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Annibal

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CHAPITRE II. — LES TEXTES.<br />

I. — Polybe et Tite-Live.<br />

De tous les écrivains anciens qui ont raconté la marche d'<strong>Annibal</strong>, Polybe et Tite-<br />

Live sont les seuls dont nous tenions des relations complètes. Le surplus des<br />

textes qui nous sont parvenus se réduit à des abrégés, à des fragments, dont le<br />

mérite sera de nous faciliter l'analyse des deux pièces principales et la recherche<br />

des sources primitives. Le poème de Silius Italiens aura la même utilité.<br />

La critique des textes, par laquelle doit commencer toute étude historique,<br />

présente ici un intérêt particulier, car il y a, entre nos deux auteurs, tantôt de<br />

telles analogies que Tite-Live paraît un traducteur un peu libre, et tantôt de telles<br />

contradictions, qu'il décrit un chemin tout différent de celui que Polybe nous<br />

impose. Il faut remonter à l'origine de ces contradictions, les expliquer et les<br />

résoudre, si possible ; savoir, du moins, le degré de confiance que méritent les<br />

diverses indications des deux historiens, connaître leurs procédés de travail, les<br />

sources où ils ont puisé, et les retouches qu'ils ont fait subir aux documents<br />

primitifs.<br />

Il est de notoriété publique que Polybe est très supérieur à Tite-Live, et nous<br />

verrons ici-même qu'on ne peut trop vanter, ni sa conscience, ni son intelligente<br />

exactitude dans l'exposé des opérations militaires et des incidents de la marche.<br />

Nous lui reconnaîtrons aussi des qualités d'un autre ordre, dont on lui a rarement<br />

tenu compte : l'habileté dans la mise en œuvre des matériaux, habileté extrême,<br />

car Polybe les assemble, les corrige et les fond avec assez d'art pour donner<br />

l'impression d'un récit personnel, homogène ; et comme la valeur pratique des<br />

détails dont il fait choix donne la vie et le pittoresque à ses descriptions, nous<br />

avons l'illusion d'une œuvre originale, prise sur le vif. Mais nous verrons, on<br />

disséquant son ouvrage, qu'il faut nous garder de cette première apparence, et<br />

ne pas aller jusqu'à traiter son texte comme un document original ; nous<br />

déterminerons ce qui peut être, non pas inexact, mais moins précis, moins<br />

littéralement conforme à la vérité.<br />

Quant à Tite-Live, il est bien rare qu'on veuille le prendre pour guide exclusif<br />

sous prétexte que, venu plus tard, il a pu profiter des travaux de Polybe et les<br />

compléter1. En général, on reconnaît son infériorité ; on l'exagère même, et on<br />

conseille volontiers de ne pas le prendre en considération, soit qu'il confirme, soit<br />

qu'il contredise le récit de son rival. Cette solution simpliste, mais injuste, nous<br />

priverait de quelques détails rapportés par le seul Tite-Live ; elle aurait surtout<br />

l'inconvénient très grave de nous laisser inquiets de ce désaccord entre un<br />

historien très solide, très précis, et un homme considérable, après tout, qui, en<br />

connaissance de cause, aurait abandonné la version du premier. En examinant<br />

Tite-Live de près, nous lui rendrons plus de justice : nous verrons que ses<br />

renseignements, puisés le plus souvent à de bonnes sources, ne doivent pas être<br />

écartés a priori ; qu'ils sont plus circonstanciés que ceux de Polybe ; que leur<br />

groupement seul est défectueux, et conduit à des conclusions fausses si l'on n'y<br />

1 Argument présenté par Fortia d'Urban.

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