Mmoires du vice-amiral baron Grivel : Rvolution-Empire - Les ...

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MÉMOIRES DU VICE-AMIRAL BARON GR1VEL
mais il ajoutait que la Cour avait mal jugé de ces dispositions,
que les Princes avaient paru devant ces troupes citoyennes avec
des allures anglaises et un laisser-aller auquel on ne s'atten-
dait guère; qu'enfin ils avaient déplu, mais que le Roi, en
revanche, avait gagné tous les cœurs, et toujours mon père
finissait en s'écria nt : « Si le Koi avait voulu, nous étions la
plus de trente mille fédérés, ayant été militaires, qui auraient
immédiatement tiré l'épée pour son service. » Les événements
marchaient vite en ce temps-là. Bientôt la royauté fut avilie et
successivement abolie. La République fut inaugurée, l'ancien
système de gouvernement détruit. La religion perdit ses
temples, et ses cérémonies ne purent désormais s'accomplir
que dans les bois et les cavernes, comme celles des premiers
chrétiens. Enfin, la liberté fut complètement étouffée dans le
pays par l'effroyable dictature du Comité de salut public. Tout
le monde n'accéda pas néanmoins à ce bouleversement incon-
cevable. Des légions se formèrent dans une trentaine de dépar-
tements, pour faire tète à l'orage et tâcher de sauver la pro-
priété et la vie des citoyens. J'ai toujours ignoré si cette levée
extraordinaire avait un but politique, moins exclusif, mon
père ne s'étant jamais expliqué catégoriquement à cet égard.
Comme il commandait la légion qu'on arma chez nous, il était
probablement lié par sa parole; mais je me souviens qu'il
déplorait souvent qu'on ne songeât pas à se lier par un état-
major généra] et qu'il prédisait avec beaucoup de justesse ce
qui arriva effectivement, c'est-à-dire qu'aucune de ces forces
départementales ne tiendrait devant un décret de dissolution
Ce décret ne se fit pas attendre, et il était temps qu'il fût
rendu, car ces légions éphémères dont je parle commençaient
à prendre de la consistance. Celle de notre département comp-
tait près de 2000 hommes, dont iOO de cavalerie et 100 d'ar-
tillerie. Tout ça était habillé, armé, équipé et exercé journel-
lement Certes, une trentaine de corps de celte nature était
une belle avance pour attacher le grelot, mais le souille puis-