y a 60 ans, ou celle même que reproduisait en 1740 la carte de Cassini, fût à<br />

peu de chose près celle de la plus haute antiquité ? Il s'est fait sans doute, ou<br />

plutôt il a été fait, depuis un siècle, des changements subits qui ont mis fin à un<br />

état de choses séculaire, antérieur à toute histoire ; mais il n'en est pas de<br />

même partout, et en général les bras, les îles du Rhône sont sujets à<br />

d'incessantes transformations.<br />

1 Marche d'<strong>Annibal</strong>, p. 26-27.

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