Mmoires du vice-amiral baron Grivel : Rvolution-Empire - Les ...

146 MEMOIRES DU VICK-AMIRAL BARON G R 1 V E L
nationales ne se fussent pas prêtées à un autre arrangement.
Madrid était tranquille, malgré les doutes qu'on commençait
à concevoir sur nos intentions, niais ni le départ du roi Ferdi-
nand, ni celui du vieux monarque n'avaient point encore altéré
la lionne harmonie, du moins à l'extérieur. On allait au Prado
le soir à l'ordinaire, et les officiers français abondaient sur
cette belle promenade. Les cafés étaient remplis de consomma-
teurs, et on sait que ces sortes d'établissements peuvent en
admettre en plus grand nombre que dans les autres capitales.
La police se faisait bien, car on n'entendait parler d'aucun
accident, mais chacun avait l'air de se tenir sur la réserve, et
il n'existait entre les hululants et nous aucune sympathie. On
s'observait, c'était visible. Tout le monde semblait attendre
quelque grave événement.
Cet événement eut lieu, en effet, et la bombe éclata le
2 mai, comme on s'y attendait le moins, à l'occasion du départ
d'un membre de la famille royale, que l'on voulait, disait-on,
arracher du Palais et faire aller à Rayonne malgré lui. Le
peuple coupa les traits des mules, résista à la garde et maltraita
un aide de camp du prince Murât. Une fois l'alarme donnée, on
courut sus aux Français isolés dans tous les quartiers; mais,
comme il était encore d'assez bonne heure, on n'en rencontra
pas hors de leur logis autant qu'on pouvait le craindre. Tous
les postes prirent immédiatement les armes, et bientôt la troupe
parut. Le combat s'engagea principalement dans la rue d'AI-
cala, d'où les chasseurs à cheval furent ramenés assez vivement
et dans quelques rues environnantes. Je venais de traverser la
petite place de San-Doniingo, et je causais avec notre adjudant-
major qui se rendait à la Poste. J'allais moi-même à
I hôpital,
et, comme ces deux établissements sont voisins l'un de l'autre,
nous nous apprêtions à faire route ensemble. Mous venions à
peine de nous acheminer, que nous entendîmes plusieurs
décharges de inousqueterie et que nous vîmes le peuple fuir
dans toutes les directions. Nous arrêtâmes un abbé par son