Annibal
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kilomètres pour aller d'Ampurias à Fourques. Il en aurait fait 305 à 310 pour aller<br />
à Beaucaire. Or, les 1600 stades de Polybe valent 28i kilomètres. Nous sommes<br />
donc amenés à conclure qu'il est impossible d'accepter un autre trajet que celui<br />
d'Ampurias à Fourques, si les chiffres de Polybe ont ici la même exactitude que<br />
dans les parties bien déterminées de l'itinéraire.<br />
La plupart des historiens placent le point de passage beaucoup plus haut que<br />
nous, vers Roquemaure. En acceptant les chiffres des itinéraires romains jusqu'à<br />
Nîmes, et ajoutant 48 kilomètres de Nîmes à Roquemaure, on obtient un total de<br />
324 kilomètres. Si l'on mesure directement sur la carte, on en a 329. Il y a donc,<br />
d'Ampurias à Roquemaure, par le chemin le plus court, 40 à 50 kilomètres de<br />
plus que Polybe n'en a mesuré. Une pareille différence est absolument<br />
inadmissible ; on en trouverait une plus grande et moins acceptable encore, si<br />
l'on ne faisait pas suivre aux Carthaginois la Via Domitia, mais un chemin plus<br />
conforme à leurs intérêts et à leur situation, et plus long de 5 à 10 kilomètres. La<br />
différence atteindrait alors 50 kilomètres sur 284, soit 1/5 ou 1/6, erreur qu'on ne<br />
commettrait pas avec les procédés les plus grossiers. Elle serait de 60 kilomètres<br />
si l'on faisait suivre aux Carthaginois le tracé de la route moderne.<br />
On nous objectera peut-être, comme nous l'avons supposé plus haut, que le<br />
stade de Polybe a pu être compté à raison de 8 au mille, et que la phrase : Ce<br />
chemin a été mesuré et jalonné par les Romains de 8 en 8 stades n'est pas une<br />
interpolation. Dans ce cas, en effet, les 1.600 stades de l'historien grec valent<br />
non plus 284, mais 296 kilomètres. Bien que ce chiffre soit un peu moins éloigné<br />
que le précédent des 324 kilomètres compris entre Ampurias et Roquemaure, la<br />
différence (28 kilomètres) est devenue moins admissible encore, car cette fois le<br />
chiffre de Polybe est un chiffre officiel, qui ne peut s'écarter de la réalité : on sait<br />
qu'il n'y a jamais que des différences très faibles entre les mesures des<br />
itinéraires romains et celles que nous prenons sur les cartes d'état-major, quand<br />
le tracé des voies romaines est parfaitement connu. Ici 5 kilomètres de<br />
différence sont un maximum.<br />
Quelle que soit l’importance que l'on accorde à l’à peu près de Polybe, peut-on<br />
admettre qu'il aille jusqu'à donner 1.600 stades pour 1.800 à 2.000 stades ?<br />
Nous ne le pensons pas, et il nous semble tout à fait inacceptable, par<br />
conséquent, de faire remonter <strong>Annibal</strong> jusqu'en face de Roquemaure, quelque<br />
hypothèse que fort fasse sur son itinéraire.<br />
Beaucaire est admissible si l'on adopte le stade de 185 mètres ; il l’est encore, à<br />
la rigueur, si l'on s'en lient au stade de 177m,50, mais pourvu que l'on suppose<br />
la voie domitienne tracée plus de deux cents ans avant l'ère chrétienne, à travers<br />
marais, étangs, coteaux et vallons, et sans rapport avec les comptoirs de la côte.<br />
Si l'on pense, comme nous, que le travail d'alignement et de construction de<br />
cette voie n'a pu être fait avant la conquête romaine, et qu'<strong>Annibal</strong> s'est tenu<br />
très près de la côte, le passage près de Fourques s'impose d'une manière<br />
absolue. Il nous donne, en ne négligeant aucun détour, 300 kilomètres<br />
d'Ampurias au Rhône, et c'est déjà beaucoup en comparaison des 284 kilomètres<br />
de Polybe.<br />
A moins de n'accorder absolument aucune valeur au chiffre de Polybe (car c'est<br />
n'en accorder aucune que de prendre 1.600 environ pour 1.800, 1.900 ou 2.000), tandis<br />
que nous avons pu constater ailleurs sa très grande précision, il nous faut placer<br />
le passage du Rhône par <strong>Annibal</strong> entre Arles et Beaucaire. Encore ne peut-il être<br />
relevé jusqu'à Beaucaire que si l’on admet qu'<strong>Annibal</strong> ait pu suivre un chemin