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Mmoires du vice-amiral baron Grivel : Rvolution-Empire - Les ...

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»36 MEMOIRES DU V IC E- A M I R A I. BARON G R 1 V E I,<br />

tamment, sans que la croisière s'en inquiétât. Il commençait à<br />

être de mode, parmi les grands personnages d'Angleterre, d'aller<br />

à Porto-Ferrajo, comme à une sorte de pèlerinage, et il n'était<br />

bruit que des merveilles que le génie créateur de Napoléon<br />

faisait éclore autour de lui. <strong>Les</strong> laitues de Salone, auxquelles<br />

on avait d'abord condamné son activité, n'étaient plus de sai-<br />

son déjà, et l'on pressentait que, tôt ou tard, il reparaîtrait sur<br />

la scène politique. On ne savait quand, ni comment, certes, et<br />

hormis, peut-être, quelques confidents très intimes, personne<br />

ne soupçonnait ses desseins. Pourtant, les violettes portées avec<br />

affectation, Viterumventurus est qu'on entendait les militaires<br />

s'adresser fréquemment les uns aux autres et, plus que tout<br />

cela, ce sixième sens populaire qu'on ne peut définir et qui<br />

semble deviner les grandes catastrophes, tout annonçait un<br />

mouvement avant peu.<br />

Je ne pouvais m'y méprendre, quanta moi, et, bien que je<br />

ne fusse initié à aucun projet et que je n'appartinsse à aucune<br />

coterie, j'étais sûr, comme de mon existence, que quelque chose<br />

de grave allait se passer. Je parlais, au reste, publiquement<br />

comme tout le monde, <strong>du</strong> retour en question et ne laissais<br />

point ignorer mes pressentiments à quelques dames de haut<br />

parage dont je fréquentais les salons. Il est vrai quelles se<br />

moquaient de moi et ne croyaient pas une syllabe de ce que je<br />

leur disais; mais les choses n'en avançaient pas moins, et il<br />

devenait chaque jour plus évident que nous touchions à des<br />

événements majeurs.<br />

Je citais, entre autres, une scène caractéristique qui venait<br />

d'avoir lieu à une des barrières de Paris. Trois soldats étaient<br />

entrés dans un cabaret; ils étaient un peu avinés et avaient<br />

demandé une bouteille <strong>du</strong> meilleur. On les servit sur-le-champ<br />

et on leur apporta trois verres; mais ils s'écrièrent aussitôt :<br />

« Madame, un autre verre. — Excusez, messieurs, dit la caba-<br />

relière, comme vous n'êtes que trois... — C'est égal, porte/,<br />

toujours! le quatrième va venir : k A sa santé, camarades »,

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